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13/01/1998 | FRANCE | N°96-81477

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 janvier 1998, 96-81477


REJET sur le pourvoi formé par :
- X... François-Xavier,
- Y... Jean,
- la Banque régionale d'escompte et de dépôts-Banque Populaire (BRED), civilement responsable,
contre l'arrêt n° 1 de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 4 mars 1996, qui a condamné le premier et le second pour entrave au fonctionnement régulier du comité central d'entreprise, chacun à une amende de 10 000 francs, a déclaré la Banque régionale d'escompte et de dépôts-Banque Populaire (BRED) civilement responsable et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les

mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pri...

REJET sur le pourvoi formé par :
- X... François-Xavier,
- Y... Jean,
- la Banque régionale d'escompte et de dépôts-Banque Populaire (BRED), civilement responsable,
contre l'arrêt n° 1 de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 4 mars 1996, qui a condamné le premier et le second pour entrave au fonctionnement régulier du comité central d'entreprise, chacun à une amende de 10 000 francs, a déclaré la Banque régionale d'escompte et de dépôts-Banque Populaire (BRED) civilement responsable et qui a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 431-5 et L. 933-3, alinéa 6 du Code du travail, des articles 382, 388, 485, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par Jean Y... et François-Xavier de X... ;
" aux motifs, propres, que dans le cas où la loi prévoit la consultation du comité d'entreprise ou d'établissement, l'article L. 431-5 du Code du travail exige du chef d'entreprise qu'il transmette au comité, afin de lui permettre de donner un avis motivé, des informations précises ainsi que sa réponse aux observations que cet organisme peut être amené à formuler ; que s'il est vrai que les réunions du comité central d'entreprise des 9 et 16 novembre 1993 ainsi que du 1er décembre 1993 ont été tenues au siège social de l'entreprise, à Paris, et que les consultations du comité auraient pu être effectuées à cet endroit, il n'en demeure pas moins que c'est au siège du comité central d'entreprise de la BRED à Créteil, lieu où s'effectue le travail du comité et de la commission préalable aux séances, que les notes et documents nécessaires auraient dû être communiqués en vue de la consultation exigée ; que l'infraction d'entrave recouvrant à la fois un défaut d'information et un défaut de consultation conforme aux exigences de l'article L. 431-5 du Code du travail, la juridiction dans le ressort de laquelle a eu lieu une partie de ces faits, était compétente pour connaître de l'infraction (cf. Cass. Crim. 3 mars 1976, n° 80) ; que les manquements reprochés aux prévenus consistent essentiellement en des omissions de communication de pièces au siège du comité central d'entreprise, c'est-à-dire à Créteil, et ce, en vue d'une consultation effective de cet organisme sur le fondement de l'article L. 933-3 du Code du travail ;
" et, aux motifs adoptés, qu'il est établi que le siège social de la BRED est situé à Paris alors que le siège du comité central d'entreprise se trouve à Créteil ; que l'infraction reprochée aux prévenus résulte essentiellement, selon la partie civile, d'omissions et d'absence de communication de pièces dans les délais légaux, refus de convoquer une réunion extraordinaire ; que selon la jurisprudence de la Cour de Cassation rappelée dans un arrêt de la chambre criminelle en date du 25 avril 1989, les infractions résultant d'omissions sont considérées comme ayant été commises au lieu où l'obligation transgressée aurait dû recevoir exécution, en l'espèce au siège du comité d'entreprise où est né le droit à la communication des pièces qu'il a sollicitée et où la communication aurait dû avoir lieu, et le droit à voir une réunion convoquée ; qu'en raison de la connexité des autres infractions reprochées, il y a lieu de retenir de ce fait la compétence du tribunal de Créteil ;
" 1o Alors que le législateur n'a pas écarté ou amendé les règles normales de compétence édictées par l'article 382 du Code de procédure pénale en matière de délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise ;
" Que le lieu où s'effectue l'envoi par le chef d'entreprise des documents en vue de la consultation du comité d'entreprise ou de la commission de formation sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise, est celui du siège social de l'entreprise ;
" Que le retard dans l'envoi des documents en cause constitue un refus de communication et que dès lors, le tribunal compétent pour connaître du délit d'entrave fondé sur le manquement à l'obligation de communication, est celui du siège social de l'entreprise où est né ce refus en sorte qu'en écartant les conclusions des demandeurs soutenant que le tribunal correctionnel de Créteil, lieu du siège social du comité d'entreprise, était incompétent pour connaître des délits d'entrave qui lui étaient soumis, la cour d'appel a violé par fausse application les dispositions de l'article 382 du Code de procédure pénale ;
