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04/12/2008 | FRANCE | N°07-17601

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 décembre 2008, 07-17601


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Aluminium Péchiney et le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Marseille ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 17 mai 2006 et 9 mai 2007), que Jean X..., salarié de la société Aluminium Péchiney du 17 janvier 1945 au 30 décembre 1985, est décédé le 21 mai 1995 des suites d'un adénocarcinom

e ; que Mme X... et leurs enfants communs ayant effectué courant février 2001 ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de ce qu'elle s'est désistée de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Aluminium Péchiney et le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de Marseille ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 17 mai 2006 et 9 mai 2007), que Jean X..., salarié de la société Aluminium Péchiney du 17 janvier 1945 au 30 décembre 1985, est décédé le 21 mai 1995 des suites d'un adénocarcinome ; que Mme X... et leurs enfants communs ayant effectué courant février 2001 une déclaration de maladie professionnelle, la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) a reconnu le caractère professionnel de cette affection et attribué une rente de conjoint survivant à Mme X... à compter du 20 mars 2001 ; que les consorts X... ont saisi le 2 avril 2002 la juridiction de sécurité sociale d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de l'employeur en sollicitant notamment, au titre de l'action successorale, le versement de l'indemnité complémentaire prévue à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Sur le premier moyen, dirigé contre l'arrêt rendu le 17 mai 2006 :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'ordonner une expertise médicale sur pièces pour dire si M. X... , décédé antérieurement à la demande de reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie formée par ses ayants droit, avait, de son vivant, été ou non atteint d'une incapacité permanente de 100 %, alors, selon le moyen :
1°/ que les contestations relatives à l'état ou au degré d'incapacité de la victime d'une maladie professionnelle relèvent de la compétence exclusive des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale ; qu'en ordonnant une expertise sur pièces aux fins de déterminer si M. X... était ou non atteint d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, la cour d'appel a violé les articles L. 141-1, L. 142-1 et L. 143-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que le juge qui ordonne une expertise judiciaire désigne l'expert qu'il commet pour y procéder ; qu'en ordonnant à la caisse de diligenter une expertise médicale sur pièces dans le cadre de l'article R. 142-24 du code de la sécurité sociale avec pour mission pour l'expert de dire si M. X..., décédé le 21 mars 1995, était atteint d'une incapacité permanente de 100 %, la cour d'appel qui a ainsi ordonné une expertise judiciaire sans désigner l'expert a violé l'article 265 du code de procédure civile ;
3°/ que l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale prévoit l'attribution à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur qui, en raison de son taux d'incapacité permanente, ne peut prétendre à la majoration de rente instituée par l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale d'une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation ; qu'en considérant que cette indemnité forfaitaire pouvait être attribuée aux ayants droit de la victime d'une maladie décédée avant qu'une demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de cette affection eût été formée, à la seule condition qu'elle présente une incapacité de 100 %, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
4°/ qu'il résulte de l'article 40 § III de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 que les droits aux prestations et indemnités prévues par le Livre IV du code de la sécurité sociale au profit des ayants droit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante rouverts en application de l'article 40 § II prennent effet à la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci ; qu'ayant constaté que la caisse n'avait pas eu à se prononcer sur le taux d'incapacité de M. X... puisque ses ayants droit ne s'étaient manifestés qu'en 2001 alors que M. X... était décédé en 1995, la cour d'appel qui a considéré que cette indemnité forfaitaire pouvait être attribuée aux ayants droit de la victime d'une maladie décédée avant qu'une demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie eut été formée à la seule condition qu'elle présente une incapacité de 100 % et qui a ordonné une expertise médicale sur pièces afin de déterminer si M. X... était ou non atteint d'un tel taux d'incapacité, a violé l'article L. 453-2 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 40 § III de la loi du 23 décembre 1998 ;
Mais attendu que l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, tel que modifié par l'article 49 de la loi n° 2001-1246 du 21 décembre 2001, dans sa rédaction alors applicable, rouvre les droits aux prestations, indemnités et majorations prévues par les dispositions du Livre IV du code de la sécurité sociale, y compris en cas de faute inexcusable de l'employeur, au profit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante ou provoquées par elles, et de leurs ayants droit, dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er juillet 1947 et l'entrée en vigueur de la loi, sans distinguer selon que la victime avait ou non fait constater sa maladie en temps utile ;
