Attendu que, par un acte du 1er octobre 1978, M. X..., propriétaire exploitant de la Polyclinique X..., aux droits de qui se trouvent aujourd'hui ses héritiers, qui ont fait apport du fonds de commerce de la clinique à la société Clinique
X...
(la Clinique), a confié à MM. Z... et Y... un secteur de cardiologie intensive et mis à leur disposition exclusive huit lits équipés et un cabinet médical comportant locaux et matériel instrumental courant ; que, après différents échanges de lettres liés à l'intention de la Clinique de recruter un chirurgien vasculaire et de créer un service de réanimation médicale dont huit lits seraient plus spécialement à orientation cardiologique, la société adressait, le 10 mai 1991, aux deux médecins une proposition de contrat qui se substituerait à celui du 1er octobre 1978, et les avertissait qu'en cas de refus elle mettrait un terme au contrat en vigueur " dans le respect de son article XV ", les informant qu'en tout cas leur " exclusivité de l'urgence cardiologique " deviendrait caduque le jour de l'ouverture du service de la réanimation polyvalente ; que, par une lettre du 6 août 1991, la Clinique, prenant acte de la " décision " des deux cardiologues de " rompre le contrat ", les avisait qu'il prendrait donc fin le 31 août 1991 et leur demandait de libérer les locaux qu'ils occupaient dans la Clinique ; que l'arrêt attaqué (Bastia, 8 décembre 1994) a condamné les consorts X... et la Clinique Comiti à payer à M. Z... et à M. Y... différentes sommes à titre, respectivement, d'indemnité de préavis, d'indemnité de rupture et de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé, aux torts exclusifs des consorts X... et de la Clinique Comiti, la résiliation des contrats conclus le 1er octobre 1978 entre la Clinique, M. Z... et M. Y..., alors, selon le moyen, que la cour d'appel ayant retenu que, si les médecins ont défendu leur intérêt légitime sans intention de nuire, de son côté la Clinique pouvait légitimement entreprendre une extension de son domaine d'activité impliquant la rupture du contrat avec ceux-ci, cette motivation excluait nécessairement que cette résiliation pût être prononcée aux torts de la Clinique, quitte à celle-ci à être redevable des indemnités conventionnelles, et que l'arrêt a donc violé les articles 1134 et 1184 du Code civil ;
Mais attendu que l'intérêt légitime de rompre reconnu par l'arrêt à la Clinique n'excluait pas que celle-ci pût être tenue pour seule responsable de la rupture des relations contractuelles entre les parties ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer les termes de la clause XV du contrat, allouer aux médecins une indemnité de préavis distincte du forfait fixé par les parties et d'un montant calculé selon des modalités étrangères aux stipulations de la convention ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé des condamnations de 2 840 676 francs à titre d'indemnité de préavis au profit de M. Z... et de 2 540 420 francs à titre d'indemnité de préavis au profit de M. Y..., l'arrêt rendu le 8 décembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.