" 2o Alors, en tout état de cause, que le juge correctionnel était saisi en l'espèce par la citation directe délivrée aux prévenus, d'un refus de communication de documents non pas au comité central d'entreprise sur le fondement de l'article L. 431-5 du Code du travail, mais aux membres de la commission de formation sur le fondement de l'article L. 933-3 alinéa 6 ; que, dès lors, la discussion quant à la détermination du lieu de l'infraction portait exclusivement sur le choix entre le lieu de l'envoi des documents, c'est-à-dire le siège social de la BRED, et le lieu où les documents auraient dû être reçus et que par conséquent en retenant la compétence du tribunal de Créteil, lieu du siège du comité central d'entreprise, la cour d'appel a méconnu sa saisine " ;
Attendu que, pour écarter l'exception d'incompétence territoriale soulevée par les prévenus, l'arrêt attaqué se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, les juges ont justifié leur décision sans encourir les griefs allégués, dès lors que les faits poursuivis, consistant notamment en une communication incomplète ou tardive des documents énumérés par l'article D. 932-1 du Code du travail, sont réputés commis au lieu où cette obligation aurait dû recevoir exécution, c'est-à-dire au siège du comité central d'entreprise, Créteil, et de la commission qui en est l'émanation ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 434-3 et L. 933-3, alinéa 1 du Code du travail, des articles 388, 512, 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables d'entrave au fonctionnement régulier du comité central d'entreprise pour défaut de tenue d'une seconde réunion sur le fondement de l'article L. 933-3, alinéa 1 du Code du travail et a alloué des dommages-intérêts au comité central d'entreprise de la BRED-Banque Populaire ;
" aux motifs, adoptés, que l'article L. 933-3 du Code du travail prévoit que la consultation du comité d'entreprise sur l'exécution du plan de formation de l'entreprise de l'année précédente et sur le projet de plan pour l'année à venir se fait au cours de deux réunions spécifiques, l'article D. 932-2 précisant qu'au cours de la seconde réunion, a lieu la délibération relative au plan de formation ;
" Qu'en l'espèce, une réunion a été convoquée les 30 novembre et 1er décembre pour examiner le plan de formation 1994, réunion au cours de laquelle le président de la commission de la formation professionnelle a préconisé, au nom de la commission, au comité central de refuser d'émettre un avis, considérant que la procédure d'information préalable n'avait pas été respectée et la consultation du comité irrégulière ; les élus du comité central d'entreprise ont demandé la réunion d'un comité central d'entreprise extraordinaire ;
" Qu'il est établi que François-Xavier de X... s'est opposé à la tenue d'une deuxième réunion tout en reconnaissant que les documents avaient été transmis avec retard et qu'un effort serait fait à l'avenir ;
" Que s'il est également établi que le règlement intérieur du comité central d'entreprise prévoit qu'au cours de la séance du comité central d'entreprise du mois de novembre (article 25, alinéa 253), le président présente au comité central le plan de formation professionnelle prévu pour l'exercice suivant, il s'agit simplement d'un usage dérogatoire à la loi et ne pouvant fonder le refus du président d'organiser une deuxième réunion ;
" et, aux motifs propres, que François-Xavier de X... a refusé de procéder à la seconde réunion exigée par l'article D. 932-2 du Code du travail ;
" 1o Alors que les juges correctionnels ne peuvent légalement statuer que sur les faits relevés par l'ordonnance ou la citation qui les a saisis ; que le Code du travail prévoit, relativement à la " tenue d'une seconde réunion du comité d'entreprise ", deux dispositions distinctes, celle de l'article L. 434-3 qui a trait à la tenue d'une réunion extraordinaire à la demande de la majorité des membres composant le comité d'entreprise et celle de l'article L. 933-3, alinéa 1 qui prévoit que la consultation annuelle du comité d'entreprise sur l'exécution du plan de formation du personnel de l'entreprise de l'année précédente et sur le projet de plan pour l'année à venir, se fait au cours de deux réunions distinctes ; que la citation délivrée aux demandeurs à la requête du comité central d'entreprise de la BRED leur faisait reproche, non pas de ne pas avoir tenu la seconde réunion prévue par l'article L. 933-3, alinéa 1, mais d'avoir refusé de tenir la réunion d'un comité central d'entreprise extraordinaire " pour poursuivre les travaux d'étude de formation professionnelle " après que François-Xavier de X... ait quitté la salle du comité central d'entreprise laissant M. Z... le relayer à la présidence, et qu'en se saisissant comme l'y invitait la partie civile dans ses conclusions, du délit distinct " d'opposition à l'organisation de la seconde réunion spécifique prévue par les articles L. 933-3, alinéa 1, et D. 932-2 du Code du travail " en dehors de toute comparution volontaire des prévenus, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et méconnu les droits de la défense ;