Attendu que les ayants droit de la victime d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur et décédée des suites de cette maladie sont recevables à exercer, outre l'action en réparation du préjudice moral qu'ils subissent personnellement du fait de ce décès, l'action en réparation du préjudice personnel de la victime résultant de sa maladie, lequel comprend l'ensemble des chefs de préjudices visés à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Que la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une contestation relative à l'état ou au degré d'incapacité ou d'invalidité de la victime d'une maladie professionnelle, mais d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de l'employeur, a pu ordonner une mesure d'expertise sur pièce pour déterminer si Jean X... remplissait, avant son décès, les conditions d'attribution de cette indemnité forfaitaire ;
Et attendu que la caisse, qui a demandé devant la cour d'appel que l'expertise soit écartée pour avoir été ordonnée en méconnaissance de la compétence d'attribution des juridictions de sécurité sociale n'est pas recevable à invoquer, s'agissant de la même mesure d'instruction, une méconnaissance de l'article 265 du code de procédure civile ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, dirigé contre l'arrêt rendu le 9 mai 2007 :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'allouer aux consorts X..., du chef de Jean X..., décédé, l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, alors, selon le moyen :
1°/ que les contestations relatives à l'état ou au degré d'incapacité de la victime d'une maladie professionnelle relèvent de la compétence exclusive des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale ; qu'en retenant, par homologation du rapport d'expertise, qu'on pouvait considérer que M. X... avait été atteint d'une incapacité permanente de 100 % à compter du 25 août 1993, la cour d'appel a statué sur l'état et le degré d'incapacité de la victime et a violé les articles L. 141-1, L. 142-1 et L. 143-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que les contestations d'ordre médical relatives à l'état du malade ou à la victime d'un accident du travail ne donnent pas lieu à la procédure d'expertise technique prévue par l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale en cas de contestation régie par l'article L. 143-1 du code de la sécurité sociale ; qu'en considérant que le litige dont elle était saisie portait sur l'attribution d'une prestation de sécurité sociale et faisait apparaître en cours d'instance une difficulté d'ordre médical relative à l'état de la victime l'autorisant à ordonner une expertise médicale aux fins de rechercher si M. X... était atteint d'une incapacité permanente de 100 % et de déterminer si les conditions d'attribution de ladite prestation étaient réunies, la cour d'appel a violé derechef les articles L. 141-1, L. 142-1 et L. 143-1 du code de la sécurité sociale ;
3°/ que l'expertise médicale technique prévue par l'article L. 141-1 du code de la sécurité sociale ne s'appliquant qu'à l'examen de la victime ou du malade, l'expertise médicale sur pièces ordonnée pour déterminer si la victime d'une maladie professionnelle avait été, avant son décès, atteinte d'une incapacité permanente de 100 % est une expertise judiciaire ; qu'en considérant que le litige dont elle était saisie portait sur l'attribution d'une prestation de sécurité sociale et faisait apparaître en cours d'instance une difficulté d'ordre médical relative à l'état de la victime l'autorisant à ordonner une expertise médicale aux fins de rechercher si M. X... était atteint d'une incapacité permanente de 100 % et de déterminer si les conditions d'attribution de ladite prestation étaient réunies, après avoir ordonné non une expertise technique mais une expertise judiciaire, la cour d'appel a violé derechef les articles L. 141-1, L. 142-1 et L. 143-1 du code de la sécurité sociale ;
4°/ que dans ses conclusions d'appel, la caisse avait fait valoir qu'il résultait de l'article 40-III de la loi du 23 décembre 1998 qu'aucune prestation, indemnité ou rente n'était due pour une période antérieure au dépôt de la demande et que les ayants droit de la victime d'une maladie professionnelle due à l'inhalation de poussières d'amiante décédée sans avoir demandé la reconnaissance du caractère professionnel de son affection, dont les droits avaient été rouverts par l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998 ne pouvaient prétendre au bénéfice de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale qui supposait que, de son vivant, la victime se soit vu attribuer un taux d'incapacité permanente de 100 % ; qu'en énonçant que les critiques de la caisse visaient uniquement la compétence de la cour d'appel à recourir à une mesure d'expertise, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
