Attendu que suivant acte du 18 mars 1991, la société Soprec a reçu de la SAEM du Centre international de transport de Roncq (CIT) mandat de commercialiser les terrains que cette dernière avait aménagés, en recherchant des acquéreurs, investisseurs ou entreprises intéressés par une implantation sur ce site pour les seuls métiers y autorisés, et en participant à la conclusion des compromis de vente moyennant une commission de 4 % TTC, payable par la venderesse ; que le 18 juillet 1991 par un autre acte la société Soprec s'est vue reconnaître par la société Aedifis un droit de commission de 5 % HT du prix de vente d'un terrain ainsi aménagé, commission qui devait être versée à la signature de l'acte authentique de vente ; qu'après la signature le 5 mai 1992, de la vente du terrain, la société Soprec a réclamé à la société Aedifis paiement de la commission stipulée, soit 310 374,42 francs, et, devant le refus de celle-ci, l'a assignée à cet effet devant la juridiction des référés qui a accueilli la demande ; que la société Aedifis a procédé au règlement selon les termes de cette condamnation ; qu'ayant ensuite appris que la société Soprec avait perçu la commission due par la SAEM du CIT, venderesse du terrain, elle a, en se prévalant des dispositions de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et de l'article 73 du décret du 20 janvier 1972, assigné ce cabinet immobilier en restitution de la somme qu'elle avait versée ; qu'elle a en outre soutenu que celui-ci avait manqué à ses obligations contractuelles et a demandé réparation du préjudice résultant de frais engagés inutilement, d'une perte prévisible dans la revente du terrain et d'un manque à gagner ; que l'arrêt attaqué a condamné la société Soprec à restituer la somme de 310 374,42 francs et à payer celle de 375 000 francs à titre de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de la société Soprec :
Vu les articles 1er et suivants de la loi du 2 janvier 1970 et 72 et suivants du décret du 20 juillet 1972 ;
Attendu qu'aucune disposition de ces textes ne fait obstacle à ce qu'un agent immobilier détienne un mandat d'un vendeur et un mandat d'un acquéreur pour une même opération ; qu'il en résulte que le droit à commission existe pour chacun des mandats dès lors que sont satisfaites les exigences prescrites par les articles 6 de la loi et 73 du décret ;
Attendu que pour condamner la société Soprec à restituer la somme de 310 374,42 francs, l'arrêt énonce que les dispositions de la loi et du décret précités ne permettent pas à un agent immobilier, pour une seule et même opération de cession de terrains, de réclamer deux commissions, la première prévue dans le cadre du mandat du vendeur, la seconde dans celui du mandat de l'acheteur et alors qu'aucun des deux mandats ne mentionne l'existence de l'autre ni la commission qui y est attachée ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen, pris en sa troisième branche, du même pourvoi :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour condamner la société Soprec à verser à la société Aedifis la somme de 375 000 francs à titre de dommages-intérêts, l'arrêt énonce que cette dernière peut réclamer la réparation du préjudice résultant du manquement de la société Soprec à son obligation de conseil, le mandat donné à celle-ci par le vendeur du terrain moyennant commission ayant conduit ce cabinet immobilier à ne pas conseiller suffisamment et complètement l'acheteur qui ignorait l'existence dudit mandat ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi sans autrement caractériser l'existence d'un manquement imputable au mandataire, la cour d'appel a privé sa décison de base légale au regard du texte susvisé ;
Et attendu que par suite de la cassation qui va être prononcée, il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi incident de la société Aedifis ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer ni sur les première et deuxième branches du second moyen du pourvoi principal, ni sur le pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.