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04/03/2009 | FRANCE | N°08-60436

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mars 2009, 08-60436


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris, 19 mai 2008), que par lettre du 19 février 2008, le syndicat CFTC des employés de la prévention et de la sécurité a notifié à la société ISS sécurité la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical ; que la société a contesté cette désignation au motif que l'effectif de l'entreprise ne permettait la désignation que d'un seul délégué syndical et que le syndicat CFTC avait déjà procédé à la désignation d'un tel délé

gué ;

Attendu que la société ISS sécurité fait grief au jugement de l'avoir déboutée ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Paris, 19 mai 2008), que par lettre du 19 février 2008, le syndicat CFTC des employés de la prévention et de la sécurité a notifié à la société ISS sécurité la désignation de M. X... en qualité de délégué syndical ; que la société a contesté cette désignation au motif que l'effectif de l'entreprise ne permettait la désignation que d'un seul délégué syndical et que le syndicat CFTC avait déjà procédé à la désignation d'un tel délégué ;

Attendu que la société ISS sécurité fait grief au jugement de l'avoir déboutée de sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ qu'est régulière et ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement garanti par les articles 6 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, et 1, 5 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la décision de l'employeur de s'opposer dorénavant à la désignation, par l'un quelconque des syndicats de l'entreprise, d'un délégué syndical tant que le nombre ne sera pas redescendu à celui fixé par la loi ; qu'en jugeant cependant que la société ISS sécurité ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée par le syndicat CFTC, au seul prétexte que d'autres syndicats disposaient eux aussi de deux délégués syndicaux, sans constater que les désignations surnuméraires de ces syndicats étaient intervenues postérieurement à la décision de l'employeur de remettre en cause la tolérance antérieure, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des textes précités et des articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412- 2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8 L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail ;

2°/ que si l'acceptation par l'employeur de désignations surnuméraires effectuées par certains syndicats l'oblige à accepter celles des autres, il n'en va pas de même lorsque l'existence des désignations surnuméraires est le fruit d'une erreur, non créatrice de droit ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que c'était à la suite d'erreurs commises à la suite d'une réorganisation et d'une omission de sa part que des désignations surnuméraires étaient intervenues ; qu'en jugeant cependant que, quelles que soient les causes de ces désignations, elle ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée postérieurement par le syndicat CFTC, le tribunal d'instance a violé les articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412-2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8, L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 412-21 devenu l'article L. 2141-10 code du travail que si le nombre des délégués syndicaux dans l'entreprise ou l'établissement tel qu'il est fixé par la loi peut être augmenté par accord collectif, ni un usage de l'entreprise ou de l'établissement ni un engagement unilatéral de l'employeur ne peuvent modifier les dispositions légales correspondantes ; qu'il s'ensuit que l'employeur qui décide unilatéralement d'une telle augmentation peut unilatéralement décider de revenir à l'application des textes légaux qui n'ont pas cessé d'être applicables, sous réserve de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre tous les syndicats concernés et, pour répondre à l'exigence de loyauté qui s'impose en la matière, de les en informer préalablement ;

Que le tribunal devant lequel l'employeur n'alléguait pas avoir informé les syndicats concernés d'une décision de revenir à l'application des textes légaux préalablement à la désignation par le syndicat CFTC d'un second délégué a statué à bon droit ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société ISS sécurité

IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué d'AVOIR débouté la société ISS SECURITE de ses demandes et de l'AVOIR condamné à payer 1.000 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

AUX MOTIFS QU'il résulte des articles L. 412-13 et R. 412-2 du Code du travail que les organisations syndicales dans les entreprises qui ont un effectif compris entre 50 et 999 salariés peuvent désigner un délégué syndical ; qu'il est établi que l'effectif de la société ISS SECURITE est de 664 salariés et que le syndicat CFTC lui a notifié le 2 septembre 2005 la désignation de Monsieur Y... et le 19 février 2008 celle de Monsieur X..., en qualité de délégués syndicaux, ce qui est donc hors des dispositions légales ; que les pièces versées aux débats établissent par ailleurs que les syndicats CGT, CFDT et FO disposent quant à eux de 2 délégués syndicaux, par suite, d'après les dires d'ISS, d'erreurs et omissions de sa part (sic) ; qu'il n'en demeure pas moins que, quelles que soient les causes de ces doubles désignations, un employeur ne saurait, au nom du principe d'égalité de valeur constitutionnelle, refuser la désignation d'un délégué syndical dès lors qu'il l'a acceptée pour d'autres syndicats représentatifs ; qu'ainsi, si ISS SECURITE peut décider unilatéralement de revenir à l'application des textes légaux, cela doit se faire à la condition de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre les syndicats concernés, ce qui n'est guère le cas en l'espèce, puisque les textes légaux ne s'appliqueraient qu'à la CFTC ;