5°/ que l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale prévoit l'attribution aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur qui, en raison de leur taux d'incapacité permanente, ne peuvent prétendre à la majoration de rente instituée par l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, d'une allocation forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation ; qu'en allouant cette indemnité forfaitaire aux ayants droit de la victime d'une maladie décédée avant qu'une demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie eut été formée, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
6°/ qu'il résulte de l'article 40 § III de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 que les droits aux prestations et indemnités prévues par le Livre IV du code de la sécurité sociale au profit des ayants droit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante rouverts en application de l'article 40 § II prennent effet à la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci ; que la cour d'appel qui a homologué le rapport d'expertise ayant conclu qu'on pouvait considérer que M. X... était atteint d'une incapacité permanente de 100 % à compter du 25 août 1993 et qui a alloué aux consorts X... l'allocation forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, a violé ce texte ensemble l'article 40 § III de la loi du 23 décembre 1998 ;
Mais attendu que l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, tel que modifié par l'article 49 de la loi n° 2001-1246 du 21 décembre 2001, dans sa rédaction alors applicable, rouvre les droits aux prestations, indemnités et majorations prévues par les dispositions du Livre IV du code de la sécurité sociale, y compris en cas de faute inexcusable de l'employeur, au profit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante ou provoquées par elles, et de leurs ayants droit, dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er juillet 1947 et l'entrée en vigueur de la loi, sans distinguer selon que la victime avait ou non fait constater sa maladie en temps utile ;
Et attendu que les ayants droit de la victime d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur et décédée des suites de cette maladie sont recevables à exercer, outre l'action en réparation du préjudice moral qu'ils subissent personnellement du fait de ce décès, l'action en réparation du préjudice personnel de la victime résultant de sa maladie, lequel comprend l'ensemble des chefs de préjudices visés à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Que la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une contestation relative à l'état ou au degré d'incapacité ou d'invalidité de la victime d'une maladie professionnelle, mais d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de l'employeur, ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, et notamment des conclusions de l'expertise qu'elle avait ordonnée, que Jean X... avait présenté un taux d'incapacité permanente de 100 % à compter du 25 août 1993, a pu en déduire, sans encourir aucun des griefs du moyen, que ses ayants droits pouvaient prétendre à l'allocation forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône à payer aux consorts X... la somme de 2 500 euros et au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante la somme de 800 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Boutet, avocat aux Conseils pour la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches du Rhône.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(dirigé contre l'arrêt du 17 mai 2006)
Le moyen reproche à la Cour d'Appel d'avoir ordonné à la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE (CPCAM) des BOUCHES DU RHONE de diligenter une expertise médicale sur pièces dans le cadre de l'article R 142-24 du Code de la Sécurité Sociale pour dire si Monsieur X..., décédé antérieurement à la demande de reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie formée par ses ayants droit, avait, de son vivant, été ou non atteint d'une incapacité permanente de 100 % ;
AUX MOTIFS QUE la CPCAM des BOUCHES DU RHONE demandait le remboursement de l'indemnité forfaitaire de 14.844,65 qu'elle avait versée aux consorts X... au titre de l'exécution provisoire au motif que Monsieur X... n'avait jamais été atteint d'un taux d'incapacité de 100 % et n'avait d'ailleurs jamais perçu de rente accident avant son décès survenu le 21 mars 1995 ; qu'il ressortait des dispositions de l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale que l'indemnité forfaitaire qu'il prévoyait n'était pas subordonnée à la perception d'une rente mais seulement au fait d'être atteint d'une incapacité permanente de 100 % ; que la CPCAM des BOUCHES DU RHONE n'avait pas eu à se prononcer sur le taux d'incapacité de Monsieur X... puisque les ayants droit de ce dernier ne s'étaient manifestés auprès de la caisse qu'en 2001 alors que Monsieur X... était décédé en 1995 ; que le fait qu'il soit décédé d'un adénocarcinome ne suffisait à caractériser l'existence d'une incapacité de 100 % en l'absence d'un avis médical autorisé ; que selon l'article R 142-24 du Code de la Sécurité Sociale "Lorsque le différend fait apparaître en cours d'instance une difficulté d'ordre médical relative à l'état du malade ou de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, notamment à la date de la consolidation ou de la guérison, le tribunal ne peut statuer qu'après mise en oeuvre de la procédure d'expertise médicale prévue à l'article L. 141-1. Dans ce cas, la mission est confiée à l'expert ou au comité et les questions qui lui sont posées sont fixées par une décision du tribunal" ; qu'il convenait d'ordonner à la caisse primaire d'assurance maladie de diligenter une expertise médicale sur pièces avec mission pour l'expert de dire si Monsieur X... était ou non atteint d'un taux d'incapacité permanente de 100 % ;
