-X... José,-Y... Abdelkader,-Z... Franck,-A... Sofiane,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 13 novembre 2007, qui, dans l'information suivie contre eux pour infractions à la législation sur les stupéfiants, direction ou exploitation illicite d'un cercle de jeux, participation à la tenue d'une maison de jeux de hasard en bande organisée, proxénétisme aggravé en bande organisée, violences aggravées, menaces de mort, destruction volontaire par incendie, blanchiment, a prononcé sur leurs demandes d'annulation d'actes de la procédure ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 27 décembre 2007, joignant les pourvois en raison de la connexité et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel présenté pour Franck Z... :
Attendu que ce mémoire, produit au nom de Franck Z... par un avocat au barreau de Paris, ne porte pas la signature du demandeur ; que, dès lors, en application de l'article 584 du code de procédure pénale, il n'est pas recevable et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu'il pourrait contenir ;
Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 706-96,706-97,91 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande tendant à l'annulation des pièces relatives aux opérations de sonorisation de l'appartement des consorts C... et de l'ensemble de la procédure subséquente ;
" aux motifs que, d'une part, " les requérants font valoir par mémoire qu'aux termes de l'article 706-96, alinéa 1, précité, le juge d'instruction doit délivrer une ordonnance motivée aux fins d'installation du dispositif de sonorisation et saisir le juge des libertés et de la détention au cas où le dispositif concerne un lieu d'habitation dans lequel l'introduction se fera hors des heures prévues à l'article 59 du même code ; qu'en suite de ces ordonnances, le juge d'instruction doit délivrer une commission rogatoire ; que les demandeurs soutiennent que le juge d'instruction n'a pas établi la première ordonnance prévue au texte ; qu'il résulte de l'examen du dossier, que le juge d'instruction de Melun, le 9 août 2006, sur la demande de sonorisation faite par les enquêteurs et après réquisitions conformes du procureur de la République, a établi une ordonnance cotée D 51 / 341 motivée comme suit « Attendu qu'il est envisagé de procéder à l'enregistrement de paroles prononcées par des personnes mises en cause dans ce dossier, lors de leurs conversations dans l'appartement occupé par les deux principaux suspects au ...(75013), habité par Amina B...et Franck Z..., que ces enregistrements permettront de constituer les preuves permettant de caractériser les faits objet de la présente enquête ; que, pour ce faire, il est nécessaire de mettre en place un dispositif technique de sonorisation de cet appartement ; que cette mise en place pourrait être effectuée en dehors des heures prévues à l'article 59 » ; qu'à la suite de cette motivation, le juge d'instruction ordonnait la communication du dossier au juge des libertés et de la détention afin de solliciter l'autorisation de s'introduire dans le lieu d'habitation qu'il désigne, « aux fins de mise en place d'un dispositif technique » de sonorisation, « y compris hors des heures prévues à l'article 59 du code de procédure pénale » ; que la motivation de l'ordonnance, conformément aux termes de l'article 706-97 du code de procédure pénale, prévoit sans ambiguïté la mise en place d'un dispositif de sonorisation dans un appartement identifié aux fins de constitution de preuves dans le cadre de l'information en cours et prévoit l'introduction dans cet appartement hors des heures légales ; qu'en conséquence, le dispositif de l'acte énonce clairement la saisine du juge des libertés et de la détention à la seule fin d'autoriser l'introduction dans un lieu d'habitation déterminé hors des heures de l'article 59 à l'exclusion de toute demande d'installation dudit dispositif qui a été, en réalité, ordonné par le juge d'instruction en charge de la procédure ; que la rédaction conditionnelle du magistrat instructeur liée à la nécessité d'obtenir l'autorisation du juge des libertés et de la détention et le titre de l'ordonnance qui la limite à la saisine de ce magistrat, sont sans incidence sur le fond de l'ordonnance qui a ordonné la mise en place du dispositif de sonorisation sous la condition de l'autorisation du juge des libertés et de la détention de pouvoir pénétrer dans l'appartement hors des heures prévues à l'article 59 précité ; que les motifs et le dispositif de l'ordonnance du 9 août 2006 du juge des libertés et de la détention se limitent à l'autorisation de pénétrer dans un lieu d'habitation hors des heures de l'article 59 à l'exclusion de toute autorisation d'installation du dispositif de sonorisation ; que dès lors, aucune cause de nullité n'est encourue ;