1. ALORS QU'est régulière et ne méconnaît pas le principe d'égalité de traitement garanti par les articles 6 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, et 1, 5 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la décision de l'employeur de s'opposer dorénavant à la désignation, par l'un quelconque des syndicats de l'entreprise, d'un délégué syndical tant que le nombre ne sera pas redescendu à celui fixé par la loi ; qu'en jugeant cependant que la société ISS SECURITE ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée par le syndicat CFTC, au seul prétexte que d'autres syndicats disposaient eux aussi de 2 délégués syndicaux, sans constater que les désignations surnuméraires de ces syndicats étaient intervenues postérieurement à la décision de l'employeur de remettre en cause la tolérance antérieure, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des textes précités et des articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412-2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8 L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail ;

2. ALORS QUE si l'acceptation par l'employeur de désignations surnuméraires effectuées par certains syndicats l'oblige à accepter celles des autres, il n'en va pas de même lorsque l'existence des désignations surnuméraires est le fruit d'une erreur, non créatrice de droit ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que c'était à la suite d'erreurs commises à la suite d'une réorganisation et d'une omission de sa part que des désignations surnuméraires étaient intervenues ; qu'en jugeant cependant que, quelles que soient les causes de ces désignations, elle ne pouvait contester la désignation surnuméraire effectuée postérieurement par le syndicat CFTC, le tribunal d'instance a violé les articles L. 412-2, L. 412-11, L. 412-15, L. 412-21 et R. 412-2, devenus L. 2141-5, L. 2143-3, L. 2143-8 L. 2141-10 et R. 2143-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-60436
Date de la décision : 04/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Représentant syndical - Désignation - Nombre de représentants - Nombre légal - Modification - Limites

Il résulte de l'article L. 433-1, alinéa 3, recodifié sous l'article L. 2324-1 du code du travail, que si le nombre de représentants syndicaux au comité d'entreprise tel qu'il est fixé par la loi peut être augmenté par accord collectif, ni un usage de l'entreprise ni un engagement unilatéral de l'employeur ne peuvent modifier les dispositions légales correspondantes. Il s'ensuit que l'employeur qui décide unilatéralement d'une telle augmentation peut unilatéralement décider de revenir à l'application des textes légaux qui n'ont cessé d'être applicables, sous réserve de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre tous les syndicats concernés et, pour répondre à l'exigence de loyauté qui s'impose en la matière, de les en informer préalablement. Doit dès lors être approuvé le jugement qui, ayant constaté qu'un employeur avait admis pendant plusieurs années la possibilité pour chaque organisation syndicale de désigner un nombre de représentants au comité d'entreprise supérieur au nombre légal, retient qu'il ne pouvait demander l'annulation de la désignation d'un représentant par un syndicat en remplacement de son second représentant faute d'avoir préalablement informé les organisations syndicales concernées de sa décision de revenir à l'application des textes légaux (arrêt n° 1, pourvoi n° 08-60.411). De même, doit être rejeté le pourvoi reprochant à un tribunal de ne pas avoir annulé la désignation par un syndicat d'un second délégué syndical dès lors que l'employeur n'avait pas contesté de telles désignations antérieurement opérées par d'autres syndicats et n'alléguait pas avoir préalablement informé les organisations concernées d'une décision de revenir à l'application des textes légaux (arrêt n° 2, pourvoi n° 08-60.401). En revanche, l'employeur qui a demandé aux syndicats de ramener le nombre de leurs délégués dans les limites prévues par la loi après diminution de l'effectif de son entreprise, passé en dessous du seuil de mille depuis trois ans, est en droit de demander ensuite l'annulation de la désignation par un syndicat d'un second délégué (arrêt n° 3, pourvoi n° 08-60.436)


Références :

article L. 433-1, alinéa 3, recodifié sous l'article L. 2324-1 du code du travail

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Paris 16ème, 19 mai 2008

Sur la faculté de remise en cause de décisions unilatérales de l'employeur admettant la désignation de représentants surnuméraires, sous réserve de ne pas méconnaître le principe d'égalité entre tous les syndicats concernés, à rapprocher :Soc., 5 mars 2008, pourvoi n° 07-60305, Bull. 2008, V, n° 52 (cassation sans renvoi) Sur l'impossibilité de déroger autrement que par une convention ou un accord collectif au nombre de représentants syndicaux prévu par les textes, à rapprocher :Soc., 30 mai 2001, pourvoi n° 00-60150, Bull. 2001, V, n° 199 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mar. 2009, pourvoi n°08-60436, Bull. civ. 2009, V, n° 62
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 62

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Allix
Rapporteur ?: M. Béraud
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.60436
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