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09/07/2008 | FRANCE | N°06-44240

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 juillet 2008, 06-44240


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été embauché le 1er octobre 1972 par la société Cluizel en qualité de VRP ; qu'en septembre 1977, la société Cluizel a confié la commercialisation de ses produits à la société Générale de distribution de marques (GDM) et le contrat de travail a été transféré à cette société, devenue ensuite la société Espace gourmet ; que le salarié a été en arrêt de travail pour maladie du 10 mars au 18 octobre 1999, puis a bénéficié d'un mi-temps thérapeutiq

ue, suspendu par un arrêt maladie du 18 février au 1er mai 2000 ; que, le 8 décembre 20...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été embauché le 1er octobre 1972 par la société Cluizel en qualité de VRP ; qu'en septembre 1977, la société Cluizel a confié la commercialisation de ses produits à la société Générale de distribution de marques (GDM) et le contrat de travail a été transféré à cette société, devenue ensuite la société Espace gourmet ; que le salarié a été en arrêt de travail pour maladie du 10 mars au 18 octobre 1999, puis a bénéficié d'un mi-temps thérapeutique, suspendu par un arrêt maladie du 18 février au 1er mai 2000 ; que, le 8 décembre 2000, M. X... a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement de rappels de commissions ; qu'à compter du 2 janvier 2001, il a été à nouveau placé en arrêt pour maladie ; qu'à l'issue de deux visites médicales de reprise, il a été déclaré, le 23 avril 2001, " inapte au poste de représentant dans les conditions actuelles dans la société Espace gourmet " ; qu'il a été licencié le 7 juin 2001 ; que le licenciement a été déclaré sans cause réelle et sérieuse pour manquement de l'employeur à son obligation de reclassement ; qu'après diverses instances judiciaires, il a formé un pourvoi contre l'arrêt du 30 mai 2006 ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal formé par M. X..., pris en ses six premières branches :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt d'avoir limité la condamnation de l'employeur à certaines sommes à titre de rappel de commissions et congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, de solde d'indemnité de licenciement et du salaire d'inactivité prévu à l'article L. 122-24-4 devenu les articles L. 1226-2 à L. 1226-4 du code du travail, alors, selon le moyen :
1° / qu'un établissement secondaire ne peut constituer une succursale que s'il est dirigé par un salarié de la société habilité à traiter avec les tiers ; qu'en affirmant que la société Debauve et Gallais, comportant un établissement principal et deux établissements secondaires, constituait une maison à succursales multiples, sans constater que les établissements secondaires étaient dirigés par un salarié habilité à traiter avec les tiers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
2° / qu'en tout état de cause, le jugement dont le salarié s'était expressément approprié les motifs sur ce point, avait relevé que la livraison et la facturation étaient effectuées de façon séparée pour chacun des trois magasins Debauve et Gallais et avait pour cette raison conclu que la société Debauve et Gallais ne constituait pas une maison à succursales multiples ; qu'en retenant au contraire que la société Debauve et Gallais était une maison à succursales multiples, sans s'expliquer sur l'existence de livraisons et facturations séparées, quand par ailleurs elle retenait, s'agissant des magasins du groupe Flo, que la livraison groupée au siège établissait qu'il s'agissait d'une maison à succursales multiples, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3° / que les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, s'agissant des magasins du groupe Flo, le salarié faisait valoir que l'employeur avait admis le principe d'un commissionnement réduit dans des hypothèses similaires, tant à son bénéfice qu'au profit d'un autre VRP de l'entreprise ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef de conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4° / que les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, le salarié soulignait qu'il lui était dû au titre du client Y..., d'une part, un complément de commission de 311, 30 euros pour les affaires sur lesquelles il avait été commissionné à hauteur de 4 % au lieu de 10 % et, d'autre part, une commission de 10 % sur le chiffre d'affaires réalisé du 1er septembre 1998 au 9 mars 1999, soit 420, 45 euros ; qu'en limitant la condamnation de l'employeur au titre du client Y... à la somme de 311,30 euros, sans répondre aux conclusions du salarié, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5° / que le salarié faisait valoir que le montant des commissions dues au titre du client Z..., au vu des vérifications de l'expert, était de 2 744,08 euros ; qu'en limitant la condamnation de l'employeur au titre du client Z... à la somme de 2 242,22 euros, sans donner aucun motif à sa décision, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6° / que lorsque le contrat de travail du VRP ne prévoit pas que le remboursement des frais professionnels exposés est englobé dans sa rémunération, seuls les frais effectivement remboursés au salarié peuvent être déduits des sommes prises en compte pour calculer le montant des indemnités de licenciement et de préavis et du salaire dû en application de l'article 122-24-4 du code du travail ; que la cour d'appel, qui a opéré sur ces sommes " un abattement usuel pour prendre en compte les frais professionnels ", sans constater que le contrat de travail du VRP prévoyait que le remboursement des frais professionnels exposés était englobé dans sa rémunération, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a relevé que la présidente de la société Debauve et Gallais était seule décisionnaire des trois magasins qu'elle gérait en direct ; qu'elle a pu en déduire qu'il s'agissait d'un magasin à succursales multiples ;