" et aux motifs que, d'autre part, " s'agissant de la durée d'installation du dispositif technique, l'exigence de motivation prévue à l'article 706-97 concerne, selon ce texte, « les décisions prises en application de l'article 706-96 » ; qu'il s'en déduit que l'exigence légale concerne, dans leur ensemble, l'autorisation et la commission rogatoire alors qu'aucune disposition légale n'impose que chacun des actes satisfasse à la motivation visée audit article d'autant que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention a pour seul objet d'autoriser l'intrusion dans un lieu d'habitation aux fins de mise en place du dispositif technique, hors des heures prévues à l'article 59 et que cette intrusion s'effectue sous l'autorité et le contrôle du juge d'instruction ; que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention comporte tous les éléments permettant d'identifier le lieu d'habitation visé, les infractions qui motivent le recours à la mesure, les motifs de la pénétration dans l'appartement et l'objectif de preuves à constituer ; que le magistrat instructeur, dans la commission rogatoire qu'il a délivrée aux enquêteurs en suite de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, a expressément limité à deux mois, la durée des enregistrements ; que, dès lors, les décisions prises sont conformes aux exigences des articles 706-96 et 706-97 du code de procédure pénale ; qu'il n'a pas été porté atteinte aux intérêts des requérants et aucune nullité n'est encourue " ;
" 1°) alors que la mise en place, dans un lieu d'habitation, entre 21 heures et 6 heures, d'un dispositif technique de sonorisation, suppose, d'une part, une autorisation du juge d'instruction portant sur le principe même de la sonorisation et, d'autre part, une autorisation du juge des libertés et de la détention portant sur l'installation nocturne du dispositif ; que l'autorisation du juge d'instruction ne peut résulter que d'une ordonnance motivée ayant pour seul objet de permettre la sonorisation ; qu'en affirmant que l'autorisation pouvait résulter de la seule ordonnance du juge d'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention afin qu'il autorise la mise en place nocturne du dispositif technique, et qu'elle n'avait pas à être exprimée par une décision spéciale, la cour d'appel a violé l'article 706-96 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors qu'il en est d'autant plus ainsi que les intéressés doivent pouvoir contester la décision du juge d'instruction d'autoriser la sonorisation d'un lieu privé, de sorte que cette autorisation ne peut résulter d'une simple ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention aux fins d'autorisation d'installation nocturne du dispositif technique, acte d'administration judiciaire insusceptible de recours ;
" 3°) alors qu'en outre l'ordonnance du juge d'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention indiquait qu'il était " envisagé de procéder à l'enregistrement de paroles prononcées par des personnes mises en cause dans ce dossier, lors de leurs conversations dans l'appartement occupé par les deux principaux suspects " ; qu'en jugeant que cette ordonnance valait, à elle seule et en l'absence de toute autre décision, décision de procéder à une sonorisation, la cour d'appel l'a dénaturée ;
" 4°) alors que et en tout état de cause l'autorisation de sonorisation doit comporter la durée de la sonorisation autorisée, de sorte qu'à supposer même que l'on considère que l'autorisation résultait de l'ordonnance du juge d'instruction saisissant le juge des libertés et de la détention, l'absence d'indication, dans cette ordonnance, de la durée de l'enregistrement " envisagé " rendait nulles l'ordonnance et l'ensemble des opérations subséquentes ; qu'en affirmant qu'aucune cause de nullité n'était encourue, au motif erroné que l'exigence légale de mention de la durée de la sonorisation concernait " dans leur ensemble, l'autorisation et la commission rogatoire ", de sorte que l'absence d'indication de la durée dans la décision d'autorisation pouvait être palliée par son indication dans la commission rogatoire, la cour d'appel a violé l'article 706-97 du code de procédure pénale " ;
Sur le deuxième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 706-97,591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande tendant à l'annulation des pièces relatives aux opérations de sonorisation de l'appartement des consorts C... et de l'ensemble de la procédure subséquente ;
