La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/03/2009 | FRANCE | N°08-13592

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 04 mars 2009, 08-13592


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 28 janvier 2008), que le Groupement foncier agricole des CARMES (GFA) a consenti à la société civile d'exploitation agricole Billault et fils (SCEA) un bail à ferme d'une durée de 18 années, ayant pour objet un ensemble de terres à vocation agricole ; que le 24 avril 2006, le GFA lui a donné un congé pour reprise prenant effet le 31 octobre 2007 ; que la SCEA a demandé la nullité du congé ;
Attendu que la SCEA fait grief à l'ar

rêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que les personnes moral...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 28 janvier 2008), que le Groupement foncier agricole des CARMES (GFA) a consenti à la société civile d'exploitation agricole Billault et fils (SCEA) un bail à ferme d'une durée de 18 années, ayant pour objet un ensemble de terres à vocation agricole ; que le 24 avril 2006, le GFA lui a donné un congé pour reprise prenant effet le 31 octobre 2007 ; que la SCEA a demandé la nullité du congé ;
Attendu que la SCEA fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen :
1°/ que les personnes morales à la condition d'avoir un objet agricole peuvent exercer le droit de reprise sur les biens qui leur ont été apportés en propriété ou en jouissance au moins avant la date du congé ; que les conditions ne sont pas exigées des Groupements agricoles d'exploitation en commun ou des sociétés constituées entre conjoints ou parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclus ; que pour apprécier si la personne morale a bien qualité pour exercer le droit de reprise en vue de faire assurer la mise en valeur de ses biens par l'un des associés, il convient de se placer au jour de la délivrance du congé et non à la date d'effet de celui-ci ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait à tort en constatant qu'à la date de délivrance du congé -soit le 24 avril 2006- les statuts du GFA des CARMES ne lui permettaient d'exploiter les biens repris, la cour d'appel a procédé à une violation des articles L. 411-58, L. 411-59 et L. 411-60 du code rural ;
2°/ que les conditions de la reprise doivent être appréciées au regard du congé tel qu'il a été donné, quelles que soient les modifications apportées par le bailleur au cours de la procédure ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait et en se fondant sur la décision de l'assemblée générale du GFA des Carmes intervenue au cours de la procédure d'appel, la cour d'appel a violé les articles ci-dessus visés ;
3°/ que le congé à fin de reprise délivré par une personne morale doit, à peine de nullité, mentionner le nom de la société bénéficiaire de l'opération et celui de l'associé désigné pour assurer l'exploitation ; qu'en l'espèce, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que le congé était délivré pour permettre la reprise au profit de M. X... et non au profit du GFA des Carmes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 411-60 du code rural ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le congé du 24 avril 2006 avait été délivré à la requête du GFA, bénéficiaire de la reprise, qu'aux termes d'une assemblée générale du 4 août 2007, les membres associés du GFA avaient modifié l'article 2 des statuts, qui énonçait désormais que "le groupement foncier agricole pourra procéder à l'exploitation en faire valoir direct des biens constituant son patrimoine" et retenu, à bon droit, que la possibilité pour le GFA d'exploiter les terres, objet de la reprise, conformément aux dispositions des articles L. 411-59, L. 411-60 et L. 411-63 du code rural, par l'un de ses membres, constituait une condition de fond qui devait s'apprécier à la date d'effet du congé, le 31 octobre 2007, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, en a déduit exactement que, compte tenu de la modification intervenue, la condition relative à l'exploitation en faire valoir direct était remplie à cette date ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Billault et fils aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Billault et fils ; la condamne à payer au GFA des Carmes la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE à l'arrêt n° 285 (CIV. III) ;
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, Avocat aux Conseils, pour la société Billault et fils ;
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté la régularité du congé délivré par le GFA des CARMES à la SCEA BILLAULT et Fils, l'objet agricole du GFA des CARMES et la faculté pour ce dernier de procéder à l'exploitation en faire valoir direct des biens constituant son patrimoine, et d'avoir retenu que la reprise des biens visés au congé resterait subordonnée à l'obtention par Christian X... d'une autorisation définitive d'exploiter, laquelle n'est pas acquise en l'état, et enfin d'avoir dit qu'il sera sursis à statuer jusqu'à ce qu'une décision définitive soit intervenue sur la demande d'autorisation d'exploiter de Christian X..., le fait se trouvant, de plein droit prorogé jusqu'à la fin de l'année culturale au cours de laquelle ladite décision deviendra définitive.
