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18/11/1997 | FRANCE | N°96-80942

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 18 novembre 1997, 96-80942


REJET du pourvoi formé par :
- X... Jacky,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 16 janvier 1996, qui l'a condamné, pour entrave à la libre désignation des délégués du personnel, à 2 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 425-1 du Code du travail, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné Jacky X... pour licenciement d'un salarié sans autorisation préa

lable de l'inspecteur du travail, en méconnaissance des dispositions de l'article L....

REJET du pourvoi formé par :
- X... Jacky,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 16 janvier 1996, qui l'a condamné, pour entrave à la libre désignation des délégués du personnel, à 2 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 425-1 du Code du travail, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné Jacky X... pour licenciement d'un salarié sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-1 du Code du travail ;
" aux motifs qu'il est constant que Manuel Y... a, le 7 novembre 1991, demandé à la direction de la SAEM d'organiser des élections de délégués du personnel ; que le prévenu ne peut donc être retenu dans les liens de la prévention, pour avoir licencié Manuel Y... le 27 mai 1992, soit plus de 6 mois après la demande du 7 novembre 1991 ;
" que, pour protéger les candidats aux élections de délégués du personnel, l'article L. 425-1 du Code du travail soumet le licenciement de ces candidats à l'autorisation de l'inspecteur du travail pendant une durée de 6 mois ; que le point de départ de cette durée de 6 mois est ainsi défini au 7e alinéa du même article en ces termes :
" à partir de la publication des candidatures ; la durée de 6 mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée à l'employeur, des listes de candidatures " ;
" que le prévenu ne peut attribuer à la lettre recommandée une condition d'application de la protection des salariés que l'article L. 425-1 du Code du travail n'a pas prévue ;
" qu'il faut comprendre qu'en réalité l'article L. 425-1 du Code du travail fixe le point de départ de la durée de protection de 6 mois au plus tôt à la date d'envoi des lettres recommandées à l'employeur et au plus tard à la publication des listes de candidatures, la première date étant, le cas échéant, retenue pour éviter que l'employeur ne licencie un candidat avant la publication de sa candidature ;
" que Jacky X..., chef d'entreprise, ne pouvait ignorer les dispositions de l'article L. 425-1 du Code du travail qu'il a méconnues en connaissance de cause ; " en fait, il y a eu confusion dans les dates, je l'ai licencié (Manuel Y...) quelques jours trop tôt " devait d'ailleurs honnêtement déclarer le prévenu aux services de police (C 4) ;
1° " alors que la période de protection de 6 mois applicable au salarié ayant demandé l'organisation de l'élection professionnelle (cas prévu par l'article L. 425-1, alinéa 8, du Code du travail, et la protection applicable au candidat (battu) à cette même élection (cas prévu par l'article L. 425-1, alinéa 7, du même Code), ont le même objet et ne sauraient se cumuler ; que seule la période de protection la plus favorable au salarié, c'est-à-dire celle qui prend effet le plus tôt, lui est applicable ; qu'en conséquence, Manuel Y..., qui avait bénéficié de la protection de 6 mois à compter du 7 novembre 1991 en qualité de salarié ayant sollicité l'organisation de l'élection, ne pouvait revendiquer l'application d'une telle protection après le 7 mai 1992 pour s'être porté ultérieurement candidat à cette même élection ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui a constaté que le licenciement de Manuel Y... était survenu le 27 mai 1992, soit plus de 6 mois après la demande d'organisation du scrutin faite par ce salarié à la date du 7 novembre 1991, ne pouvait retenir l'employeur dans les liens de la prévention ;
2° " alors qu'à supposer même que le salarié ait pu bénéficier d'une nouvelle période de protection prenant effet à compter de sa candidature aux élections de délégué du personnel, cette protection de 6 mois ne pouvait courir, conformément à l'article L. 425-1, alinéa 7, qu'à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée des listes de candidatures ; qu'en considérant que l'envoi d'une telle lettre ne constituait pas une condition d'application de la protection si bien que la protection de 6 mois applicable au candidat aux élections de délégués du personnel pouvait bénéficier à Manuel Y... même en l'absence du respect de cette formalité, l'arrêt a méconnu les conditions posées par l'article L. 425-1, alinéa 7, du Code du travail ;
3° " alors de plus, qu'à défaut d'envoi d'une lettre recommandée marquant le point de départ de la protection de 6 mois, la cour d'appel devait en tout état de cause déterminer à quelle date ladite protection avait pu prendre effet ; qu'en se bornant à indiquer que " la protection court au plus tôt à compter de l'envoi de la lettre recommandée et au plus tard de la publication des candidatures ", l'arrêt attaqué a statué par un motif général et n'a pas justifié légalement sa décision ;
" 4° " alors que le demandeur faisait subsidiairement valoir dans ses conclusions, que la protection de 6 mois bénéficie au salarié-candidat ayant présenté une candidature régulière ; que tel n'est pas le cas du salarié dont la candidature a été publiée de façon prématurée, avant la signature du protocole d'accord préélectoral ; qu'en s'abstenant de rechercher si Manuel Y..., dont la candidature avait été posée le 13 décembre 1991, soit avant la signature du protocole préélectoral intervenue le 16 décembre suivant, pouvait, néanmoins, bénéficier de la protection de 6 mois, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;
5° " alors que la cour d'appel ne pouvait déduire le caractère intentionnel de l'infraction, de l'aveu par le prévenu d'une confusion commise par lui dans les dates, quand cette déclaration révélait tout au contraire la parfaite bonne foi du prévenu et l'absence de tout caractère intentionnel du délit ; qu'en retenant, néanmoins, en l'état de cette déclaration l'existence d'une infraction commise en connaissance de cause, l'arrêt a là encore violé le texte susvisé " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Manuel Y..., salarié d'une société dirigée par Jacky X..., a demandé par lettre du 7 novembre 1991, confirmée par un courrier du même jour du syndicat CGT-FO, l'organisation des élections de délégués du personnel ; qu'il a déclaré sa candidature à ces fonctions par lettre du 13 décembre 1991 et que l'accord préélectoral est intervenu le 16 décembre 1991 ; qu'il n'a été élu ni au premier tour, le 20 décembre 1991, ni au second tour le 23 décembre ; que, par courrier du 15 juin 1992, Jacky X... a sollicité l'autorisation de licencier Manuel Y... auprès de l'inspecteur du travail qui, constatant que ce licenciement avait été notifié à l'intéressé par lettre recommandée du 27 mai 1992, a dressé procès-verbal ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'entrave à la libre désignation des délégués du personnel, l'arrêt infirmatif attaqué se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui caractérisent en tous ses éléments constitutifs, y compris intentionnel, le délit poursuivi, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'en effet, d'une part, le fait que l'intéressé ait pu initialement bénéficier de la protection résultant de l'alinéa 8 de l'article L. 425-1 du Code du travail due aux salariés qui ont pris l'initiative de demander l'organisation des élections ne saurait le priver de la protection prévue par l'alinéa 5 à compter de sa candidature aux élections ;
Que, d'autre part, la notification de candidature à l'employeur, antérieurement à l'accord préélectoral, est de nature à établir la connaissance par celui-ci de l'imminence de cette candidature et constitue le point de départ de la protection due en application de l'alinéa 5 de l'article précité du Code du travail ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses deuxième, troisième et quatrième branches, est mal fondé pour le surplus et ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 96-80942
Date de la décision : 18/11/1997
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° TRAVAIL - Salariés spécialement protégés - Délégués du personnel - Licenciement - Protections successives.

