La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2008 | FRANCE | N°07-42445

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 décembre 2008, 07-42445


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 19 mars 2007), que M. X... a été engagé par un premier contrat à durée indéterminée du 11 décembre 2003 à compter du 5 janvier 2004 par la société Slanac France en qualité de technicien commercial ; que ce contrat prévoyait une période d'essai de trois mois et une rémunération mensuelle de 2 500 euros pour les trois premiers mois, puis de 3 750 euros à partir du mois d'avril 2004 ; que, par lettre du 18 mars 2004, l'employeur a notifié au salarié la fin de son

contrat de travail ; que les parties ont signé les 29 et 31 mars 2004 un s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 19 mars 2007), que M. X... a été engagé par un premier contrat à durée indéterminée du 11 décembre 2003 à compter du 5 janvier 2004 par la société Slanac France en qualité de technicien commercial ; que ce contrat prévoyait une période d'essai de trois mois et une rémunération mensuelle de 2 500 euros pour les trois premiers mois, puis de 3 750 euros à partir du mois d'avril 2004 ; que, par lettre du 18 mars 2004, l'employeur a notifié au salarié la fin de son contrat de travail ; que les parties ont signé les 29 et 31 mars 2004 un second contrat de travail à durée indéterminée aux termes duquel M. X... était engagé avec la même qualification à compter du 8 avril 2004, sans période d'essai, moyennant une rémunération mensuelle de 3 125 euros et une commission de 2,5 % sur la différence entre le chiffre d'affaires hors taxe réalisé l'année écoulée et celui de l'année précédente ; que par lettre du 27 décembre 2005, la société Slanac France a notifié au salarié son licenciement pour motif économique ; que contestant le bien-fondé de cette mesure, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le premier moyen annexé au présent arrêt :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de la période d'essai du premier contrat de travail, alors, selon le moyen :
1°/ que l'employeur a la libre faculté, sauf abus, de mettre fin aux relations contractuelles au cours ou à l'issue de la période d'essai ; qu'en se bornant à dire que le contrat avait été rompu en raison du refus du salarié de voir modifier sa rémunération sans tenir aucun compte du fait que l'employeur ne pouvait assumer l'évolution du salaire de M. X... qui devait augmenter de 1 250 euros à l'issue du troisième mois de travail, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'abus, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 122-4 du code du travail ;
2°/ qu'en toute hypothèse, en allouant 10 000 euros de dommages-intérêts à M. X... au seul motif que cette somme ne paraissait pas excessive, la cour d'appel, qui n'a aucunement évalué le préjudice, a violé l'article 1147 du code civil ;
3°/ qu'elle s'est en outre ainsi prononcée par un motif dubitatif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que de l'aveu même de l'employeur, il avait rompu le contrat de travail au seul motif que M. X... refusait la diminution de sa rémunération contractuelle ; que la résiliation du contrat de travail intervenue au cours de la période d'essai étant sans rapport avec l'appréciation des qualités professionnelles du salarié, la cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur avait commis un abus dans l'exercice de son droit de résiliation ;
Et attendu ensuite, que la cour d'appel a apprécié souverainement le montant du préjudice dont elle a justifié l'existence par l'évaluation qu'elle en a faite, sans être tenue d'en préciser les divers éléments ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen annexé au présent arrêt :
Attendu que l'employeur fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné au paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif, alors, selon le moyen :
1°/ que les difficultés économiques s'apprécient au niveau de l'entreprise ou, lorsque celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité concerné du groupe auquel elle appartient ; qu'en se bornant à dire que «les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe, dont il n'est pas démontré que la situation soit durablement obérée», la cour d'appel, qui s'est prononcée au regard de la situation du groupe en son ensemble a violé l'article L. 321-1 du code du travail ;
2°/ qu'en se fondant sur le chiffre d'affaires du premier trimestre 2006, extrapolé pour le reste de l'année, quand le licenciement a été prononcé le 27 décembre 2005, au vu des résultats de 2004 et 2005, quand la cause du licenciement s'apprécie à la date où il est prononcé, et quand la cour d'appel a constaté que le chiffre d'affaires de l'année 2005 avait diminué de 28 % par rapport à l'année précédente, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard dudit article L. 321-1 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que l'employeur ait soutenu que les difficultés invoquées devaient être appréciées au niveau du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise ;
Et attendu que la cour d'appel, qui a constaté que l'employeur ne rapportait pas la preuve des difficultés économiques mentionnées dans la lettre de licenciement, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Slanac France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Slanac France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille huit.

MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour la société Slanac France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société SLANAC au paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive de la période d'essai.
AUX MOTIFS QUE si l'employeur n'a pas à justifier des raisons pour lesquelles il a mis fin au contrat de travail au cours de la période d'essai, il engage toutefois sa responsabilité s'il est établi que cette rupture est abusive ; que, de l'aveu même de l'intimée, elle a rompu le contrat de travail parce que Bernard X... refusait de voir diminuer sa rémunération par rapport à ce qui était prévu au contrat de travail ; que la circonstance qu'il a accepté par la suite de signer un contrat prévoyant un salaire inférieur à celui qui était prévu dans le contrat précédent n'implique nullement une renonciation à réclamer la réparation des conséquences dommageables d'un abus qui était caractérisé ; que la somme de 10.000 euros qu'il réclame à ce titre ne paraît pas excessive et sera allouée.
ALORS QUE l'employeur à la libre faculté, sauf abus, de mettre fin aux relations contractuelles au cours ou à l'issue de la période d'essai ; qu'en se bornant à dire que le contrat avait été rompu en raison du refus du salarié de voir modifier sa rémunération sans tenir aucun compte du fait que l'employeur ne pouvait assumer l'évolution du salaire de Monsieur Bernard X... qui devait augmenter de 1.250 à l'issue du troisième mois de travail, la Cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'abus, n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.122-4 du Code du travail.
ALORS en toute hypothèse QU'en allouant 10.000 de dommages-intérêts à Monsieur Bernard X... au seul motif que cette somme ne paraissait pas excessive, la Cour d'appel qui n'a aucunement évalué le préjudice, a violé l'article 1147 du Code civil.
QU'elle s'est en outre ainsi prononcée par un motif dubitatif en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société SLANAC au paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif.
AUX MOTIFS QUE, en ce qui concerne le licenciement, s'il est exact que la situation de l'entreprise s'est dégradée au cours de l'année 2005 puisque le chiffre d'affaires a baissé de 28% par rapport à l'année précédente, il n'en était pas de même du secteur d'activité confié à l'appelant puisque celui-ci a perçu au début de l'année 2006 une commission de 7.451 euros, ce qui démontre que son chiffre d'affaires a progressé en 2005 par rapport à 2004 ; qu'il n'est pas démontré que la diminution du chiffre d'affaires constatée en 2005 soit durable et que de fait il résulte des chiffres donnés par l'intimée elle-même qu'elle a réalisé un chiffre d'affaires de 405.254 euros au premier trimestre 2006, ce qui, rapporté à une année entière, représente une progression par rapport à l'année 2005 ; que d'autre part, la SARL SLANAC FRANCE a rappelé dans une circulaire adressée le 25 avril 2006 à ses clients qu'elle a le soutien total de la société espagnole dont elle est la filiale ; que les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe, dont il n'est pas démontré que la situation soit durablement obérée ; qu'en conséquence, le licenciement de Bernard X... doit être déclaré abusif ; que, compte tenu du niveau de rémunération, de l'ancienneté et de l'âge de l'appelant à la date du licenciement, il y a lieu de lui allouer une indemnité de 12.000 euros.
ALORS QUE les difficultés économiques s'apprécient au niveau de l'entreprise ou, lorsque celle-ci fait partie d'un groupe, au niveau du secteur d'activité concerné du groupe auquel elle appartient ; qu'en se bornant à dire que «les difficultés économiques doivent être appréciées au niveau du groupe, dont il n'est pas démontré que la situation soit durablement obérée», la Cour d'appel qui s'est prononcée au regard de la situation du groupe en son ensemble a violé l'article L.321-1 du Code du travail.
ALORS encore QU'en se fondant sur le chiffre d'affaires du 1er trimestre 2006, extrapolé pour le reste de l'année, quand le licenciement a été prononcé le 27 décembre 2005, au vu des résultats de 2004 et 2005, quand la cause du licenciement s'apprécie à la date où il est prononcé, et quand la Cour d'appel a constaté que le chiffre d'affaires de l'année 2005 avait diminué de 28% par rapport à l'année précédente, la Cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard dudit article L.321-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-42445
Date de la décision : 10/12/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Période d'essai - Rupture - Abus de droit de résiliation - Caractérisation

La période d'essai est destinée à permettre à l'employeur d'apprécier les qualités professionnelles du salarié. Dès lors commet un abus dans l'exercice de son droit de résiliation, l'employeur qui résilie le contrat de travail au cours de la période d'essai au motif que le salarié refuse la diminution de sa rémunération contractuelle


Références :

article L. 122-4 devenu L. 1231-1 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 19 mars 2007

Sur l'abus du droit de résilier le contrat de travail pendant la période d'essai à rapprocher :Soc., 6 décembre 1995, pourvoi n°92-41.398 , Bull. 1995, V, n° 330 (cassation) ;Soc., 5 mai 2004, pourvoi n° 02-41224, Bull. 2004, V, n° 123 (rejet) ;Soc., 20 novembre 2007, pourvoi n° 06-41212, Bull. 2007, V, n° 194 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 déc. 2008, pourvoi n°07-42445, Bull. civ. 2008, V, n° 246
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, V, n° 246

Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Allix
Rapporteur ?: Mme Sommé
Avocat(s) : SCP Ghestin, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.42445
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award