Et attendu, ensuite, que c'est au vu des éléments de fait et de preuve versés aux débats que la cour d'appel, répondant aux conclusions, a décidé que la société Flo était une entreprise à succursales multiples contractuellement exclue du commissionnement de M. X... et qu'elle a fixé les commissions dues pour les clients Y... et Z... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société Espace gourmet :
Attendu que l'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1° / qu'aux termes de l'article 3 du contrat de travail du salarié, le droit à la commission n'est acquis que sur les affaires menées à bonne fin c'est- à- dire sur les ordres dûment acceptés et livrés par l'employeur, au fur et à mesure des encaissements et au prorata de ceux- ci ; que s'agissant du client Y..., la cour d'appel a relevé qu'il résultait notamment du rapport d'expertise que le salarié ne s'était jamais déplacé chez ce client qui avait imposé qu'il ne soit pas démarché par les commerciaux de la société Espace gourmet, et que l'employeur s'était borné à lui accorder à titre de compensation un commissionnement de 4 % ; qu'il s'évinçait de ces énonciations que le salarié, qui avait été indemnisé par l'employeur, n'avait pas droit à une commission normale de 10 % sur le chiffre d'affaires du client Y... dans la mesure où il n'avait mené aucune affaire à bonne fin avec ce client ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil ;
2° / qu'en octroyant au salarié un rappel de commissions et de congés payés afférents au titre du client Y... sans rechercher, ainsi que l'y invitait pourtant l'employeur dans ses conclusions d'appel, si cette entreprise était une société à succursales multiples, contractuellement exclue de l'assiette des commissions à verser au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3° / que l'article 2 du contrat de travail du salarié exclut la représentation et donc le droit à commissions pour les maisons d'alimentation à succursales multiples ; qu'en octroyant au salarié un rappel de commissions au titre du client Z..., sans vérifier, ainsi que l'y invitait l'employeur dans ses conclusions d'appel, si la gestion des commandes, livraisons et factures était centralisée auprès de l'établissement principal de l'entreprise Z..., de telle sorte qu'elle constituait une société à succursales multiples, la cour d'appel n'a à nouveau pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du code civil ;
4° / que la cassation à intervenir sur les trois premières branches du moyen entraînera l'annulation de l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société Espace gourmet à verser à M. X... des sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité de licenciement et au titre de l'article L. 122-24-4 du code du travail en application des dispositions de l'article 625 du code de procédure civile ;
5° / qu'en matière de congés payés, le montant de l'indemnité due est calculé à partir des commissions versées après application d'un abattement de 30 % ; que la cour d'appel, en condamnant la société Espace gourmet à verser à M. X... 10 % des commissions au titre des congés payés afférents sans opérer au préalable un abattement de 30 %, a violé les articles 1134 du code civil et R. 751-1 du code du travail ;
6° / qu'enfin, lorsque le salarié a travaillé dans le cadre d'un mi- temps thérapeutique, le calcul des indemnités de rupture du contrat de travail se fait sur la base du salaire perçu dans le cadre de ce mi- temps thérapeutique ; qu'en condamnant la société Espace gourmet à verser au salarié des indemnités de préavis, de licenciement et sur le fondement de l'article L. 122-24-4 du code du travail sur la base d'un salaire à temps complet, lors même qu'elle constatait que durant la période considérée, M. X... était en mi- temps thérapeutique, la cour d'appel a violé les articles L. 122-24-4, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, ayant relevé que l'employeur reconnaissait que le magasin litigieux figurait parmi ceux pouvant donner lieu à commissionnement, a pu en déduire que M. X... pouvait prétendre à une commission normale de 10 % ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel a expressément relevé que la société Z... ne pouvait se définir comme un magasin à succursales multiples ;
Attendu, dès lors, que le rejet des trois premières branches du moyen rend la quatrième inopérante ;
Attendu, ensuite, que le contrat de travail ne prévoyait pas que la rémunération du salarié englobait le remboursement des frais professionnels, de sorte que l'indemnité de congés payés pouvait être calculée sur le montant global des commissions ;
Attendu, enfin, que l'indemnité spéciale de rupture prévue à l'article 14 de l'accord national interprofessionnel des VRP du 3 octobre 1975 doit être calculée sur la base de la rémunération mensuelle moyenne des douze derniers mois d'activité précédant l'arrêt de travail du salarié, cette période de référence ne pouvant s'entendre que d'une période d'activité professionnelle habituelle ; que cette règle doit s'appliquer aux autres indemnités de rupture ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses septième et huitième branches :
Vu l'article L. 122-8 devenu L. 1234-5 du code du travail ;
Attendu que la cour d'appel a décidé que les indemnités de préavis ne se cumulaient pas avec les indemnités journalières éventuellement perçues de la Sécurité sociale, sans autre motivation ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié avait été privé de la possibilité d'exécuter son préavis en raison du manquement de l'employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que seraient déduites des sommes allouées au titre du préavis, les indemnités journalières que le salarié a éventuellement perçues de la Sécurité sociale pendant la période du 8 juin au 8 septembre 2001, l'arrêt rendu le 30 mai 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que les indemnités de préavis seront perçues sans déduction des indemnités journalières éventuellement perçues de la Sécurité sociale ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-44240
Date de la décision : 09/07/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Indemnités - Indemnité compensatrice de préavis - Attribution - Cas - Inexécution du fait de l'employeur - Manquement à l'obligation de reclassement d'un salarié déclaré inapte

