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11/02/2009 | FRANCE | N°08-12486

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 février 2009, 08-12486


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, ci-après annexé :

Attendu, selon l'ordonnance confirmative attaquée (Toulouse, 19 septembre 2007), rendue par le premier président d'une cour d'appel, que le 10 septembre 2007, Mme X..., de nationalité nigériane, a été interpellée, dans le département des Pyrénées-Orientales, par les services de police ; qu'un arrêté de reconduite à la frontière et de placement en rétention lui ont été notifiés avec ses droits ; qu'en exécution de ces

décisions elle a été conduite au centre de rétention administrative de Toulouse ;...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, ci-après annexé :

Attendu, selon l'ordonnance confirmative attaquée (Toulouse, 19 septembre 2007), rendue par le premier président d'une cour d'appel, que le 10 septembre 2007, Mme X..., de nationalité nigériane, a été interpellée, dans le département des Pyrénées-Orientales, par les services de police ; qu'un arrêté de reconduite à la frontière et de placement en rétention lui ont été notifiés avec ses droits ; qu'en exécution de ces décisions elle a été conduite au centre de rétention administrative de Toulouse ; que le préfet a demandé la prolongation du maintien en rétention de l'intéressée ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'ordonnance d'avoir confirmé son maintien en rétention ;

Attendu que Mme X..., ayant été assistée d'un avocat lors des audiences devant le juge des libertés et de la détention et le premier président, le grief selon lequel, à l'occasion de la notification de ses droits, il lui aurait été donné un numéro de téléphone erroné concernant la permanence du barreau du tribunal de grande instance de Toulouse est inopérant ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat aux Conseils pour Mme X....

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté la demande de Madame X... et d'avoir confirmé son maintien dans les locaux du centre de rétention administrative ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE «le conseil de Madame Esther X... soutient qu'il aurait été porté à la connaissance de sa cliente, à l'occasion de la notification des droits reconnus par la loi et en ce qui concerne la permanence des avocats du barreau de Toulouse, un numéro de téléphone erroné… .S'agissant de la localisation téléphonique de l'ordre des avocats, il n'est pas établi que l'indication dénoncée, qui n'est pas exigée par aucune disposition légale ou règlementaire et dont l'inexactitude n'apparaît pas, ait empêché l'étranger d'exercer ses droits et porté atteinte, de quelque façon que ce soit à ses intérêts. Qu'en cet état, la procédure suivie … est en tous points régulière et aucune annulation n'est encourue» ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE «l'article L 551-2 du Ceseda dispose que l'étranger doit être avisé dans les meilleurs délais que pendant toute la période de rétention, il peut demander l'assistance d'un interprète, d'un conseil de même qu'il doit être informé par application de l'article L. 552-2 des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant. En l'espèce, l'ensemble des droits dont disposait la personne retenue lui a été notifié le 11 septembre 2007 à 7h35 par le truchement d'un interprète et le fait que le numéro de téléphone communiqué en ce qui concerne l'ordre des avocats soit celui de Perpignan et que le Tribunal Administratif mentionné soit celui de MONTPELLIER n'a eu aucune incidence sur l'effectivité de l'exercice de ses droits alors que lui était donné la faculté de contacter un avocat qui l'aurait conseillée. Il a lieu de rejeter les exceptions de nullité» ;