ALORS D'UNE PART QUE les contestations relatives à l'état ou au degré d'incapacité de la victime d'une maladie professionnelle relèvent de la compétence exclusive des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale ; qu'en ordonnant une expertise sur pièces aux fins de déterminer si Monsieur X... était ou non atteint d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, la Cour d'Appel a violé les articles L 141-1, L 142-1 et L 143-1 du Code de la Sécurité Sociale ;
ALORS D'AUTRE PART QUE le juge qui ordonne une expertise judiciaire désigne l'expert qu'il commet pour y procéder ; qu'en ordonnant à la CPCAM des BOUCHES DU RHONE de diligenter une expertise médicale sur pièces dans le cadre de l'article R 142-24 du Code de la Sécurité Sociale avec pour mission pour l'expert de dire si Monsieur X..., décédé le 21 mars 1995, était atteint d'une incapacité permanente de 100 %, la Cour d'Appel qui a ainsi ordonné une expertise judiciaire sans désigner l'expert a violé l'article 265 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
ALORS ENCORE QUE l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale prévoit l'attribution à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur qui, en raison de son taux d'incapacité permanente, ne peut prétendre à la majoration de rente instituée par l'article L 452-2 du Code de la Sécurité Sociale d'une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation ; qu'en considérant que cette indemnité forfaitaire pouvait être attribuée aux ayants droit de la victime d'une maladie décédée avant qu'une demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de cette affection eût été formée, à la seule condition qu'elle présente une incapacité de 100 %, la Cour d'Appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
ALORS ENFIN QU' il résulte de l'article 40 § III de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 que les droits aux prestations et indemnités prévues par le Livre IV du Code de la Sécurité Sociale au profit des ayants droit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante rouverts en application de l'article 40 § II prennent effet à la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci ; qu'ayant constaté que la CPCAM des BOUCHES DU RHONE n'avait pas eu à se prononcer sur le taux d'incapacité de Monsieur X... puisque ses ayants droit ne s'étaient manifestés qu'en 2001 alors que Monsieur X... était décédé en 1995, la Cour d'Appel qui a considéré que cette indemnité forfaitaire pouvait être attribuée aux ayants droit de la victime d'une maladie décédée avant qu'une demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie eut été formée à la seule condition qu'elle présente une incapacité de 100 % et qui a ordonné une expertise médicale sur pièces afin de déterminer si Monsieur X... était ou non atteint d'un tel taux d'incapacité, a violé l'article L 453-2 du Code de la Sécurité Sociale, ensemble l'article 40 § III de la loi du 23 décembre 1998.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(dirigé à titre subsidiaire contre l'arrêt du 9 mai 2007)
Le moyen reproche à la Cour d'Appel d'avoir homologué le rapport d'expertise du Professeur Y... du 3 janvier 2007, d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce que le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale avait alloué aux consorts X... l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale du chef de Monsieur Jeannot X..., décédé en 1995, et d'avoir débouté la CAISSE PRIMAIRE CENTRALE D'ASSURANCE MALADIE (CPCAM) des BOUCHES DU RHONE de sa demande tendant au remboursement de la somme versée à ce titre dans le cadre de l'exécution provisoire dudit jugement ;
AUX MOTIFS QUE la CPCAM des BOUCHES DU RHONE faisait valoir que selon l'article L 143-1 du Code de la Sécurité Sociale, les contestations relatives à l'état d'inaptitude au travail, à l'état et au degré d'incapacité des victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles relevaient de la compétence des juridictions du contentieux technique qu'étaient les Tribunaux du Contentieux de l'Incapacité et la Cour Nationale de l'Incapacité et de la Tarification de l'Assurance des Accidents du Travail ; que l'article L. 142-1 du Code de la Sécurité Sociale disposait que l'organisation du contentieux général connaissait des différends auxquels donnait lieu l'application de la législation de la sécurité sociale ne relevant pas, par leur nature, d'un autre contentieux ; qu'enfin, l'article L 141-1 du Code de la Sécurité Sociale disposait que les contestations d'ordre médical relatives à l'état du malade ou de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle relevait de la procédure d'expertise technique à l'exclusion des contestations régies par l'article L. 143-1 ; qu'il ressortait de la combinaison de ces textes que la Cour d'Appel ne pouvait ni se prononcer sur l'état et le taux d'incapacité de Monsieur X..., ni