LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 751-1, alinéa 1, devenu les articles L. 7313-1 et L. 7311-3 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a, le 20 juin 2000, signé, avec la société Immobilier moderne, devenue la société Gestrim l'immobilier moderne, un contrat intitulé mandat indiqué non soumis aux dispositions des articles L.751-1 et suivants du code du travail mais à la loi relative aux agents commerciaux ; que M. X... ayant saisi la juridiction prud'homale en revendiquant la qualité de VRP exclusif, la cour d'appel, statuant sur contredit de compétence, a renvoyé l'affaire devant le tribunal de grande instance de Libourne ;
Attendu que pour statuer comme il a fait, l'arrêt, après avoir relevé que M. X... ne renversait pas, par la production d'attestations, la présomption légale prévue par l'article L. 120-3 du code du travail, retient que M. X..., qui selon certains témoins indiquait "qu'il était son propre patron" et avait installé à son domicile son nouveau matériel informatique, exerçait en pleine indépendance, ne fait pas la démonstration d'un lien de subordination, lequel n'est pas matérialisé par les dispositions du contrat de mandat ;
Qu'en se déterminant ainsi alors que l'absence de lien de subordination entre les parties n'est pas à elle seule exclusive du statut légal de VRP et qu'il lui appartenait de rechercher, comme il lui était demandé, si dans l'exercice effectif de son activité, M. X... remplissait les conditions pour bénéficier de ce statut, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Gestrim l'immobilier moderne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Gestrim l'immobilier moderne à payer à M. Henri X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils pour M. X...,
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté le contredit formé par M. X... à l'encontre du jugement du conseil des prud'hommes de Libourne du 16 mars 2007 et D'AVOIR renvoyé les parties devant le tribunal de grande instance de Libourne ;
AUX MOTIFS QUE des éléments contradictoirement débattus et des attestations qui en font partie, il est établi que M. X... exerçait son activité en toute indépendance par rapport aux autres agents de l'agence immobilière à laquelle il est lié par un contrat apparent de mandat formel écrit, certains témoins n'hésitant pas à affirmer que l'intéressé proférait haut et fort « qu'il était son propre patron », ; que certes, il utilisait les locaux de cette dernière en tant que de besoin (cet élément en tant que tel étant insuffisant à établir un lien de subordination), mais son bureau, selon certains témoins, était à son domicile où avait été installé « son nouveau matériel informatique » ; que M. X... ne peut arguer des dispositions de l'article 2 de son contrat de mandat selon lequel il doit « rendre compte » des opérations réalisées à l'agence selon son expression, pour en déduire un lien de subordination ; que cette règle est inhérente aux obligations d'un mandataire fidèle au sens de la règle générale de l'article 1993 du code civil et des dispositions de l'article L. 134-1 et suivants du code de commerce, qui lui imposent cette diligence particulière dans le cadre de son mandat d'agent commercial, et ne constitue donc pas la matérialisation d'un lien de subordination ; qu'enfin, l'immatriculation au registre du commerce en qualité d'agent commercial crée une présomption légale (article L. 120-3 du code du travail) d'exclusion de l'existence d'un contrat de travail entre les parties concernées qui n'est pas renversée par la démonstration d'un lien de subordination, lequel n'est pas établi par l'intéressé ;
ALORS, en premier lieu, QUE le lien de subordination, constitutif d'un contrat de travail, est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les éventuels manquements ; qu'en relevant, pour décliner la compétence du conseil des prud'hommes, que M. X... exerçait son activité en toute indépendance par rapport aux autres agents commerciaux de la société L'immobilier moderne, sans rechercher si cette dernière n'avait pas le pouvoir de lui donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de le sanctionner, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 511-1 du code du travail ;
ALORS, en deuxième lieu, QUE l'existence d'une relation de travail dépend des conditions dans lesquelles est exercée l'activité professionnelle, sans que le juge puisse s'arrêter à la dénomination que les parties en ont donnée ; qu'en relevant encore comme déterminant le fait que M. X... proclamait être son « propre patron » ou qu'il était lié à la société L'immobilier moderne par un contrat de mandat formel et écrit, sans rechercher dans quelles conditions l'intéressé exerçait son activité pour le compte de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 511-1 du code du travail ;
ALORS, en troisième lieu, QUE l'existence d'un lien de subordination est établie lorsque les circonstances de l'espèce font apparaître que l'agent commercial ne peut disposer d'une clientèle propre, doit se conformer aux directives précises de son mandant à qui il doit rendre régulièrement des comptes ; qu'en effet, ces circonstances font suffisamment apparaître l'existence d'une dépendance juridique ; qu'au soutien de son contredit, M. X... faisait valoir qu'il ne pouvait disposer d'aucune clientèle propre sans l'accord de la société L'immobilier moderne, qu'il avait l'obligation de se conformer aux instructions de celle-ci et de respecter ses conditions de vente et de tarif ainsi que de suivre sa politique commerciale ; qu'il ajoutait que sa rémunération avait été fixée unilatéralement par l'entreprise et que ses cartes de visites étaient établies au nom de cette dernière, sa qualité d'agent commercial n'apparaissant pas ; qu'en ne recherchant pas si ces circonstances ne révélaient pas l'existence d'un lien de subordination, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 511-1 du code du travail ;
ALORS, en quatrième lieu et en tout cas, QU'en se fondant uniquement, pour décliner la compétence du conseil de prud'hommes, sur la considération que M. X... n'établissait pas l'existence d'un lien de subordination, sans rechercher si l'intéressé ne remplissait pas les conditions pour bénéficier du statut légal, qu'il revendiquait, de voyageur représentant placier, dont le contentieux ressortit à la compétence de la juridiction prud'homale, même en l'absence de lien de subordination entre l'employeur et le représentant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 751-1 du code du travail.