Aux motifs qu'il n'est pas contesté que le GFA des CARMES de par ses statuts présente un objet agricole.
Que ledit GFA, qui était, à la date du congé, exclusivement constitué entre Christian X... et sa fille, Marion X... épouse Z..., est une société de famille au sens dudit texte, de sorte que les conditions de délai exigées tant pour la durée de possession des biens, objet de la reprise, que pour la durée de détention des parts sociales, cette dernière disposition renvoyant à la définition des personnes morales donnée au premier alinéa, laquelle est indissociable de la dérogation accordée aux sociétés de famille, ne s'appliquait pas ; que le congé délivré le 24 avril 2006 l'est à la requête du GFA des CARMES, bénéficiaire de la reprise et précise que l'exploitation des biens sera assurée par Christian X..., membre du groupement, de sorte que sa régularité formelle ne peut être contestée » ; que pour rejeter la demande du GFA des CARMES, le premier juge avait retenu que les statuts de ce dernier ne lui permettaient pas une exploitation en faire valoir direct des biens repris, ceux-ci devant nécessairement être donnés à bail aux termes de l'article 2 desdits statuts ; que, cependant, aux termes d'une assemblée générale du 4 août 2007, les membres associés du GFA des CARMES ont modifié cet article des statuts, lequel énonce désormais expressément que « le groupement foncier agricole pourra procéder à l'exploitation en faire valoir direct des biens constituant son patrimoine ;
Que contrairement à ce que soutient l'intimé, les conditions de la reprise s'apprécient non à la date du congé, mais à celle pour laquelle ce congé a été donné ; que la possibilité pour le GFA d'exploiter les terres, objet de la reprise, conformément aux dispositions des articles L 411-59, L 411-60 et L 411-63 du Code rural, par l'un de ses membres, constitue une condition de fond qui, comme telle, doit s'apprécier à la date d'effet du congé, en l'occurrence au 31 octobre 2007 ; que compte tenu de la modification intervenue, cette condition sera remplie à cette date, de sorte que l'obstacle retenu par le Tribunal se trouve désormais levé ».
Alors d'une part que les personnes morales à la condition d'avoir un objet agricole peuvent exercer le droit de reprise sur les biens qui leur ont été apportés en propriété ou en jouissance au moins avant la date du congé ; que les conditions ne sont pas exigées des Groupements agricoles d'exploitation en commun ou des sociétés constituées entre conjoints ou parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclus ; que pour apprécier si la personne morale a bien qualité pour exercer le droit de reprise en vue de faire assurer la mise en valeur de ses biens par l'un des associés, il convient de se placer au jour de la délivrance du congé et non à la date d'effet de celui-ci ; que dès lors en statuant comme elle l'a fait à tort en constatant qu'à la date de délivrance du congé – soit le 24 avril 2006 – les statuts du GFA des CARMES ne lui permettaient d'exploiter les biens repris, la Cour d'Appel a procédé à une violation des articles L. 411-58, L. 411-59 et L. 411-60 du Code Rural.
Alors d'autre part que les conditions de la reprise doivent être appréciées au regard du congé tel qu'il a été donné, quelles que soient les modifications apportées par le bailleur au cours de la procédure ; que dès lors en statuant comme elle l'a fait et en se fondant sur la décision de l'assemblée générale du GFA des CARMES intervenue au cours de la procédure d'Appel, la Cour d'Appel a violé les articles ci-dessus visés.
Alors en outre que le congé à fin de reprise délivré par une personne morale doit à peine de nullité mentionner le nom de la société bénéficiaire de l'opération et celui de l'associé désigné pour assurer l'exploitation ; qu'en l'espèce en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que le congé était délivré pour permettre la reprise au profit de Monsieur X... et non au profit du GFA des CARMES, la Cour d'Appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 411-60 du Code Rural.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-13592
Date de la décision : 04/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Reprise - Bénéficiaire - Personne morale - Conditions - Caractère agricole et familial - Appréciation - Moment - Détermination

BAIL RURAL - Bail à ferme - Reprise - Conditions - Appréciation - Date d'effet du congé

Les conditions spécifiques de la reprise par une société tenant au caractère agricole et familial de celle-ci sont appréciées, conformément aux dispositions de l'article L. 411-60 du code rural, à la date du congé tandis que les conditions tenant à l'exploitation des terres reprises prévues à l'article L. 411-59 du code rural le sont à la date d'effet du congé


Références :

articles L. 411-59, L. 411-60 et L. 411-63 du code rural

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 28 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 04 mar. 2009, pourvoi n°08-13592, Bull. civ. 2009, III, n° 55
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 55

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Cuinat
Rapporteur ?: M. Philippot
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.13592
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award