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31/10/2000 | FRANCE | N°99-86980

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 octobre 2000, 99-86980


REJET du pourvoi formé par :
- X... Marc,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 12 octobre 1999, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 12 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1741 du Code général des impôts, L. 228 et R. 228 du Livre des procédures fisca

les, 34 et 37 de la Constitution du 4 octobre 1958, 1 à 3 du décret n° 97-72...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Marc,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 12 octobre 1999, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à 12 mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 francs d'amende, a ordonné la publication et l'affichage de la décision et prononcé sur les demandes de l'administration des Impôts, partie civile.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1741 du Code général des impôts, L. 228 et R. 228 du Livre des procédures fiscales, 34 et 37 de la Constitution du 4 octobre 1958, 1 à 3 du décret n° 97-726 du 18 juin 1997, 111-5 du Code pénal, 427, 485, 512, 591, 593 et 802 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Marc X... coupable de fraude fiscale ;
" aux motifs que si l'avis de la commission des infractions fiscales subordonne la recevabilité de la plainte déposée par l'Administration, cet organe ne possède pas en lui-même la faculté de mettre en mouvement l'action publique. Dès lors, Marc X... n'est pas fondé à soutenir que la procédure suivie devant elle est de nature pénale. L'exception d'inconstitutionnalité de l'article R. 228-1 du Livre des procédures fiscales doit être rejetée ; il n'appartient pas davantage au juge judiciaire d'apprécier la légalité d'un décret, étant ici relevé que la délégation de signature n'est pas exclue explicitement par l'article L. 228-1 du Livre des procédures fiscales. En l'espèce, la Commission des infractions fiscales a été saisie le 26 novembre 1997 par le secrétaire d'Etat au Budget en application du décret n° 97-726 du 18 juin 1997 relatif aux attributions déléguées par M. Z... au secrétaire d'Etat au Budget M. Y..., publié au Journal officiel du 19 juin 1997. Marc X..., enfin, n'excipe ni ne démontre le grief à lui causé par la prétendue irrégularité ou illégalité purement administrative venant entacher l'acte de saisine. L'exception sera rejetée (arrêt, page 4) ;
" 1° alors que l'avis de la Commission des infractions fiscales constituant le préalable nécessaire à la mise en oeuvre de l'action publique, la procédure suivie devant cet organe relève nécessairement de la procédure pénale, laquelle a notamment pour objet de fixer les règles qui doivent être suivies ainsi que les formes qui doivent être respectées pour la poursuite des infractions ;
" Qu'en estimant au contraire que la Commission des infractions fiscales n'avait pas elle-même la faculté de mettre en mouvement l'action publique, pour en déduire que la procédure suivie devant cette Commission n'était pas de nature pénale et qu'ainsi l'inconstitutionnalité de l'article R. 228-1 du Livre des procédures fiscales devait être écartée, la cour d'appel a violé l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 ;
" 2° alors que le juge pénal étant, conformément aux dispositions de l'article 111-5 du Code pénal, compétent pour apprécier la légalité des actes administratifs lorsque de cet examen dépend la solution du procès pénal, il lui appartient, sous cet angle, de contrôler la conformité à l'ordre constitutionnel, et notamment à la répartition des compétences législative et réglementaire résultant des articles 34 et 37 de la Constitution du 4 octobre 1958, des textes réglementaires intéressant la procédure suivie devant la Commission des infractions fiscales, dont l'avis conforme constitue un préalable nécessaire à la mise en oeuvre de l'action publique ;
" Qu'en l'espèce, en se bornant à énoncer que la Commission des infractions fiscales ne possédait pas la faculté de mettre en mouvement l'action publique et qu'ainsi la procédure suivie devant elle n'était pas de nature pénale, pour en déduire que l'exception d'inconstitutionnalité de l'article R. 228-1 du Livre des procédures fiscales devait être écartée, sans rechercher si, indépendamment du point de savoir si cette procédure était ou non de nature pénale, l'inconstitutionnalité de l'article R. 228-1 du Livre des procédures fiscales, au regard notamment de la répartition des compétences prévue aux articles 34 et 37 de la Constitution du 4 octobre 1958, n'était pas de nature à remettre en cause la régularité de l'avis de la Commission et, dès lors que celui-ci est nécessaire à la mise en oeuvre de l'action publique, à avoir des conséquences sur la solution du procès pénal, la cour d'appel qui se détermine par une motivation inopérante, a privé sa décision de toute base légale ;
" 3° alors qu'il appartient au juge pénal d'apprécier la légalité d'un décret si, de cet examen, dépend la solution du procès pénal ;
" Qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, Marc X... excipait précisément de l'illégalité du décret du 23 janvier 1947 habilitant d'une façon générale les ministres à déléguer leurs compétences, ainsi que de l'illégalité du décret du 18 juin 1997 relatif aux attributions déléguées par le ministre chargé des Finances au secrétaire d'Etat au Budget ;
" Qu'ainsi, en énonçant qu'il n'appartient pas au juge judiciaire d'apprécier la légalité d'un décret, pour en déduire que la Commission des infractions fiscales a été, en l'espèce, régulièrement saisie par M. le secrétaire d'Etat au Budget, en application du décret du 18 juin 1997, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;
