LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 23 septembre 2005), que par arrêté du 14 mars 2001, le préfet des Deux-Sèvres a institué, en application des dispositions de l'article L. 515-8 du code de l'environnement, des servitudes d'utilité publique sur le territoire de deux communes, autour des installations de fabrication et de stockage de produits explosifs dont l'implantation était projetée par la société Titanite SA ; que ces servitudes portent sur cinq zones dénommées Z1 à Z5 selon les risques encourus par les personnes et les biens, dans lesquelles les contraintes d'urbanisme varient ; que par courriers du 29 mai et 10 juin 2003, M. X..., dont l'exploitation agricole est située en zone de danger Z4 et Z5, a demandé à la société Titanite, une indemnisation pour le préjudice subi, puis celle-ci ayant refusé, a saisi le 29 mars 2004 le juge de l'expropriation pour voir fixer cette indemnisation sollicitée au titre de l'article L. 515-11 du code de l'environnement ;
Sur le moyen unique :
Attendu que la société Titanite fait grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme l'indemnité due par elle en application de l'article L. 515-11 du code de l'environnement, alors, selon le moyen, qu'il résulte des articles L. 515-8 et L. 515-11 du code de l'environnement que les préjudices, dont il peut être demandé réparation en cas d'institution de servitudes d'activité publique assortissant l'autorisation d'une installation classée présentant des risques, sont exclusivement ceux causés par l'institution des servitudes et non par la présence du bâtiment et les nuisances qu'il peut provoquer ; qu'ainsi la cour d'appel, en allouant à M. X... une indemnité en réparation du préjudice causé non par les restrictions à la circulation ou aux possibilités de construction ou d'exploitation qui assortissent les servitudes instituées dans les zones de danger Z4 et Z5 par l'arrêté du 14 mars 2001 mais par la perte de valeur vénale de son immeuble à raison des risques que faisait courir aux personnes ou aux biens l'exploitation de l'installation de la société Titanite, a violé les textes précités ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'institution de zones de danger Z4 (possibilités de blessures aux personnes, dégâts légers aux biens) et Z5 (très faible possibilité de blessures légères aux personnes, dégâts très légers aux biens), applicables aux biens en cause entraînait un préjudice direct, matériel et certain subi par M. X..., consistant en une diminution de la valeur vénale par rapport à un bien non situé dans une zone de danger, la cour d'appel en a exactement déduit que ce préjudice ouvrait droit à une indemnité au profit de M. X... en vertu de l'article L. 515-11 du code de l'environnement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Titanite aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Titanite ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du trois décembre deux mille huit, par M. Cachelot, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Bachellier et Potier de La Varde, avocat aux Conseils pour la société Titanite.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir fixé à 15 000 euros l'indemnité due par la société Titanite en application de l'article L 515-11 du code de l'environnement ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le préjudice doit être estimé à la date de la décision de première instance (15 juin 2004) ce qui n'interdit pas, pour apprécier le préjudice à cette date, de prendre en compte des éléments postérieurs dont la vente de la propriété par M. et Mme X... selon acte notarié du 30 septembre 2004 moyennant le prix principal de 207 000 euros ; des installations agricoles ou des locaux habités sont autorisés dans les zones de danger Z4 et Z5, zones à l'intérieur desquelles est située la propriété litigieuse ; l'institution de zones de danger Z4 (possibilités de blessures aux personnes, dégâts légers aux biens) et Z5 (très faible possibilité de blessures légères aux personnes, dégâts très légers aux biens), applicables aux biens en cause entraîne un préjudice direct, matériel et certain subi par M. X..., consistant en une diminution de la valeur vénale par rapport à un bien non situé dans une zone de danger et qui ouvre droit à une indemnité au profit de M. X... en vertu de l'article L 515-11 du code de l'environnement, étant de surcroît par ailleurs constaté que le commissaire enquêteur a émis le 30 octobre 2000 un avis favorable sous réserve que les demandes d'indemnisations des propriétaires fonciers en Z4 et Z5 soient rapidement prises en compte et traitées dès le début de l'exploitation ; compte tenu des difficultés rencontrées par M. X... pour vendre son bien justifiées par les compromis de vente qui n'ont pas abouti mais aussi de la vente réalisée en septembre 2004 pour 207 000 euros, il apparaît que l'indemnité revenant à M. X... doit être fixée à 15 000 euros ; et adoptés QU'il apparaît aux débats que la valeur vénale de l'exploitation agricole de Monsieur X... a diminué depuis l'institution des servitudes et a entraîné un préjudice, direct, matériel et certain ouvrant droit à une indemnité au profit de Monsieur X... et ce, au sens de l'article L 515-11 du code de l'environnement ; que compte tenu de ces éléments, du fait qu'il résulte du transport sur les lieux et notamment de la visite des bâtiments de l'exploitation, qu'une partie des immeubles de la société Titanite est visible tant des parcelles de terre que de l'étage du bâtiment d'habitation, que la valeur de l'exploitation agricole au vu des différents documents d'agents immobiliers peut être fixée à 210 000 euros sans tenir compte de la proximité de la société Titanite que Monsieur Christian X... a eu une offre d'achat au prix maximal de 198 000 euros, qu'il a en outre subi un préjudice financier du fait qu'il n'a pu concrétiser son projet de cession depuis près de 3 ans, convient-il de fixer l'indemnité due par la société Titanite à la somme de 15 000 euros ;
ALORS QU'il résulte des articles L 515-8 et L 515-11 du code de l'environnement que les préjudices, dont il peut être demandé réparation en cas d'institution de servitudes d'activité publique assortissant l'autorisation d'une installation classée présentant des risques, sont exclusivement ceux causés par l'institution des servitudes et non par la présence du bâtiment et les nuisances qu'il peut provoquer ; qu'ainsi la cour d'appel, en allouant à M. X... une indemnité en réparation du préjudice causé non par les restrictions à la circulation ou aux possibilités de construction ou d'exploitation qui assortissent les servitudes instituées dans les zones de danger Z4 et Z5 par l'arrêté du 14 mars 2001 mais par la perte de valeur vénale de son immeuble à raison des risques que faisait courir aux personnes ou aux biens l'exploitation de l'installation de la société Titanite, a violé les textes précités.