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28/03/2006 | FRANCE | N°04-30211

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2006, 04-30211


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite d'un contrôle de la société Renault véhicules industriels, devenue Renault trucks, l'URSSAF de Lyon a notamment réintégré dans l'assiette des cotisations sociales dues par cette société pour la période du 1er août 1996 au 30 avril 1999, des remises consenties à ses salariés sur les pièces détachées et les réparations et des primes qu'elle leur avait versées en exécution d'un accord d'intéressement conclu le 30 juin 1997 ; que l'organisme de recouv

rement lui a adressé trois mises en demeure les 19 octobre 1999, 4 janvier 2000 e...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu qu'à la suite d'un contrôle de la société Renault véhicules industriels, devenue Renault trucks, l'URSSAF de Lyon a notamment réintégré dans l'assiette des cotisations sociales dues par cette société pour la période du 1er août 1996 au 30 avril 1999, des remises consenties à ses salariés sur les pièces détachées et les réparations et des primes qu'elle leur avait versées en exécution d'un accord d'intéressement conclu le 30 juin 1997 ; que l'organisme de recouvrement lui a adressé trois mises en demeure les 19 octobre 1999, 4 janvier 2000 et 10 janvier 2000 et annulé ultérieurement la première et la dernière de celles-ci ;

Sur le premier moyen du pourvoi incident de la société Renault trucks :

Attendu que la société Renault trucks fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré régulière la mise en demeure du 4 janvier 2000, alors, selon le moyen :

1 / que la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation ; qu'à cette fin, il importe qu'elle précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que n'est pas en mesure de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation le débiteur auquel ont été adressées plusieurs mises en demeure successives se rapportant au même contrôle mais indiquant des périodes différentes et des montants différents ; qu'en décidant l'inverse la cour d'appel a violé les articles L. 244-2 et L. 244-3 du Code de la sécurité sociale ;

2 / que c'est à la réception des mises en demeure que le débiteur doit avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et que ne permet pas une telle connaissance l'annulation tardive, près d'un an après la saisine de la commission de recours amiable, par l'URSSAF de deux mises en demeure considérées par elle comme irrégulières a posteriori et le maintien d'une autre, certes qualifiée de récapitulative, mais délivrée entre les deux précédentes, c'est-à-dire après la première ayant été annulée et avant la dernière ayant également été annulée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a de nouveau violé les articles L. 244-2 et L. 244-3 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que la mise en demeure du 4 janvier 2000 mentionnait la nature des cotisations mises en recouvrement, le motif du redressement par référence à la communication antérieure des chefs de redressement, le montant des cotisations et majorations de retard réclamées pour chacun d'eux, le total à payer ainsi que la période à laquelle se rapportaient les cotisations exigées ; qu'elle en a exactement déduit que le débiteur avait ainsi eu connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation, peu important l'existence de deux autres mises en demeure, ultérieurement annulées par l'organisme de recouvrement, dont l'une se rapportait à d'autres chefs de redressement et l'autre faisait double emploi avec la mise en demeure maintenue ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi incident :

Attendu que la société Renault trucks fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré fondé le redressement de cotisations concernant les remises sur pièces détachées concédées aux salariés de l'entreprise et de l'avoir condamnée à payer une somme à titre de cotisations et de majorations de retard, alors, selon le moyen :

1 / que sont soumis à cotisations les seuls avantages en nature ou en espèces résultant de la prise en charge directe par l'employeur de tout ou partie d'une dépense qui incombe normalement aux salariés ; qu'en l'espèce, ce n'est pas l'employeur de la société Renault véhicules industriels qui prend en charge une dépense incombant normalement à ses salariés mais un tiers, la société Renault SA ; qu'en jugeant que les remises sur réparations et pièces détachées accordées par les concessionnaires de la société Renault SA devaient être soumises à cotisations, peu important que la charge financière de ces remises n'incombe pas à la société Renault véhicules industriels, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale ;

2 / que la procédure de fixation forfaitaire des cotisations n'a pas lieu d'être mise en oeuvre lorsque l'employeur se trouve dans l'impossibilité de fournir des documents comptables, pour la raison que ceux-ci, qui existent, sont détenus par un tiers auquel ils appartiennent, les inspecteurs du recouvrement ayant la faculté de les obtenir auprès de la société propriétaire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article R. 242-5 du Code de la sécurité sociale ;