" 4° alors subsidiairement, qu'il appartient au juge pénal d'interpréter les dispositions d'un décret lorsque de cet examen dépend la solution du procès pénal ;
" Qu'en l'espèce, en se bornant à énoncer que la Commission des infractions fiscales a été régulièrement saisie par M. le secrétaire d'Etat au Budget, en application du décret du 18 juin 1997 relatif aux attributions déléguées par M. Z... au secrétaire d'Etat au Budget. M. Y..., sans répondre aux conclusions d'appel de Marc X... qui, sur ce terrain, faisait valoir (pages 7 et 8) que les dispositions dudit décret de délégation visant, de façon générale, les attributions du ministre des Finances relatives "aux impôts" ne pouvaient valablement habiliter le secrétaire d'Etat au Budget à saisir la Commission des infractions fiscales en lieu et place du ministre, dès lors que toute délégation doit être expresse et précise, et que la délégation de cette compétence, spécialement dévolue à ce dernier par l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales, n'était pas expressément prévue par le décret du 18 juin 1997, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" 5° alors que les règles relatives à l'exercice de l'action publique relevant de l'ordre public procédural, les actes accomplis au mépris de ces exigences sont frappés de nullité sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'un grief ;
" Qu'en l'espèce, en se déterminant par la circonstance que le prévenu ne démontre pas la réalité du grief que lui a causé l'irrégularité de la saisine de la Commission des infractions fiscales, pour en déduire que l'exception de nullité des poursuites devait être écartée, tout en relevant que l'avis de ladite commission est requis comme condition de la recevabilité de la plainte déposée par l'Administration du chef de fraude fiscale, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 802 du Code de procédure pénale " ;
Attendu que le demandeur, cité devant le tribunal correctionnel pour fraude à la TVA, a régulièrement soulevé l'exception d'illégalité des dispositions de l'article R. 228-1 du Livre des procédures fiscales, qui habilitent le ministre des Finances à déléguer sa compétence pour saisir la Commission des infractions fiscales aux chefs de services de l'administration centrale de la Direction générale des Impôts et de la Direction de la comptabilité publique, ainsi que de l'avis rendu le 5 février 1998 par cette commission, saisie par le secrétaire d'Etat au Budget, autorité administrative prétendument incompétente ; qu'il a demandé, en conséquence de l'irrégularité de cet avis, que la plainte et l'action publique dirigée contre lui soient déclarées irrecevables ; qu'il a repris ces exceptions devant la cour d'appel ;
Attendu que, pour rejeter ces dernières, l'arrêt attaqué se prononce par les motifs repris au moyen ;
Qu'en cet état, abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant relatif à l'incompétence du juge pénal pour apprécier la légalité des actes administratifs, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'en effet, en l'absence de dispositions législatives interdisant, expressément ou implicitement, au ministre des Finances de déléguer son droit de saisir la Commission des infractions fiscales au secrétaire d'Etat au Budget, lui-même membre du Gouvernement, et dès lors qu'un décret du Président de la République autorise le secrétaire d'Etat au Budget à exercer, par délégation, certaines attributions du ministre de l'Economie et des Finances, notamment en matière fiscale, ledit secrétaire d'Etat est compétent pour saisir la Commission des infractions fiscales en application de l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales ;
D'où il suit que le moyen, qui reprend l'argumentation inopérante du prévenu sur l'illégalité de l'article R. 228-1 du Livre précité, inapplicable en l'espèce, et qui est irrecevable en ses troisième et quatrième branches, lesquelles contestent pour la première fois devant la cour d'appel la légalité de deux décrets, ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-86980
Date de la décision : 31/10/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Procédure - Action publique - Exercice - Commission des infractions fiscales - Avis favorable - Procédure administrative préalable - Saisine par le ministre des Finances - Délégation du secrétaire d'Etat au Budget.

En l'absence de dispositions législatives interdisant, expressément ou implicitement, au ministre de l'Economie et des Finances de déléguer son droit de saisir la Commission des infractions fiscales au secrétaire d'Etat au Budget, lui-même membre du Gouvernement, et dès lors qu'un décret du Président de la République autorise le secrétaire d'Etat au Budget à exercer, par délégation, certaines attributions du ministre de l'Economie et des Finances, notamment en matière fiscale, ledit secrétaire d'Etat est compétent pour saisir la Commission des infractions fiscales en application de l'article L. 228 du Livre des procédures fiscales. (1).


Références :

Livre des procédures fiscales L228

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 12 octobre 1999

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1996-09-26, Pourvoi n°A 95-84.767, X... c/ Y..., diffusé Légifrance.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 oct. 2000, pourvoi n°99-86980, Bull. crim. criminel 2000 N° 325 p. 962
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 325 p. 962

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Cotte
Avocat général : Avocat général : Mme Fromont.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Martin.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Delaporte et Briard, M. Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.86980
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