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18/03/2008 | FRANCE | N°06-45093

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2008, 06-45093


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre le syndicat CGT de l'énergie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., entré en 1975 au service d'EDF-GDF, exerçait depuis 1993 les fonctions d'opérateur intervention, chargé à ce titre d'assurer le relevé des compteurs, au centre d'exploitation d'Avignon ; qu'après l'avoir convoqué le 24 novembre 2000 à un premier entretien, puis informé le 20 décembre 2000 de son renvoi devant la commission secondaire du per

sonnel, qui s'est réunie en dernier lieu le 12 avril 2001, l'employeur a noti...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre le syndicat CGT de l'énergie ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., entré en 1975 au service d'EDF-GDF, exerçait depuis 1993 les fonctions d'opérateur intervention, chargé à ce titre d'assurer le relevé des compteurs, au centre d'exploitation d'Avignon ; qu'après l'avoir convoqué le 24 novembre 2000 à un premier entretien, puis informé le 20 décembre 2000 de son renvoi devant la commission secondaire du personnel, qui s'est réunie en dernier lieu le 12 avril 2001, l'employeur a notifié le 28 mai 2001 à cet agent sa mise à la retraite d'office ; que, contestant la régularité de la procédure suivie par l'employeur et la cause de sa révocation, M. X... a saisi le juge prud'homal de demandes indemnitaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir jugé régulière et fondée la sanction prise par EDF-GDF alors, selon le moyen, que pour assurer l'impartialité de la procédure disciplinaire, l'agent qui s'est trouvé mêlé directement et à titre personnel aux faits motivant la comparution de l'agent incriminé devant la commission secondaire, ne doit prendre part ni aux débats, ni aux délibérations ; que si l'interdiction concerne "essentiellement", selon le paragraphe 2321 de la circulaire Pers. 846, le coauteur ou le complice de l'agent incriminé, elle concerne indistinctement tout agent ayant eu à connaître directement et à titre personnel des agissements de l'agent incriminé, tel le supérieur hiérarchique à l'origine des contrôles destinés à le confondre ; qu'en retenant que la circulaire Pers. 846 interdit de siéger exclusivement au coauteur ou complice de l'agent incriminé, la cour d'appel a violé l'article 3 du statut national du personnel des industries électriques et gazières, ensemble la circulaire Pers. 846 ;

Mais attendu que le paragraphe 2321 de la circulaire Pers. 846 n'interdit de prendre part aux débats et aux délibérations de la commission secondaire qu'aux agents qui se sont trouvés mêlés directement et à titre personnel aux faits motivant la comparution de l'agent incriminé devant cette commission ; qu'en jugeant que le seul fait que M. Y... ait exercé des prérogatives de supérieur hiérarchique, en organisant un contrôle de l'activité de M. X..., ne lui interdisait pas de participer aux travaux de la commission secondaire appelée à se prononcer sur son cas, comme représentant de la direction, la cour d'appel a fait une exacte application de ce texte ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 9 du code de procédure civile ;

Attendu que si l'employeur a le pouvoir de contrôler et de surveiller l'activité de son personnel pendant le temps de travail, il ne peut mettre en oeuvre un dispositif de surveillance clandestin et à ce titre déloyal ;

Attendu que, pour juger que la sanction prononcée à l'encontre de M. X... était régulière et fondée, la cour d'appel a retenu que si l'employeur a demandé à des cadres de l'entreprise d'aller prendre leur repas dans l'établissement qu'exploitait l'épouse de l'agent, en leur fournissant des photographies de l'intéressé, afin d'établir un rapport dont il résultait que le salarié assurait le service du restaurant en partie pendant son temps de travail, il n'avait pas été porté atteinte à la vie privée de ce dernier, dès lors que l'établissement était ouvert au public, que les agents mandatés ne s'étaient pas cachés pour procéder aux constatations, qu'ils n'étaient pas tenus de révéler leurs fonctions, ni le but de leur visite, agissant en simples clients comme aurait pu l'être tout agent EDF venu inopinément dans l'établissement ; que la plainte avec constitution de partie civile déposée par M. X... pour atteinte à la vie privée a donné lieu à une ordonnance de non lieu ; que le recours à des témoins pour faire constater l'activité d'un agent pendant ses heures de travail ne constitue pas un procédé déloyal ou clandestin ; et que les contrôles ponctuels ne se sont pas réalisés à l'insu du salarié, les agents s'étant présentés au restaurant sans se dissimuler, alors que M. X... faisait le service au vu et au su de l'ensemble des clients quels qu'ils puissent être ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que des agents EDF, mandatés par le chef de centre, s'étaient rendus dans l'établissement tenu par l'épouse de l'intéressé en se présentant comme de simples clients, sans révéler leurs qualités et le but de leur visite, ce dont il résultait que leurs vérifications avaient été effectuées de manière clandestine et déloyale, en ayant recours à un stratagème, la cour d'appel, qui a retenu à tort comme moyen de preuve les rapports établis dans ces conditions, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 juillet 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne EDF-GDF Avignon Grand Delta aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne EDF-GDF Avignon Grand Delta à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-45093
Date de la décision : 18/03/2008
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir de direction - Etendue - Contrôle et surveillance des salariés - Procédés de surveillance - Procédés clandestins - Exclusion

PREUVE (règles générales) - Moyen de preuve - Moyen illicite - Applications diverses - Surveillance d'un salarié à son insu par l'employeur CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Pouvoir de direction - Etendue - Contrôle et surveillance des salariés - Procédés de surveillance - Validité - Condition PROTECTION DES DROITS DE LA PERSONNE - Respect de la vie privée - Atteinte - Contrat de travail - Surveillance d'un salarié à son insu CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Cause réelle et sérieuse - Faute du salarié - Preuve - Moyen de preuve - Procédés de surveillance - Validité - Condition

Les résultats d'un procédé de surveillance clandestin et déloyal du salarié, procédant d'un stratagème, ne peuvent être retenus comme moyen de preuve. Doit en conséquence être cassé l'arrêt qui se fonde, pour retenir une faute du salarié, sur des rapports dressés par d'autres agents mandatés par un supérieur hiérarchique pour se rendre dans le restaurant exploité par l'épouse de l'intéressé afin de vérifier si celui-ci y travaillait pendant ses heures de service, en se présentant comme de simples clients, sans révéler leurs qualités et le but de leur visite


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 27 juillet 2006

N2 Sur l'illicéité du moyen de preuve portant une atteinte disproportionnée à la vie privée du salarié, dans le même sens que : Soc., 26 novembre 2002, pourvoi n° 00-42401, Bull. 2002, V, n° 352 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2008, pourvoi n°06-45093, Bull. civ. 2008, V, N° 64
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, V, N° 64

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: M. Bailly
Avocat(s) : SCP Parmentier et Didier, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.45093
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