" 2o Alors que le délit d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise pour défaut de tenue de la réunion extraordinaire visée à l'article L. 434-3 du Code du travail, nécessite pour être constitué, l'existence d'un vote majoritaire du comité d'entreprise et que l'arrêt attaqué qui n'a pas relevé que le refus de la direction ait été précédé d'un tel vote, n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article L. 933-3, alinéa 6 du Code du travail, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean Y... et François-Xavier de X... coupables d'entrave au fonctionnement du comité central d'entreprise pour communication tardive de documents en ce qui concerne l'examen du plan de formation et a alloué des dommages-intérêts au comité central d'entreprise de la BRED-Banque Populaire ;
" alors qu'aux termes de l'article L. 933-3, alinéa 6, du Code du travail " afin de permettre aux membres du comité d'entreprise et le cas échéant aux membres de la commission prévue à l'article L. 434-7 de participer à l'élaboration du plan de formation et de préparer les délibérations dont il fait l'objet, le chef d'entreprise leur communique, trois semaines au moins avant les réunions du comité ou de la commission précités, les documents d'information dont la liste est établie par décret ; ces documents sont également communiqués aux délégués syndicaux " ; que dans ses conclusions régulièrement déposées devant la Cour, les demandeurs faisaient valoir que la direction avait adressé au président de la commission de la formation professionnelle, M. A..., selon la pratique en vigueur à la BRED et à charge pour lui de les faire parvenir sous sa responsabilité et à bonne date aux membres de la commission, les éléments permettant de faire le point sur l'exécution du plan de formation 1993 dès le 14 octobre 1993 pour une réunion qui s'est tenue le 9 novembre 1993, soit près de 4 semaines avant celle-ci ; qu'un envoi complémentaire avait été effectué le 19 octobre relativement à la situation à l'égard des congés individuels de formation, des bilans de compétence et de l'apprentissage, enfin les orientations du plan de formation de l'année à venir, 1994, dès le 20 octobre 1993, pour une réunion qui s'est tenue le 16 novembre 1993, soit près de 4 semaines avant celle-ci et qu'en se bornant, pour entrer en voie de condamnation à l'encontre des demandeurs, à faire état de ce " qu'au cours de la séance du 16 novembre 1993, le président, M. A..., avait précisé que les membres de la commission n'avaient pas eu communication de l'ensemble des documents qui devaient leur être fournis ainsi qu'aux membres du comité conformément à l'article D. 932-1 du Code du travail ; que M. A... a ajouté que, de plus le projet de plan de formation n'avait été envoyé que 5 jours avant la tenue de la réunion ne laissant pas un délai suffisant aux membres de la commission pour préparer leurs remarques et participer à l'élaboration du plan de formation définitif ", sans répondre aux chefs péremptoires précisés des conclusions des demandeurs, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision de condamnation " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que François-Xavier de X... et Jean Y..., respectivement président et directeur général de la BRED, ont été poursuivis sous la prévention d'entrave au fonctionnement régulier du comité central d'entreprise pour avoir, d'une part, transmis tardivement les documents nécessaires à l'information dudit comité relative à la formation professionnelle, d'autre part, refusé d'organiser la seconde réunion spécifique de consultation prévue par l'article L. 933-3 du Code du travail ;
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de ces chefs, les juges relèvent, par motifs propres et adoptés que, lors de la réunion du 16 novembre 1993, le président de la commission de la formation professionnelle a précisé que l'ensemble des documents prévus par l'article D. 932-1 du Code du travail n'avait pas été adressé aux membres de ladite commission, préparant la consultation du comité central d'entreprise, et que le projet de plan de formation pour l'année 1994 n'avait été envoyé que 5 jours avant la tenue de la réunion ; que certains documents importants n'ont été communiqués qu'après les réunions des 9 et 16 novembre ; qu'ils ajoutent qu'en dépit de la demande formée par les membres du comité central d'entreprise lors de la réunion du 30 novembre 1993, François-Xavier de X... s'était opposé à la tenue d'une seconde réunion tout en reconnaissant que les documents avaient été transmis avec retard ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui répondent sans insuffisance aux conclusions des prévenus, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ;
Que, par ailleurs, les juges, qui n'étaient saisis que du refus d'organisation de la seconde réunion prévue par l'article L. 933-3 du Code du travail, n'avaient pas à rechercher si les conditions d'application de l'article L. 434-3 dudit Code, au demeurant inapplicable au comité central d'entreprise, étaient remplies en l'espèce ;
Qu'ainsi les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-81477
Date de la décision : 13/01/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° TRAVAIL - Comité d'entreprise - Prérogatives légales - Attributions consultatives - Consultation sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise - Communication des documents énumérés par l'article D - du Code du travail - Défaut - Délit d'entrave - Compétence - Compétence territoriale - Lieu du siège social du comité.

