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26/06/2007 | FRANCE | N°05-21378

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 juin 2007, 05-21378


Donne acte à M.X..., liquidateur judiciaire de la société Goldies du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Goldirings ;
Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué, que le 1er juillet 1999 M.Y..., agissant en son nom personnel et ès qualités de gérant de la société Goldies, distributeur de chaînes en or de bijouterie auprès des commerçants orfèvres détaillants, et les représentants de la société Rolot et Lemasson, fabricant d'articles de bijouterie, et de l'ensemble de ses filiales dont la société Laure et Pierre créations

(LP Créations) qu'elle détient à 100 % et qui distribue ses produits dans ...

Donne acte à M.X..., liquidateur judiciaire de la société Goldies du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Goldirings ;
Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué, que le 1er juillet 1999 M.Y..., agissant en son nom personnel et ès qualités de gérant de la société Goldies, distributeur de chaînes en or de bijouterie auprès des commerçants orfèvres détaillants, et les représentants de la société Rolot et Lemasson, fabricant d'articles de bijouterie, et de l'ensemble de ses filiales dont la société Laure et Pierre créations (LP Créations) qu'elle détient à 100 % et qui distribue ses produits dans le réseau des grandes surfaces et de groupes succursalistes, ont signé un protocole d'accord aux termes duquel la société Rolot et Lemasson cédait à M.Y... sa participation de 75 % dans le capital de la société Goldies ; que ce protocole comportait diverses clauses et conditions déterminant la suite des relations commerciales entre la société Goldies et le " groupe " Rolot et Lemasson ; qu'estimant que ni la société Rolot et Lemasson ni la société LP Créations n'avaient respecté les termes de ce protocole, la société Goldies les assignées, par acte du 31 mai 2000, aux fins de voir prononcer la résiliation du protocole à leurs torts exclusifs et de les voir condamnées au paiement de dommages et intérêts ; que par arrêt du 18 mars 2004, la cour d'appel a ordonné la réouverture des débats afin que les parties s'expliquent sur le moyen, soulevé d'office, tiré de la validité de tout ou partie des clauses relatives aux relations commerciales organisées dans le protocole du 1er juillet 1999 au regard des dispositions des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, ainsi que sur les conséquences de droit susceptibles d'en découler ; que le tribunal de commerce a prononcé le redressement judiciaire de la société Goldies le 1er juin 2004, et sa liquidation judiciaire le 26 janvier 2005, M.X..., représentant des créanciers, puis mandataire liquidateur, intervenant à l'instance ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu qu'au soutien de son pourvoi, M. X..., ès qualités, invoque une violation de l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que M. X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la nullité des articles 7 " conditions financières de livraison ",8 " collections ",10 " concurrence " et le premier alinéa de l'article 9 " produits après-vente ", du protocole d'accord conclu le 1er juillet 1999 entre M.Y... et la société Goldies, d'une part, et le " groupe " Rolot et Lemasson d'autre part, alors, selon le moyen, qu'un accord ne peut être qualifié d'action concertée ou d'entente au sens de l'article L. 420-1 du code de commerce que s'il est établi que des parties y ont librement consenti en vue de limiter l'accès au marché ou à la libre concurrence ; que la cour d'appel, pour retenir l'existence d'une entente, s'est fondée sur l'indépendance juridique de la société Goldies et la qualité de décideur de M.Y... ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant qu'au moment de la signature du protocole, la société Goldies était filiale du groupe Rolot et Lemasson, et sans s'expliquer sur la dépendance économique invoquée par M.X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 420-1 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient que la convention qui faisait partie du protocole de cession par le " groupe Rolot et Lemasson " de 75 % des parts sociales de sa filiale Goldies, aménageait les relations des deux entités et que la société Goldies, qui ne dissimule aucunement les intentions d'entente des parties concurrentes puisqu'elle explique dans ses conclusions qu'un tel accord, s'il avait été sincèrement exécuté, aurait été un gage de réussite pour les deux sociétés, fait en réalité grief à la société Rolot et Lemasson d'avoir agi en contravention du protocole ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a fait ressortir l'autonomie commerciale de la société Goldies au moment de la signature du protocole, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M.X..., ès qualités, fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation du protocole du 1er juillet 1999 aux torts réciproques des sociétés Goldies, Rolot et Lemasson, et LP Créations, alors selon le moyen :
