REJET du pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes et Droits indirects, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 17 mai 1995, qui, dans la procédure suivie contre Aimée et Stéphan X..., Robert Y..., la société X... et la société Saumon P. Y..., du chef d'importation sans déclaration de marchandises prohibées, a relaxé les prévenus et débouté la partie poursuivante de ses demandes.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 342, 382, 395, 396, 404 à 407, 414, 426, 435 du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé les prévenus et mis hors de cause les sociétés X... et Saumon P. Y... ;
" aux motifs qu'au cours des précédentes importations des 19 mai 1987 et 9 octobre 1988, l'administration des Douanes a reconnu les déclarations déposées "conformes en espèces et origine" et validé la position tarifaire 1604 30 90, que les succédanés du caviar sous référence de la position douanière retenue peuvent être assaisonnés ; que tant la société Saumon P. Y... que son déclarant en douane ont pu, de bonne foi, considérer que la marchandise en cause entrait bien dans la catégorie 1604 30 90 et de mai 1987 à janvier 1990, étant observé que l'administration des Douanes ne pouvait ignorer la présence de benzoate de sodium puisqu'au vu des renseignements obtenus des fournisseurs, l'existence de conservateur était mentionné sur un certain nombre de barils et qu'en dépit des contrôles et analyses répétés de la marchandise par P. Y..., elle n'a pas formulé d'objection à la position tarifaire déclarée du produit importé ; que les prévenus sont de bonne foi ;
" alors que, dans ses conclusions d'appel, la demanderesse avait fait valoir que les importations des 19 mai 1987 et 9 octobre 1988 avaient été autorisées au vu des déclarations qui lui avaient été faites et que le contrôle, a posteriori, avait mis en évidence que certains fûts ne comportaient pas de benzoate de sodium, qu'il n'était donc pas établi que ces importations fussent irrégulières, raison pour laquelle elle avait abandonné cette partie des poursuites, qu'elle ajoutait que les marchandises importées en 1989 et 1990 contenaient, en revanche, du benzoate de sodium ; qu'en déduisant, d'une part, de la reconnaissance par le service des Douanes que les déclarations déposées pour les importations de 1987 et de 1988 étaient conformes en espèces et origines et la validation de la position tarifaire et, d'autre part, de la prétendue connaissance par le service depuis mai 1987 de la présence de ce conservateur mentionné sur les barils que les prévenus avaient pu, de bonne foi, considérer que la marchandise entrait bien dans la position tarifaire 1604 30 90, et ce de mai 1987 à janvier 1990, la cour d'appel a violé l'article 426-4 du Code des douanes ;
" alors que les succédanés du caviar relevant de la position 1604 30 90 peuvent être "simplement salés ou en saumure" ; qu'en estimant que les marchandises comportant du benzoate de sodium, qui est un conservateur, relevaient de la position tarifaire susvisée aux motifs que les succédanés du caviar peuvent être assaisonnés, la cour d'appel a violé cette position tarifaire " ;
Attendu que la société Saumon P. Y... a procédé à des importations de barils d'oeufs de lump en saumure, totalisant 35 000 kg et représentant une valeur de 889 250 francs, les 4 juin 1989 et 10 janvier 1990 ;
Que cette marchandise a été déclarée, par l'intermédiaire de la société X... et Cie, à la sous-position tarifaire 1604 30 90, comme " oeufs de poissons, lavés, débarrassés des parcelles d'entrailles adhérentes, salés ou en saumure " ;
Qu'en raison de la présence de benzoate de sodium dans certains barils, utilisé comme agent conservateur, l'administration des Douanes a estimé que la marchandise importée ne répondait pas aux conditions de classement de la sous-position tarifaire 1604 30 90 et a cité l'importateur et le commissionnaire en douane, sur le fondement de l'article 426.4° du Code des douanes et du règlement 1522/89/CEE du 30 mai 1989, du chef de fausses déclarations d'espèce ayant eu pour effet d'obtenir une exonération de droits à l'importation ;
Attendu que, pour renvoyer les prévenus des fins de la poursuite, les juges relèvent que les succédanés de caviar relevant de la sous-position tarifaire 1604 30 90 peuvent se présenter, selon les notes explicatives de la nomenclature douanière, non seulement conservés dans une saumure, mais encore assaisonnés et colorés, de telle sorte que l'importateur et le déclarant en douane ont pu considérer qu'indépendamment de la présence de benzoate de sodium qui est un produit légalement utilisé en France pour la conservation des aliments , les oeufs de lump importés entraient dans cette catégorie ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer de la légalité de la décision prononcée ;
Qu'en effet les notes explicatives du système harmonisé de classement, relatives à la sous-position tarifaire 1604 30 90 du tarif douanier commun à laquelle se réfère le règlement communautaire 1522/89, base des poursuites, précisent que cette sous-position comprend des préparations alimentaires faites à base d'oeufs de poissons lavés, débarrassés des parcelles d'entrailles adhérentes, salés, voire pressés ou séchés qui peuvent être également assaisonnées et colorées ;
Que ces spécifications impliquent la possibilité d'utiliser les additifs alimentaires, légalement autorisés dans la Communauté, nécessaires à la conservation de ces préparations, une telle adjonction n'étant pas de nature à faire perdre au produit son caractère essentiel au sens de la règle générale d'interprétation A 3 b du tarif douanier commun ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 369-4 et 377 bis du Code des douanes, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a débouté la demanderesse de sa demande en paiement de la somme de 281 447 francs, montant des droits et taxes éludés ;
" alors qu'il résulte des articles 369-4 et 377 bis du Code des douanes, dans sa rédaction issue de l'article 36 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1991, que la juridiction répressive, lorsqu'elle est saisie d'une demande de l'administration des Douanes, ne peut, même en cas de relaxe, dispenser le redevable des sommes fraudées ou indûment obtenues ; qu'en l'espèce la demanderesse faisait valoir que, dès lors qu'il n'était pas contesté que les produits importés comportaient un conservateur, ce que la Cour a constaté, ils ne pouvaient bénéficier de l'exonération des droits, et demandait la condamnation des prévenus au paiement des droits éludés ; qu'en la déboutant de cette demande la cour d'appel a violé les articles susvisés " ;
Attendu que l'administration des Douanes ne saurait faire grief à la cour d'appel d'avoir, après relaxe, refusé de condamner les prévenus au paiement des droits dont l'importateur avait obtenu l'exonération, dès lors que les dispositions de l'article 377 bis, alinéa 2, du Code des douanes, qui prévoient que, même lorsqu'elle ne prononce aucune condamnation, la juridiction répressive reste compétente pour ordonner le paiement des sommes fraudées ou indûment obtenues, ne trouvent pas à s'appliquer en l'absence de fraude établie ou d'avantages indûment perçus ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme :
REJETTE le pourvoi.