Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'Auguste X... est décédé le 22 avril 1982 ; que, par acte sous seing privé du 20 août 1975, il avait cédé le cheptel de son exploitation agricole à son fils Paul X... moyennant un prix tenant compte de sa créance de salaire différé ; que cette convention a été signée en présence de l'épouse de celui-ci, Mme Y... ; que tous les enfants d'Auguste X... étaient intervenus à l'acte qui énonce que ceux-ci " reconnaissent, ainsi que M. X... Paul, que, par les présentes, se trouve réglée définitivement entre eux la question du salaire différé auquel chacun pouvait prétendre " ; que Mme Y... a demandé à la succession paiement d'un salaire différé pour avoir participé, avec son mari, à l'exploitation agricole de ses beaux-parents du 15 octobre 1971 au 1er novembre 1974 ;
Sur la première branche du moyen unique :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu que, pour rejeter la demande, la cour d'appel a décidé qu'au-delà du sens littéral de la convention de 1975, qui mettait fin à toute discussion sur le salaire différé pouvant être dû aux enfants X..., la commune intention de toutes les parties signataires, y compris de Mme Y..., était de renoncer à faire valoir ultérieurement un quelconque droit à salaire différé ;
Attendu, cependant, que les juges du fond ne peuvent interpréter les conventions que si celles-ci sont obscures ou ambiguës ; qu'en se référant à la commune intention des parties pour interpréter la convention et décider que celle-ci interdisait à Mme Y... de revendiquer une créance de salaire différé, alors qu'elle constatait que littéralement cet acte n'envisageait que la créance de salaire différé des enfants X..., la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur la deuxième branche du moyen :
Vu l'article L. 321-17, alinéa 1er, du Code rural, ensemble l'article 6 du Code civil ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que le bénéficiaire d'un contrat de salaire différé ne peut renoncer, du vivant de l'exploitant, aux droits qu'il tient de la loi et qu'il ne pourra exercer qu'après le décès de celui-ci et au cours du règlement de la succession ;
Attendu que, pour débouter Mme Y... de sa demande de paiement d'un salaire différé, la cour d'appel a retenu que celle-ci avait renoncé à faire valoir postérieurement à l'acte du 20 août 1975 son droit à un salaire différé ;
Qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée.