LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° W 04-40193 à U 04-40237 ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'une grève a été décidée le 8 novembre 2001 dans l'établissement de Saint Fons de la société Atofina pour s'opposer aux suppressions d'emploi prévues par un plan de restructuration ; que l'employeur a fermé l'atelier de production et a mis les salariés en chômage technique du 23 novembre au 6 décembre 2001, date à laquelle un protocole de fin de conflit a été signé entre la direction et les syndicats CGT et CFDT ;
Attendu que la société Atofina fait grief aux jugements attaqués (conseil de prud'hommes de Lyon, 31 octobre 2003) d'avoir jugé qu'elle avait procédé à un lock out illicite et de l'avoir en conséquence condamné à restituer à certains de ses salariés des heures sur le compte de récupération des jours fériés et sur le compte du repos compensateur et à payer diverses sommes en réparation du préjudice causé alors, selon les moyens :
1 / que la grève qui, en raison d'impératifs de sécurité, oblige l'employeur à procéder à l'arrêt total de son activité constitue une situation contraignante qui le libère à l'égard de l'ensemble de son personnel de toute obligation de fourniture de tâches mêmes supplétives ;
qu'en considérant que l'employeur était tenu de fournir des tâches supplétives aux salariés, après avoir cependant admis que la grève conduite sur les 4 dernières heures de travail posté interdisait à l'employeur toute mise en route même partielle des cycles de production en raison d'impératifs impérieux de sécurité, le conseil de prud'hommes a violé l'article L. 521-1 du Code du travail ;
2 / que les salariés grévistes qui, par une grève quotidienne même partielle, mettent l'employeur dans l'impossibilité de démarrer un processus de production en raison d'impératifs de sécurité, et l'empêchent ainsi d'utiliser l'activité qu'ils sont tenus de mettre à sa disposition, provoquent une suspension totale de leurs contrats de travail et ne sauraient en conséquence exiger, pendant cette période, la fourniture de tâches supplétives de leurs missions habituelles, seraient-elles liées à l'exécution du contrat de travail ; qu'en refusant de considérer que l'action des salariés grévistes, qui conduisait selon ses propres constatations à la paralysie totale de l'activité de l'entreprise, avait pour conséquence de suspendre leurs contrats de travail, le conseil de prud'hommes a violé l'article 1134 du Code civil et les articles L. 122-1 et L. 521-1 du Code du travail ;
3 / que l'employeur qui, de sa propre initiative, entreprend des recherches de tâches supplétives pour repousser l'échéance de la suspension des contrats de travail à laquelle le contraint l'action de salariés grévistes ne saurait se voir opposer la reconnaissance ou l'aveu d'une obligation de fourniture de travail à laquelle il n'est pas légalement tenu ; qu'en retenant que la tentative de fournir des tâches supplétives aux grévistes de l'atelier PVC valait reconnaissance d'une obligation de fournir du travail à ces salariés. le conseil de prud'hommes a violé l'article L. 122-1 du Code du travail et les articles 1134 et 1354 et suivants du Code civil ;
Mais attendu que le juge prud'homal qui a constaté que l'employeur ne rapportait pas la preuve qu'il était dans l'impossibilité de fournir aux salariés non-grévistes des tâches supplétives en rapport avec l'exécution de leurs contrats de travail, même s'il avait été contraint, du fait de la grève, d'arrêter totalement les installations de l'atelier de production pour des impératifs de sécurité, a pu décider qu'il ne se trouvait pas dans une situation contraignante justifiant la mise du personnel en chômage technique et qu'il devait payer leur rémunération à tous les salariés qui s'étaient tenus à sa disposition ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les premier et troisième moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Atofina aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Atofina à payer la somme de 55 euros à chacun des défendeurs aux pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille cinq.