AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 7 novembre 2002) d'avoir prononcé l'exequatur de l'arrêt rendu le 11 janvier 1987 par la cour d'appel judiciaire de Djibouti qui l'avait condamné à payer à M. Y... la somme de 1 000 000 de francs à titre de dommage-intérêts à la suite d'un détournement de clientèle, alors, selon le moyen :
1 / qu' en déclarant que M. Y... avait satisfait aux conditions posées par l'article 38 de la Convention franco-djiboutienne du 27 septembre 1986, en produisant le texte de l'arrêt du 11 janvier 1987 d'après un extrait de minutes de la Cour judiciaire de Djibouti et la copie d'un arrêt de la Cour suprême de Djibouti du 15 octobre 1988 ayant rejeté le pourvoi de M. X..., s'abstenant par là même de préciser quelles étaient au sens du texte invoqué les conditions nécessaires à l'authenticité de l'expédition de la décision qui devait être produite et en particulier d'examiner comme elle y était pourtant invitée si précisément la signature de la décision par le greffier ne constituait pas l'une des conditions assurant son authenticité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 38, 1, de la Convention de coopération judiciaire en matière civile conclue entre la France et Djibouti le 27 septembre 1986 ;
2 / qu'en considérant que la connaissance qu'aurait eue l'exposant de l'existence de l'arrêt litigieux et qu'elle a déduite du fait qu'il avait formé contre lui un pourvoi en cassation, suppléait la signification, formalité impérativement exigée par les textes, la cour d'appel a violé l'article 38, 2, de la Convention de coopération judiciaire en matière civile conclue entre la France et Djibouti le 27 septembre 1986 ;
3 / qu'en décidant que l'absence de signature du greffier sur l'arrêt litigieux n'était pas contraire à l'ordre public international français, peu important que la signature du greffier fût prescrite à peine de nullité tant par le droit français que par le droit djiboutien, la cour d'appel a violé l'article 35, 4, de la Convention de coopération judiciaire en matière civile conclue entre la France et Djibouti le 27 septembre 1986 ;
4 / qu' en relevant, pour écarter les prétentions de M. X..., qui avait fait valoir qu'il ressortait de la première page de l'arrêt litigieux que ni lui-même ni son avocat n'avaient comparu à une audience de plaidoirie tandis que l'avocat de son adversaire avait été entendu, qu'il n'était pas fait mention de la convocation des parties à l'audience de plaidoirie dans le rappel de la procédure et qu'il n'avait jamais reçu une telle convocation, de sorte qu'il n'avait pas été en mesure de faire valoir ses moyens de défense et qu'il avait donc été porté atteinte aux principes essentiels du procès équitable, qu'il ressortait des énonciations de l'arrêt litigieux que la décision était contradictoire et que ses arguments n'étaient que des allégations impuissantes à démontrer qu'il n'avait pas été représenté et mis à même de se défendre dans une procédure loyale et publique, mettant ainsi à la charge de l'exposant l'obligation de démontrer qu'il n'avait pas bénéficié d'un procès équitable, quand il lui appartenait de rechercher en fait si les droits de la défense avaient été respectés et notamment s'il avait bien été, comme son adversaire, invité à comparaître et convoqué à une audience de plaidoirie au cours de laquelle aurait pu s'instaurer un débat contradictoire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au vu de l'article 35, 4 , de la Convention de coopération judiciaire en matière civile conclue entre la France et Djibouti le 27 septembre 1986, et violé les droits de la défense ainsi que le principe d'ordre public du droit à un procès équitable ;
Mais attendu que, d'abord, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que la production du texte de l'arrêt du 11 janvier 1987 et de la copie de l'arrêt de la Cour Suprême de Djibouti du 15 octobre 1988 rejetant le pourvoi formé par M. X..., faisait preuve, malgré l'absence de signature du greffier, de l'authenticité de cette décision ; qu'ensuite, en ayant souverainement relevé que la décision était contradictoire, que les parties avaient été régulièrement citées et représentées, que M. X... qui avait formé un recours avait eu connaissance de cette décision qui était devenue définitive et exécutoire, la cour d'appel en a exactement déduit que les exigences posées par les articles précités de la Convention franco-djiboutienne du 27 septembre 1986 avaient été satisfaites et que la décision n'était pas contraire à l'ordre public international procédural français ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à payer à M. Y... la somme de 2 000 euros ;
rejette la demande de M. X... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille cinq.