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18/02/2009 | FRANCE | N°08-10973

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 février 2009, 08-10973


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 2282 du code civil ;

Attendu que la possession est protégée, sans avoir égard au fond du droit, contre le trouble qui l'affecte ou la menace ; que la protection possessoire est pareillement accordée au détenteur contre tout autre que celui duquel il tient ses droits ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 15 mai 2007), que par acte notarié du 26 septembre 1977, les époux X... ont vendu un fonds de commerce d'hôtel-restaurant aux époux

Y... et les ont autorisés à utiliser pour eux et leurs clients l'aire de stationnem...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 2282 du code civil ;

Attendu que la possession est protégée, sans avoir égard au fond du droit, contre le trouble qui l'affecte ou la menace ; que la protection possessoire est pareillement accordée au détenteur contre tout autre que celui duquel il tient ses droits ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 15 mai 2007), que par acte notarié du 26 septembre 1977, les époux X... ont vendu un fonds de commerce d'hôtel-restaurant aux époux Y... et les ont autorisés à utiliser pour eux et leurs clients l'aire de stationnement de la station service fermée située sur la parcelle contiguë n° 107, leur appartenant ; qu'en 2001, cette parcelle a été vendue aux époux Z...
A... qui, après l'avoir divisée en plusieurs parcelles, ont cédé, en 2004, la parcelle n° 112, comprenant l'aire de stationnement à Mme B... ; que cette dernière a planté des piquets métalliques autour de l'aire, puis installé une clôture et trois poteaux en béton empêchant tout accès aux véhicules ; que les époux Y... ont assigné Mme B... en réintégration devant le tribunal d'instance aux fins de la faire condamner à remettre l'aire de stationnement dans son état antérieur ; que Mme B... a assigné en intervention forcée et en garantie les époux Z...
A... et demandé de les condamner au paiement de dommages et intérêts ;

Attendu que pour accueillir l'action en réintégration, l'arrêt retient que les époux Y... disposent d'un titre justifiant leur détention, que l'acte notarié du 26 septembre 1977 les autorise à utiliser pour eux et leurs clients l'emplacement de la station service, et que les époux Z...
A... et Mme B... sont des tiers par rapport aux époux Y..., qui n'eurent de rapports juridiques qu'avec les époux X... et qui n'ont aucun lien de droit avec les époux Z...
A... et Mme B..., les époux Y... n'ayant pas été appelés aux actes successifs de vente ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'en cas de vente d'un immeuble dont le propriétaire avait conventionnellement accordé la détention à un tiers, l'ayant cause acquéreur devient celui de qui le détenteur tient ses droits, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 mai 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;

Condamne les époux Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, condamne les époux Y... à payer à la SCP Waquet, Farge et Hazan la somme de 2 500 euros ; rejette la demande des époux Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du dix-huit février deux mille neuf, par M. Peyrat, conseiller doyen, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour Mme B....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné Mme B... à remettre l'aire de stationnement en son état antérieur ;

AUX MOTIFS QUE la protection possessoire est accordée au détenteur contre tout autre que celui duquel il tient ses droits ; que les époux Y... étaient détenteurs de l'aire de stationnement en vertu du titre que constituait l'acte de cession de fonds de commerce du 22 septembre 1977, intervenue entre les époux Y... et les époux X... ; que le juge possessoire n'a pas à vérifier le titre des parties ; que les époux Z...
A... et Mme B... sont des tiers par rapport aux époux Y..., qui n'eurent de rapports juridiques qu'avec les époux X... et n'ont aucun lien de droit avec les intimés, les époux Y... n'ayant pas été appelés aux actes successifs de vente ; que la clôture totale de l'aire susvisée pour y empêcher tout accès et stationnement, constitue un trouble caractérisé ; qu'en agissant ainsi, Mme B... a porté atteinte à la détention paisible de l'aire par les époux Y... ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la protection possessoire est accordée au détenteur contre tout autre que celui de qui il tient ses droits ; qu'en cas de vente d'un immeuble dont le propriétaire avait conventionnellement accordé la détention à un tiers, l'ayant cause acquéreur devient celui de qui le détenteur tient ses droits au sens de l'article 2282 alinéa. 2 du Code civil ; que dès lors, en accueillant l'action possessoire engagée par les époux Y..., la cour d'appel a violé l'article 2282 du Code civil ;