1° COMPETENCE - Compétence territoriale - Délit complexe - Lieu où s'est accompli un acte caractérisant un de ses éléments constitutifs.

1° Le délit d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise, en ce qu'il consiste notamment en une communication incomplète ou tardive des documents énumérés par l'article D. 932-1 du Code du travail, préalable à la consultation de cet organisme sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise, est réputé commis au lieu où cette obligation aurait dû recevoir exécution, soit au siège social du comité et de la commission qui en est l'émanation.

2° TRAVAIL - Comité d'entreprise - Prérogatives légales - Attributions consultatives - Consultation sur les orientations de la formation professionnelle dans l'entreprise - Délit d'entrave - Eléments constitutifs.

2° Déclare à bon droit un chef d'entreprise coupable d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise l'arrêt qui retient que le prévenu a transmis tardivement les documents nécessaires à l'information dudit comité relative à la formation professionnelle et a refusé d'organiser la seconde réunion spécifique de consultation prévue par l'article L. 933-3 du Code du travail.


Références :

2° :
Code du travail D932-1, L933-3

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 04 mars 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 jan. 1998, pourvoi n°96-81477, Bull. crim. criminel 1998 N° 16 p. 35
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1998 N° 16 p. 35

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Milleville, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Batut.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, M. Brouchot.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.81477
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