ordonner une expertise technique pour fixer ce taux ; mais que la Cour d'Appel n'étant pas saisie d'une contestation relative à l'état et au degré d'invalidité de Monsieur X... mais d'une demande de versement d'une prestation de sécurité sociale, en l'occurrence l'allocation forfaitaire visée à l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale, et le différend en cours faisant apparaître une difficulté d'ordre médical relative à l'état ou au degré d'invalidité de Monsieur X..., elle avait la possibilité d'ordonner une expertise médicale aux fins de déterminer si les conditions d'attribution de ladite allocation forfaitaire étaient bien réunies ; que le Professeur Y... avait constaté que Monsieur X... était décédé d'un adénocarcinome pleuropulmonaire droit dont le diagnostic avait été réalisé le 10 septembre 1993 à la suite d'une pleurésie apparue le 15 août 1993 ; que ce cancer avait ensuite évolué avec métastase généralisée ; que l'expert avait conclu : "On peut donc considérer que Monsieur Jean X... était bien atteint d'une incapacité permanente de 100 % à dater du 25 août 1993." ; que le rapport était régulier en la forme, ses conclusions claires et exemptes d'ambiguïté ; que la caisse primaire d'assurance maladie ne faisait état d'aucun élément de nature à remettre en cause l'avis de l'expert, ses critiques - auxquelles il avait été répondu - visant uniquement la compétence de la Cour à recourir à une mesure d'expertise ; qu'il convenait dès lors d'homologuer le rapport du Professeur Y... et de dire que Monsieur X... était bien atteint d'un taux d'incapacité permanente partielle de 100 % depuis le 25 août 1993 ; qu'à bon droit le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale avait alloué aux consorts X... l'allocation forfaitaire visée à l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale ; que le jugement serait confirmé sur ce point et la demande de remboursement de l'allocation forfaitaire formulée par la CPCAM des BOUCHES DU RHONE serait rejetée ;
ALORS DE PREMIERE PART QUE les contestations relatives à l'état ou au degré d'incapacité de la victime d'une maladie professionnelle relèvent de la compétence exclusive des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale ; qu'en retenant, par homologation du rapport d'expertise, qu'on pouvait considérer que Monsieur X... avait été atteint d'une incapacité permanente de 100 % à compter du 25 août 1993, la Cour d'Appel a statué sur l'état et le degré d'incapacité de la victime et a violé les articles L 141-1, L 142-1 et L 143-1 du Code de la Sécurité Sociale ;
ALORS DE DEUXIEME PART QUE les contestations d'ordre médical relatives à l'état du malade ou à la victime d'un accident du travail ne donnent pas lieu à la procédure d'expertise technique prévue par l'article L. 141-1 du Code de la Sécurité Sociale en cas de contestation régie par l'article L 143-1 du Code de la Sécurité Sociale ; qu'en considérant que le litige dont elle était saisie portait sur l'attribution d'une prestation de sécurité sociale et faisait apparaître en cours d'instance une difficulté d'ordre médical relative à l'état de la victime l'autorisant à ordonner une expertise médicale aux fins de rechercher si Monsieur X... était atteint d'une incapacité permanente de 100 % et de déterminer si les conditions d'attribution de ladite prestation étaient réunies, la Cour d'appel a violé derechef les articles L 141-1, L 142-1 et L 143-1 du Code de la Sécurité Sociale ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE l'expertise médicale technique prévue par l'article L 141-1 du Code de la Sécurité Sociale ne s'appliquant qu'à l'examen de la victime ou du malade, l'expertise médicale sur pièces ordonnée pour déterminer si la victime d'une maladie professionnelle avait été, avant son décès, atteinte d'une incapacité permanente de 100 % est une expertise judiciaire ; qu'en considérant que le litige dont elle était saisie portait sur l'attribution d'une prestation de sécurité sociale et faisait apparaître en cours d'instance une difficulté d'ordre médical relative à l'état de la victime l'autorisant à ordonner une expertise médicale aux fins de rechercher si Monsieur X... était atteint d'une incapacité permanente de 100 % et de déterminer si les conditions d'attribution de ladite prestation étaient réunies, après avoir ordonné non une expertise technique mais une expertise judiciaire, la Cour d'Appel a violé derechef les articles L 141-1, L 142-1 et L 143-1 du Code de la Sécurité Sociale ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE dans ses conclusions d'appel, la CPCAM des BOUCHES DU RHONE avait fait valoir qu'il résultait de l'article 40 - III de la loi du 23 décembre 1998 qu'aucune prestation, indemnité ou rente n'était due pour une période antérieure au dépôt de la demande et que les ayants droit de la victime d'une maladie professionnelle due à l'inhalation de poussières d'amiante décédée sans avoir demandé la reconnaissance du caractère professionnel de son affection, dont les droits avaient été rouverts par l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998 ne pouvaient prétendre au bénéfice de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale qui supposait que, de son vivant, la victime se soit vu attribuer un taux d'incapacité permanente de 100 % ; qu'en énonçant que les critiques de la CPCAM des BOUCHES DU RHONE visaient uniquement la compétence de la Cour d'Appel à recourir à une mesure d'expertise, la Cour d'Appel a violé l'article 4 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