ALORS D'UNE PART QUE le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de grande instance de TOULOUSE avait constaté que le numéro de téléphone communiqué à l'exposante en ce qui concerne l'ordre des avocats était celui du barreau de PERPIGNAN et non pas celui de TOULOUSE, lieu du rétention de Madame X... ; qu'en se bornant dès lors à affirmer que l'inexactitude du numéro de téléphone n'apparaît pas, sans donner aucun motif de nature à justifier que le numéro de téléphone communiqué à Madame X... était exacte, le Premier Président de la Cour d'appel de TOULOUSE a entaché sa décision d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QU'il résulte de l'article L.552-2 du CESEDA que le juge doit s'assurer que l'étranger a été, au moment de la notification de la décision de placement, non seulement pleinement informé de ses droits mais placé en état de les faire valoir ; que selon les termes de l'article R.551-4 du même Code l'étranger doit, dès son arrivée au lieu de rétention, être mis en mesure de communiquer avec la permanence du barreau du tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouve le lieu de rétention ; qu'en l'espèce, l'exposante a été transférée dans un centre de rétention du ressort de la Cour d'appel de TOULOUSE ; que Madame X... faisait valoir qu'à l'occasion de la notification des droits reconnus par la loi, elle n'a pas été informée du numéro de téléphone de la permanence du barreau du Tribunal de grande instance de TOULOUSE et n'a donc pas été mise en mesure de communiquer avec un avocat de ce barreau dès son arrivée au lieu de rétention ; qu'en décidant cependant que la localisation téléphonique de l'ordre des avocats «n'est exigée par aucune disposition légale ou règlementaire» et que «le fait que le numéro de téléphone communiqué en ce qui concerne l'ordre des avocats soit celui de Perpignan … n'a eu aucune incidence sur l'effectivité de l'exercice de ses droits» (jugement page 2, § 1), la Cour d'appel a, par refus d'application, violé les articles L.552-2 et R.551-4 du CESEDA ainsi que l'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme ;

ALORS ENFIN QUE le juge doit s'assurer que l'étranger a été, au moment de la notification de la décision de placement en rétention, mis en mesure d'exercer effectivement les droits qui lui ont été reconnus ; qu'il résulte de l'article R.551-4 du CESEDA que «dès son arrivée au lieu de rétention, chaque étranger doit être mis en mesure de communiquer …avec la permanence du barreau du tribunal de grande instance dans le ressort duquel se trouve le lieu de rétention» ; que l'étranger qui n'est pas immédiatement mis en mesure de communiquer avec la permanence du barreau du tribunal dans le ressort duquel se trouve le lieu de rétention, n'est pas mis en mesure d'exercer ses droits dès la notification de la décision de placement en rétention ; que le fait de ne pas être mis en mesure d'exercer effectivement ses droits lui cause nécessairement un grief et l'étranger n'a donc aucunement à démontrer en outre l'existence d'un grief ou préjudice ; qu'en rejetant néanmoins la demande de l'exposante en énonçant qu'il «n'est pas établi que l'indication erronée ait … porté atteinte … à ses intérêts», la Cour d'appel a subordonné la demande à la preuve d'un grief et ajouté de ce fait une condition aux textes que ceux-ci ne prévoient aucunement, violant ainsi les articles L.552-2 et R.551-4 du CESEDA.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-12486
Date de la décision : 11/02/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Placement en rétention - Droits de l'étranger placé en rétention - Exercice - Effectivité - Assistance d'un avocat - Etendue - Limites - Détermination

Dès lors qu'un étranger placé puis maintenu en rétention administrative a été assisté par un avocat lors des audiences devant le juge des libertés et de la détention et le premier président, le grief selon lequel, à l'occasion de la notification de ses droits, il lui aurait été donné un numéro de téléphone erroné concernant la permanence du barreau du tribunal de grande instance, est inopérant


Références :

articles L. 552-2 et R. 551-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
articles L. 552-2 et R. 551-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 19 septembre 2007

Sur l'exercice des droits reconnus à l'étranger lors de son placement en rétention, à rapprocher :1re Civ., 09 juillet 2008, pourvoi n° 07-19539, Bull. 2008, I, n° 197 (cassation sans renvoi), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 fév. 2009, pourvoi n°08-12486, Bull. civ. 2009, I, n° 31
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, I, n° 31

Composition du Tribunal
Président : M. Bargue
Avocat général : M. Domingo
Rapporteur ?: M. Falcone
Avocat(s) : SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.12486
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