ALORS, subsidiairement et en tout état de cause, QUE la protection possessoire est accordée au détenteur contre tout autre que celui de qui il tient ses droits ; qu'en cas de vente d'un immeuble dont le propriétaire avait conventionnellement accordé la détention à un tiers, il se peut, selon les circonstances de l'espèce, que l'acquéreur soit celui de qui le détenteur tienne désormais ses droits ; que cette question ne peut être tranchée que par le juge du droit commun ; que par conséquent, l'action possessoire du détenteur contre l'ayant cause du vendeur ne peut être accueillie si la question de leur relation n'a pas été tranchée au fond ; que dès lors, en accueillant l'action possessoire des époux Y..., la Cour d'appel a violé les articles 2282 et 2283 du code civil, ensemble les articles 1264 et 1265 du code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'inexécution d'une convention ne peut donner lieu à l'action possessoire ; que ce principe vaut tant pour les cocontractants eux-mêmes que pour leurs ayants cause à titre particulier ; qu'en l'espèce, les époux Y... cherchaient à obtenir l'exécution du contrat de cession de fonds de commerce qui les autorisait à détenir, à certaines conditions, l'aire de stationnement litigieuse ; que dès lors, en accueillant l'action possessoire qu'ils avaient engagée, la Cour d'appel a violé les articles 2282 et 2283 du Code civil, ensemble les articles 1264 et 1265 du Code de procédure civile ;

ALORS, EN OUTRE, QUE l'action possessoire ne peut être cumulée avec une action pétitoire ; qu'en l'espèce, en décidant que la détention des époux Y... ne résultait pas d'une simple tolérance mais d'un titre qui la justifiait, et en relevant que les époux Y... n'étaient unis aux époux Z...
A... et à Mme B... par aucun lien de droit, la Cour d'appel a pris position sur le fond du litige ; que dès lors, elle a méconnu le principe du non-cumul du pétitoire et du possessoire, violant ainsi les articles 2282 et 2283 du Code civil, ensemble les articles 1264 et 1265 du Code de procédure civile ;

ET ALORS, ENFIN, QUE la réintégration suppose une voie de fait de nature assez grave pour compromettre la paix publique ; que le fait pour un propriétaire de clôturer son immeuble afin d'en empêcher l'accès ne constitue pas une voie de fait ouvrant droit à la réintégration ; que dès lors, en estimant que Mme B... avait, en condamnant l'accès à l'aire de parking, commis une voie de fait ouvrant droit à la réintégration, la Cour d'appel a violé les articles 2282 et 2283 du Code civil, ensemble l'article 1264 du Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de dommages-intérêts de Mme B... à raison du dol par réticence commis par les époux Z...
A... ;

AUX MOTIFS QU'il n'est pas démontré que les vendeurs aient eu connaissance de la convention existant entre les époux Y... et X..., et qu'ils aient commis un dol caractérisé à l'origine d'un préjudice dont la nature n'est pas définie, alors que l'encombrement de l'aire de stationnement à l'heure des repas ne pouvait passer inaperçu ainsi que l'a noté l'expert judiciaire ;

ALORS QUE le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait amené à contracter à d'autres conditions ; qu'en jugeant qu'il n'était pas démontré que les époux Z...
A... aient commis de dol caractérisé qui ait été à l'origine d'un préjudice dont la nature n'est pas définie, alors qu'elle relevait que l'encombrement de l'aire de stationnement à l'heure des repas ne pouvait passer inaperçu et que Mme B... avait formé une demande de dommages-intérêts sur le fondement du dol, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé l'article 1116 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 08-10973
Date de la décision : 18/02/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

ACTIONS POSSESSOIRES - Domaine d'application - Vente d'un immeuble dont le propriétaire a accordé la détention à un tiers - Action exercée par le détenteur contre l'ayant-cause acquéreur - Possibilité (non)

En vertu de l'article 2282 du code civil, la protection possessoire est accordée au détenteur contre toute autre que celui duquel il tient ses droits. Dès lors, en cas de vente d'un immeuble dont le propriétaire a conventionnellement accordé la détention à un tiers, le détenteur ne peut agir au possessoire contre l'ayant cause acquéreur, qui est devenu celui de qui il tient ses droits


Références :

article 2282 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 15 mai 2007

à rapprocher :3e Civ., 8 février 2006, pourvoi n° 04-20366, Bull. 2006, III, n° 24 (cassation), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 fév. 2009, pourvoi n°08-10973, Bull. civ. 2009, III, n° 38
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 38

Composition du Tribunal
Président : M. Peyrat (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Gariazzo (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Philippot
Avocat(s) : SCP Tiffreau, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.10973
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