ALORS DE CINQUIEME PART QUE l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale prévoit l'attribution aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur qui, en raison de leur taux d'incapacité permanente, ne peuvent prétendre à la majoration de rente instituée par l'article L 452-2 du Code de la Sécurité Sociale, d'une allocation forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation ; qu'en allouant cette indemnité forfaitaire aux ayants droit de la victime d'une maladie décédée avant qu'une demande tendant à la reconnaissance du caractère professionnel de cette maladie eut été formé, la Cour d'Appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
ALORS DE SIXIEME PART QU' il résulte de l'article 40 § III de loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 que les droits aux prestations et indemnités prévues par le Livre IV du Code de la Sécurité Sociale au profit des ayants droit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante rouverts en application de l'article 40 § II prennent effet à la date du dépôt de la demande sans que les prestations, indemnités et rentes puissent avoir un effet antérieur au dépôt de celle-ci ; que la Cour d'Appel qui a homologué le rapport d'expertise ayant conclu qu'on pouvait considérer que Monsieur X... était atteint d'une incapacité permanente de 100 % à compter du 25 août 1993 et qui a alloué aux consorts X... l'allocation forfaitaire prévue par l'article L 452-3 du Code de la Sécurité Sociale, a violé ce texte ensemble l'article 40 § III de la loi du 23 décembre 1998.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 07-17601
Date de la décision : 04/12/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Procédure - Action des ayants droit - Action en réparation du préjudice personnel - Réparation du préjudice personnel de la victime décédée suite à l'inhalation de poussières d'amiante ou provoquées par elles - Domaine d'application - Ensemble des chefs de préjudice visés à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale incluant l'indemnité forfaitaire prévue pour la victime atteinte d'une incapacité permanente de 100 %

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Maladies professionnelles - Dispositions générales - Prestations - Demande - Prescription - Dérogation - Réouverture des droits au profit de la victime ou de ses ayants droit - Conditions - Demande en reconnaissance du caractère professionnel de la maladie formée avant le décès de la victime - Absence d'influence

L'article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 modifié, a rouvert les droits aux prestations, indemnités et majorations prévues par les dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale, y compris en cas de faute inexcusable de l'employeur, au profit des victimes d'affections professionnelles consécutives à l'inhalation de poussières d'amiante ou provoquées par elles, et de leurs ayants droit, dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er juillet 1947 et l'entrée en vigueur de la loi, sans distinguer selon que la victime avait ou non fait constater sa maladie en temps utile. Les ayants droit de la victime d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de l'employeur et décédée des suites de cette maladie sont recevables à exercer, outre l'action en réparation du préjudice moral qu'ils subissent personnellement du fait de ce décès, l'action en réparation du préjudice personnel de la victime résultant de sa maladie, lequel comprend l'ensemble des chefs de préjudice visés à l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, et notamment l'indemnité forfaitaire prévue lorsque la victime était atteinte d'une incapacité permanente de 100 %. Dès lors, une cour d'appel, qui était saisie d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de l'employeur par les ayants droit d'un salarié décédé avant d'avoir sollicité la reconnaissance du caractère professionnel de sa maladie et dont les droits avaient été rouverts en application de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998 précitée, ayant relevé, par une appréciation souveraine des éléments de preuve, et notamment des conclusions de l'expertise ordonnée, que le salarié décédé avait présenté un taux d'incapacité permanente de 100 % à compter d'une certaine date, a pu en déduire que ses ayants droit pouvaient prétendre à l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale


Références :

article 40 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 modifié par l'article 49 de la loi n° 2001-1246 du 21 décembre 2001

article L. 452-3 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 17 mai 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 déc. 2008, pourvoi n°07-17601, Bull. civ. 2008, II, n° 258
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, II, n° 258

Composition du Tribunal
Président : M. Gillet
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: Mme Coutou
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Boutet, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.17601
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