1° Le fait pour un salarié de bénéficier de la protection résultant de l'alinéa 8 de l'article L. 425-1 du Code du travail, due aux travailleurs qui ont pris l'initiative de demander l'organisation des élections, ne saurait le priver par la suite de la protection prévue par l'alinéa 5, à compter de sa candidature aux élections.

2° TRAVAIL - Salariés spécialement protégés - Délégués du personnel - Atteinte à l'exercice régulier de leurs fonctions - Licenciement - Procédure spéciale - Point de départ de la protection - Candidat - Candidature imminente.

2° La notification de candidature à l'employeur, antérieurement à l'accord préélectoral, est de nature à établir la connaissance par celui-ci de l'imminence de cette candidature et constitue le point de départ de la protection due en application de l'alinéa 5 de l'article précité du Code du travail(2).


Références :

Code du travail L425-1 al. 5

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 16 janvier 1996

CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre Criminelle, 1988-06-21, Bulletin criminel 1988, n° 283, p. 756 (rejet), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1996-12-03, Bulletin criminel 1996, n° 444, p. 1299 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 18 nov. 1997, pourvoi n°96-80942, Bull. crim. criminel 1997 N° 391 p. 1313
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1997 N° 391 p. 1313

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Milleville, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Dintilhac.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Gatineau.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1997:96.80942
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