" aux motifs que, " s'agissant de la durée d'installation du dispositif technique, l'exigence de motivation prévue à l'article 706-97 concerne, selon ce texte, « les décisions prises en application de l'article 706-96 » ; qu'il s'en déduit que l'exigence légale concerne, dans leur ensemble, l'autorisation et la commission rogatoire alors qu'aucune disposition légale n'impose que chacun des actes satisfasse à la motivation visée audit article d'autant que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention a pour seul objet d'autoriser l'intrusion dans un lieu d'habitation aux fins de mise en place du dispositif technique, hors des heures prévues à l'article 59 et que cette intrusion s'effectue sous l'autorité et le contrôle du juge d'instruction ; que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention comporte tous les éléments permettant d'identifier le lieu d'habitation visé, les infractions qui motivent le recours à la mesure, les motifs de la pénétration dans l'appartement et l'objectif de preuves à constituer ; que le magistrat instructeur, dans la commission rogatoire qu'il a délivrée aux enquêteurs en suite de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, a expressément limité à deux mois, la durée des enregistrements ; que, dès lors, les décisions prises sont conformes aux exigences des articles 706-96 et 706-97 du code de procédure pénale ; qu'il n'a pas été porté atteinte aux intérêts des requérants et aucune nullité n'est encourue " ;
" alors que chacune des décisions prises en application de l'article 706-96 du code de procédure pénale – à savoir tant la décision d'autorisation du juge d'instruction que la décision du juge des libertés et de la détention autorisant la mise en place nocturne du dispositif technique de captation – doivent mentionner la durée des mesures d'enregistrement autorisées ; qu'en affirmant que l'exigence légale de mention de la durée de la sonorisation concernait " dans leur ensemble, l'autorisation et la commission rogatoire ", de sorte que l'absence d'indication de la durée dans la décision du juge des libertés et de la détention pouvait être palliée par son indication dans la commission rogatoire, la cour d'appel a violé l'article 706-97 du code de procédure pénale " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 706-96 et 706-97 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte desdits articles que la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l'enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics ou de l'image de personnes se trouvant dans un lieu privé, doit être autorisée par le juge d'instruction par ordonnance motivée, précisant notamment la durée de cette opération ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par ordonnance, en date du 9 août 2006, le juge d'instruction, sur les réquisitions conformes du procureur de la République, a sollicité du juge des libertés et de la détention qu'il autorise l'introduction, y compris hors des heures prévues par l'article 59 du code de procédure pénale, dans l'appartement occupé par Franck Z..., afin de mettre en place un dispositif technique de sonorisation ; que ce magistrat a fait droit à cette demande le même jour ; que le juge d'instruction a délivré une commission rogatoire aux officiers de police judiciaire chargés de procéder aux opérations de sonorisation dont il a fixé la durée à deux mois ;
Attendu que, pour rejeter les moyens d'annulation proposés par les demandeurs, pris de l'absence d'ordonnance motivée du juge d'instruction autorisant la sonorisation, l'arrêt prononce par les motifs reproduits aux moyens ;
Mais attendu qu'en déclarant régulières les opérations de sonorisation, alors qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que le juge d'instruction a omis, en violation des dispositions impératives des articles 706-96 et 706-97 du code précité, de rendre une ordonnance motivée les autorisant et fixant leur durée, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe énoncé ci-dessus ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le troisième moyen de cassation du mémoire ampliatif ;
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 13 novembre 2007, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gall conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Caron conseiller rapporteur, Mme Chanet, M. Pelletier, Mme Ponroy, M. Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Corneloup, Pometan, Mme Canivet-Beuzit, M. Finidori conseillers de la chambre ;
Avocat général : Mme Magliano ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;