LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix janvier deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PELLETIER, les observations de la société civile professionnelle COUTARD et MAYER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DAVENAS ;
REJET du pourvoi formé par Y... Camille, contre le jugement n° 06/C81026 de la juridiction de proximité de Paris, en date du 17 mai 2006, qui, pour contravention au code de la route, l'a condamné à 150 euros d'amende ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 459, 535, 536 du code de procédure pénale, de l'article R. 412-7, alinéa 2, du code de la route, de l'article 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale et excès de pouvoir :
"en ce que le jugement attaqué a déclaré Camille Y... coupable de la contravention de circulation d'un véhicule non autorisé sur une voie réservée aux véhicules de transport public de voyageurs ;
"aux motifs que "le prévenu, pour sa défense, invoque que son entreprise Service Affaires bénéficierait du statut de société de grande remise et serait autorisée en vertu d'un courrier de la préfecture de police (direction des transports et du commerce, service des taxis) à emprunter les couloirs de circulation ; que les textes relatifs au statut des voitures de grande remise n'ont pu être consultés en l'absence de toute référence de date et de publicité ;
qu'en revanche, le préfet de police, dans un arrêté du 24 décembre 2001, fixe les règles applicables à l'usage des couloirs de circulation et énumère les véhicules autorisés à les emprunter : - "véhicule de transport public de voyageurs, notamment autobus, cars de desserte munis d'un macaron spécial et cars de ligne pourvus d'un bandeau de direction ; - véhicule d'intérêt général prioritaire"; nulle mention n'est faite de voitures dites de louage ou de grande remise ;
que, dans ces conditions, il convient d'écarter les moyens soutenus par la défense et de faire application des dispositions de l'article R. 412-7 du code de la route" ; "alors que, d'une part, la juridiction de proximité qui constatait que le conseil de Camille Y..., Me Maggiani, a été entendu en sa plaidoirie, après avoir déposé des conclusions écrites, n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle en ne versant pas ces conclusions au dossier de la procédure et en ne procédant pas comme il est dit à l'article 459 du code de procédure pénale, déclaré applicable aux juridictions de proximité par l'article 536 du même code ;
"alors que, d'autre part, précisément, dans ses conclusions écrites, dont le dépôt est mentionné par une disposition du jugement faisant foi jusqu'à inscription de faux, Camille Y... faisait expressément référence à une circulaire ministérielle en date du 21 mars 1975 autorisant les voitures de grande remise à emprunter, comme le font les taxis, les couloirs de circulation réservés ;
qu'en se bornant, ainsi, sans examiner cette pièce, produite à l'appui desdites conclusions, à indiquer que les textes relatifs au statut des voitures de grande remise n'ont pu être consultés en l'absence de toute référence de date et de publicité, pour déclarer Camille Y... coupable de la contravention de l'article R. 412-7, alinéa 2, du code de la route, parce que les voitures de grande remise ne figuraient pas dans la liste des véhicules autorisés, telle que résultant de l'arrêté du préfet de police en date du 24 décembre 2001, la juridiction de proximité qui n'a, ainsi, pas examiné les dispositions spécifiques applicables aux voitures de grande remise, telles que résultant de la circulaire du 21 mars 1975, comme elle était invitée à le faire, n'a pu justifier sa décision et a commis un excès de pouvoir» ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-3, R. 412-7, alinéas 2 et 3, du code de la route, arrêté du 24 décembre 2001 du préfet de police, de l'article 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
"en ce que le jugement attaqué a déclaré Camille Y... coupable de la contravention de circulation non autorisée sur une voie réservée à certaines catégories de véhicules ;
"aux motifs que, en revanche, le préfet de police, dans un arrêté du 24 décembre 2001, fixe les règles applicables à l'usage des couloirs de circulation et énumère les véhicules autorisés à les emprunter : - "véhicules de transports publics de voyageurs, notamment autobus, cars de desserte munis d'un macaron spécial et cars de ligne pourvus d'un bandeau de direction ; - véhicules d'intérêt général prioritaire" ; nulle mention n'est faite de voitures dites de louage ou de grande remise ;
que, dans ces conditions, il convient d'écarter les moyens soutenus par la défense et de faire application des dispositions de l'article R. 412-7, alinéas 2 et 3, du code de la route" ;
"alors que, nul ne peut être puni pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis avec précision par le règlement ; que l'article R. 412-7, alinéas 2 et 3, du code de la route", seul visé par la poursuite, qui punit le fait pour "tout conducteur" de circuler sur une voie réservée à "certaines catégories de véhicules" et l'arrêté préfectoral du 24 décembre 2001 énumérant des véhicules "autorisés", à savoir "les véhicules de transports publics de voyageurs, notamment autobus...", ne permettent pas de savoir avec certitude si tous les usagers titulaires d'une licence de transporteur public de voyageurs ou seuls certains d'entre eux sont autorisés à circuler sur les voies réservées, et ne mettent pas le juge pénal en mesure de s'assurer que les faits poursuivis sont ceux que l'autorité réglementaire a entendu réprimer ; que le texte de répression est donc entaché d'illégalité au regard du principe ci-dessus rappelé et ne saurait servir de base à une condamnation pénale» ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte du jugement attaqué que Camille Y... est poursuivi pour avoir fait circuler un véhicule sur une voie de circulation réservée à d'autres catégories de véhicules, fait prévu et réprimé par l'article R. 412-7, alinéas 2 et 3, du code de la route ; que, représenté par un avocat devant la juridiction de proximité, il a soutenu que sa société bénéficiait du statut concernant les voitures de grande remise et qu'elle était autorisée, en vertu d'un courrier de la préfecture de police, en date du 21 mars 1975, à emprunter les voies de circulation réservées à certains véhicules ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation et condamner le prévenu, le jugement prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en cet état, la juridiction de proximité, qui a répondu à tous les arguments péremptoires soulevés devant elle, a justifié sa décision ;
Que, d'une part, le demandeur n'est pas fondé à invoquer, pour la première fois devant la Cour de cassation, l'illégalité de l'article R. 412-7 du code de la route, lequel définit clairement les éléments constitutifs de la contravention qu'il prévoit et réprime, la liste des véhicules autorisés à circuler sur certaines voies étant établie, comme en l'espèce, par arrêté du préfet de police de Paris, en vertu des pouvoirs conférés par l'article L. 2512-14 du code général des collectivités territoriales, pour faciliter la circulation de ces véhicules ;
Que, d'autre part, les voitures de grande remise qui ne relèvent pas du transport public de voyageurs au sens de l'article 5 de la loi d'orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982, n'entrent pas dans les prévisions de l'arrêté préfectoral susvisé, du 24 décembre 2001, portant création et utilisation de voies de circulation réservées à certains véhicules dans plusieurs arrondissements de Paris ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que le jugement est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Pelletier conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;