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Indemnités - Indemnité compensatrice de préavis - Cumul avec les indemnités journalières - Possibilité - Conditions - Détermination CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie du salarié - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude au travail - Obligation de reclassement - Proposition d'un emploi adapté - Initiative de l'employeur - Défaut - Portée

Lorsque le licenciement d'un salarié pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison d'un manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, le salarié a droit au paiement de l'indemnité compensatrice de préavis. Doit être cassé l'arrêt d'une cour d'appel qui décide que l'indemnité de préavis ne se cumule pas avec les indemnités journalières éventuellement perçues de la sécurité sociale


Références :

article L. 122-8, alinéas 1er et 3, phrase 1, du code du travail, recodifié sous l'article L. 1234-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 mai 2006

Sur l'attribution d'une indemnité compensatrice de préavis au salarié déclaré inapte et licencié sans cause réelle et sérieuse, dans le même sens que : Soc., 23 novembre 2005, pourvoi n° 04-47542, Bull. 2005, V, n° 336 (cassation partiellement sans renvoi), et les arrêts cités Sur le cumul de l'indemnité de préavis avec les indemnités journalières de la sécurité sociale, à rapprocher : Soc., 9 octobre 2001, pourvoi n° 99-43518, Bull. 2001, V, n° 308 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 jui. 2008, pourvoi n°06-44240, Bull. civ. 2008, V, n° 154
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, V, n° 154

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Lalande
Rapporteur ?: M. Texier
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gatineau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.44240
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