3 / qu'il est constant et constaté par l'arrêt attaqué que seules les remises excédant 30 % sont soumises à cotisations sociales ;

que la cour d'appel a au surplus constaté que les remises étaient en moyenne de 40 %, d'où il résulte nécessairement que certaines remises étaient inférieures ou égales à 30 % ; qu'en s'abstenant de rechercher si certaines remises n'étaient pas inférieures ou égales à 30 % et non soumises à cotisations, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 242-1 et R. 242-5 du Code de la sécurité sociale ;

Mais attendu d'abord que la prise en charge par la société mère d'un groupe, aux lieu et place de l'employeur, de remises sur le prix de réparations et de pièces détachées accordées aux salariés d'une filiale constituent pour les bénéficiaires un avantage en nature lié aux conditions d'exercice de la profession qui doit être soumis à cotisations ;

Attendu ensuite, que la cour d'appel qui a constaté que la comptabilité de l'employeur ne permettait pas d'établir le montant exact des remises accordées à ses salariés et qui n'avait pas à se référer à une décision ministérielle, instaurant une tolérance, sans valeur réglementaire, a décidé à bon droit que cet avantage devait être soumis à cotisations pour sa valeur déterminée forfaitairement ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'URSSAF de Lyon :

Attendu que l'URSSAF de Lyon fait grief à l'arrêt d'avoir annulé le redressement relatif à la réintégration dans l'assiette des cotisations de la société Renault véhicules industriels des primes d'intéressement versées en application de l'accord d'intéressement du 30 juin 1997, alors selon le moyen, qu'en disposant que, pour ouvrir droit aux exonérations prévues aux articles L. 441-4 et L. 441-6 du Code du travail, les accords d'intéressement doivent instituer un intéressement collectif des salariés présentant un caractère aléatoire et résultant d'une formule de calcul liée aux résultats et aux performances de l'entreprise, l'article L. 441-2 du même Code vise nécessairement les résultats et les performances de l'entreprise entrant dans le champ d'application de l'accord d'intéressement à laquelle les salariés appartiennent, ce qui ne permet pas d'asseoir l'intéressement des salariés d'une entreprise sur les résultats ou les performances d'autres entreprises non parties à l'accord ;

et qu'ainsi la cour d'appel a violé les articles L. 441-2 et L. 441-4 du Code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a pu décider que, pour le calcul de l'intéressement, l'accord d'intéressement pouvait prendre en compte les résultats du groupe auquel appartient l'entreprise au sein de laquelle il s'applique ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois, tant principal qu'incident ;

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Renault trucks ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 04-30211
Date de la décision : 28/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Salaire - Avantage en nature - Définition - Remise sur les prix de réparations et de pièces détachées.

1° SECURITE SOCIALE - Cotisations - Assiette - Avantages en nature - Définition - Remise sur les prix de réparations et de pièces détachées.

1° La prise en charge par la société mère d'un groupe, aux lieux et place de l'employeur, de remises sur les prix de réparations et de pièces détachées accordées aux salariés d'une filiale constituent pour les bénéficiaires un avantage en nature lié aux conditions d'exercice de la profession qui doit être soumis à cotisations sociales.

2° CONTRAT DE TRAVAIL - EXECUTION - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - Intéressement - Accord d'intéressement - Calcul - Intéressement s'appliquant dans une entreprise appartenant à un groupe - Portée.

2° Un accord d'intéressement peut, pour le calcul de celui-ci, prendre en compte les résultats du groupe auquel appartient l'entreprise au sein de laquelle cet accord s'applique.


Références :

1° :
2° :
Code de la sécurité sociale L242-1, R242-5
Code du travail L441-2, L441-4, L441-6

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 03 février 2004

Sur le n° 1 : Sur l'existence d'un avantage en nature dont la charge est supportée par un tiers, dans le même sens que : Chambre sociale, 1995-02-23, Bulletin 1995, V, n° 73, p. 52 (rejet) ; Chambre sociale, 2000-05-04, Bulletin 2000, V, n° 165, p. 129 (cassation). Sur le n° 2 : Sur la prise en compte des résultats enregistrés par des membres du groupe pour le calcul de l'intéressement, dans le même sens que : Chambre sociale, 2005-06-01, Bulletin 2005, V, n° 186, p. 163 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2006, pourvoi n°04-30211, Bull. civ. 2006 V N° 125 p. 120
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 V N° 125 p. 120

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Sargos.
Avocat général : Avocat général : M. Duplat.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Chauviré.
Avocat(s) : Avocats : SCP Delvolvé, SCP Defrenois et Levis.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:04.30211
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