1° / que tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que M.X... a invoqué la captation par les sociétés du groupe Rolot et Lemasson du savoir faire de la société Goldies, portant sur la mise au point d'une logistique de livraison commande par commande, la définition de toutes les implications informatiques pour minimiser les coûts, l'initiation aux impératifs liés à une clientèle de détaillants, et la définition d'une politique de prix référence par référence, en explicitant ses choix par rapport à la concurrence ; que la société Goldies avait mis au point une nouvelle forme de distribution pour la société Rolot et Lemasson, consistant en la vente directe sur catalogue, et que la société Goldies avait refondu toute la tarification, par un prix au gramme et non plus à la pièce, et mis au point une stratégie marketing performante et originale ; qu'il a également fait valoir que le démarchage, par la société Rolot et Lemasson de la clientèle des détaillants, avait été facilité par les données conservées par elle ; la société Rolot et Lemasson disposant de tout le fichier client de la société Goldies en précisant que l'ensemble de la comptabilité de la société Goldies avait été gérée par la société Rolot et Lemasson, ainsi en possession du fichiers clients de la société Goldies, et que la liaison informatique relative à la transmission de données de gestion et de comptabilité était maintenue après le 1er juillet 1999 en se référant à l'article 5 du protocole et que la société LP Créations avait publié dès avril 2000 un catalogue identique à celui habituellement édité par la société Goldies, mais avec des prix inférieurs ; que la cour d'appel, qui s'est fondée sur la nullité de la clause de non-concurrence pour refuser d'imputer aux sociétés du groupe Rollot et Lemasson le démarchage de la clientèle de la société Goldies, sans s'expliquer sur les conditions dans lequel ce démarchage était intervenu, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
2° / que les conventions doivent être exécutées de bonne foi ; que la cour d'appel qui a rejeté les demandes de M.X... contre les sociétés Rolot et Lemasson et LP Créations sans rechercher si, abstraction faite de toute obligation contractuelle de non-concurrence, les sociétés du groupe Rolot et Lemasson n'avaient pas commis une faute par l'utilisation, invoquée par M. X..., du savoir faire, portant notamment sur la vente sur catalogue, et du fichier client de la société Goldies qui était dans sa dépendance économique, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil ;
3° / que constituent des fautes le fait de détourner la clientèle d'une entreprise dont on détient le fichier client, ou de se placer dans son sillage afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire ; que la cour d'appel qui a rejeté les demandes de M.X... contre les sociétés Rolot et Lemasson et LP Créations sans rechercher si, abstraction faite de toute obligation contractuelle de non-concurrence, les sociétés du groupe Rolot et Lemasson n'avaient pas commis une faute par l'utilisation, invoquée par M. X..., du savoir-faire, portant notamment sur la vente sur catalogue, et du fichier client de la société Goldies qui était dans sa dépendance économique, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la société Goldies n'apporte pas la preuve qui lui incombe de démarches répétées de sa clientèle par la société LP Créations, que l'examen comparatif des deux catalogues ne permet pas d'affirmer que celui de la société LP Créations serait une copie servile ou même une imitation de celui de la société Goldies, que la constatation de références identiques ne peut être constitutive d'une faute de la société LP Créations dès lors que la société Goldies a utilisé pour ses références celles que la société Rolot et Lemasson avait antérieurement définies, que le catalogue de la société LP Créations utilise une tarification codée permettant de présenter le produit au client sans que le prix d'achat soit identifiable, ce que ne fait pas le catalogue de la société Goldies et que l'attestation versée par la société Goldies ne fait pas état d'un risque de confusion ; qu'en l'état de ces constatations d'où elle déduisait que les éléments constitutifs de la concurrence déloyale n'étaient pas rassemblés, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur la nullité de la clause de non-concurrence, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article l'article L. 420-1 du code de commerce ;
Attendu que pour décider qu'il existe, sur le territoire français, un marché pertinent de la chaîne en or de qualité et de fabrication française, distinct de celui des produits importés, distribués à des prix inférieurs, qui sont considérés comme de moindre qualité et qui ne sont pas substituables aux précédents, l'arrêt retient que les professionnels peuvent faire très facilement la distinction entre les produits importés et ceux fabriqués en France, qu'ils considèrent les produits importés, notamment d'Italie, comme de moindre qualité et d'une moins bonne finition que les produits fabriqués en France, que plusieurs déclarations de détaillants indépendants attestent de leur intérêt pour les produits de fabrication française, enfin, que la société Goldies commercialisait un produit spécifique, la chaîne en or de fabrication française ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas analysé de façon concrète le comportement d'approvisionnement des détaillants indépendants en chaînes en or en s'abstenant de rechercher si, compte tenu des qualités respectives des deux types de chaînes, la demande de ces détaillants pour les chaînes en or de fabrication française était indépendante du prix des chaînes de fabrication étrangère, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches :
