AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses cinq branches :
Vu l'article 98-5 du décret du 27 novembre 1991 ;
Attendu que M. Philippe X... a, le 3 mars 2003, sollicité son inscription au barreau d'Avignon en étant dispensé de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat, sur le fondement des dispositions de l'article 98-5 du décret du 27 novembre 1991, en indiquant avoir été, depuis janvier 1994, attaché à l'activité juridique de l'organisation syndicale Force ouvrière où il exerçait, lors de sa demande, les fonctions de responsable juridique départemental ; que le conseil de l'Ordre des avocats au barreau d'Avignon a rejeté la requête au motif que M. X... ne justifiait pas d'une activité exclusive au sein de l'organisation syndicale ;
Attendu que, pour confirmer la décision du conseil de l'Ordre, l'arrêt attaqué retient, d'une part, que l'exigence d'exclusivité n'était pas remplie dans la mesure où, le service juridique du syndicat, dont l'activité essentielle n'est pas juridique mais sociale, ayant été mis en place progressivement à partir de 1994 par le requérant, l'activité de juriste de celui-ci n'avait pu être exclusive, où la poursuite d'études supérieures de droit avec le centre audiovisuel d'études juridiques jusqu'en 2000, concomitante de son activité de juriste, ne lui avait pas permis d'exercer à temps plein, où l'enseignement qu'il avait dispensé aux militants, même donné en matière juridique, ne saurait être assimilé à l'activité juridique d'une organisation syndicale, et où ses fonctions de secrétaire général adjoint du syndicat, membre du bureau, ne pouvaient se réduire à une simple représentation occasionnelle, de sorte qu'il n'était pas possible de retenir une activité juridique permanente, et, d'autre part, que M. X..., détaché auprès du syndicat, avait conservé son statut de salarié d'une société de transport en commun qui le rémunérait, de sorte que sa situation impliquait un lien de subordination au point qu'une inscription au barreau exigerait la démission préalable de l'intéressé ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, après avoir relevé que M. X... avait justifié d'une participation effective, depuis huit ans au moins, à l'activité juridique du syndicat professionnel Force ouvrière du Vaucluse, que ce soit en matière de consultations juridiques, d'assistance juridique aux comités d'entreprises, représentants du personnel et défenseurs syndicaux, de défense des consommateurs, comme en matière de rédaction d'actes pour les syndicats ou leurs adhérents, sans préciser en quoi la mise en place progressive du service juridique par M. X... lui-même excluait qu'il ait assumé personnellement, pendant ce temps, l'activité juridique dont le besoin justifiait précisément la création d'un service, ni en quoi ses autres activités, qui ont pu n'être effectuées que de façon ponctuelle ou en dehors de ses horaires habituels, l'avaient effectivement empêché d'avoir une activité spécifique et continue de juriste pour son organisation syndicale, et en tirant de sa position statutaire actuelle une condition d'inscription non prévue par la loi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 février 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne l'Ordre des avocats au barreau d'Avignon aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille cinq.