Vu l'article 625 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que pour décider que les articles 10 et 7 du protocole sont nuls l'arrêt retient que le premier avait pour résultat nécessaire de restreindre la concurrence sur le marché des chaînes en or de fabrication française pour les détaillants puisqu'il en interdisait l'accès direct à l'un des principaux acteurs de la fabrication et de la distribution de ces produits et que le second avait pour but de restreindre la concurrence par les prix sur le même marché ;
Attendu que la cassation à intervenir sur la première branche du moyen entraîne la cassation par voie de conséquence sur ces branches ;
Sur le premier moyen, pris en ses sixième et septième branches :
Vu les articles L. 420-1, L. 420-3 et L. 420-4 du code de commerce ;
Attendu que pour déclarer nul l'article 8 du protocole selon lequel " afin de permettre à la société Goldies de présenter à sa clientèle les produits du groupe Rolot et Lemasson, ce dernier accepte de confier à sa cliente des collections " et le premier alinéa de l'article 9 du protocole selon lequel " la société Goldies aura gratuitement accès à la photothèque du groupe Rolot et Lemasson afin de lui permettre d'éditer ses catalogues ", l'arrêt retient que s'il est parfaitement licite et peut-être légitime qu'au sein d'un même groupe, soient pratiquées des conditions préférentielles, leur transposition à l'identique au bénéfice d'une société concurrente sur le marché, présente un caractère anormal si ces conditions ne sont pas justifiées par une contrepartie réelle et non manifestement disproportionnée et que par la convention conclue, qui ne saurait être assimilée à un simple accord de distribution des produits Rolot et Lemasson ou à un partenariat commercial ordinaire, la société Goldies bénéficiait de conditions préférentielles non justifiées par des contreparties économiques ou financières proportionnées ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que ces conventions avaient pour objet ou pouvaient avoir pour effet de restreindre la concurrence sur un marché pertinent, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu les articles 4 et 1382 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande en indemnisation du préjudice de la société résultant des propos dénigrant et des retards de livraison imputés aux sociétés Rolot et Lemasson et LP Créations, l'arrêt retient que les propos tenus présentent le caractère avéré d'un dénigrement d'un concurrent, que les retards de livraison qui se sont révélés préjudiciables à la réputation commerciale de la société Goldies constituaient un manquement d'autant plus grave à une obligation contractuelle que la société LP Créations assurait, sur certains articles, aux clients qu'elle démarchait des délais beaucoup plus courts mais qu'il n'y a pas lieu à indemnisation des préjudices invoqués qui demeurent indéterminés et indéterminables au vu des éléments communiqués à la cour ;
Attendu qu'en refusant ainsi d'évaluer le montant des préjudices dont elle constatait l'existence dans leur principe, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé la nullité des articles 7,8,10 et le premier alinéa de l'article 9 du protocole d'accord conclu le 1er juillet 1999 entre M.Y... et la société Goldies, d'une part, et les sociétés Financières des Robines, Rolot et Lemasson et Laure et Pierre créations, d'autre part, en application des article L. 420-1 et L. 420-3 du code de commerce, l'arrêt rendu le 15 septembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne les sociétés Rolot et Lemasson et Laure et Pierre créations aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six juin deux mille sept.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 05-21378
Date de la décision : 26/06/2007
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE - Pratique anticoncurrentielle - Entente illicite - Conditions - Absence de dépendance entre les entreprises - Recherche nécessaire

CONCURRENCE - Pratique anticoncurrentielle - Entente illicite - Appréciation - Marché de référence - Qualification - Critères - Substituabilité des produits

Prive sa décision de base légale au regard de l'article L. 420-1 du code de commerce la cour d'appel qui décide qu'il existe sur le territoire français un marché pertinent de la chaîne en or de qualité et de fabrication française distinct de celui des produits importés, distribués à des prix inférieurs, qui sont considérés comme de moindre qualité et ne sont pas substituables aux précédents, sans rechercher si, compte tenu des qualités respectives des deux types de chaînes, la demande des détaillants indépendants en chaînes en or pour les chaînes de fabrication française est indépendante du prix des chaînes de fabrication étrangère


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 15 septembre 2005


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 jui. 2007, pourvoi n°05-21378, Bull. civ. 2007, IV, N° 175
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2007, IV, N° 175

Composition du Tribunal
Président : M. Tricot
Avocat général : M. Jobard
Rapporteur ?: M. Jenny
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:05.21378
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