CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- la chambre syndicale des opticiens des Alpes-Provence-Côte d'Azur, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, du 2 mars 1995, qui, après relaxe définitive de Georges X... pour exercice illégal de la profession d'opticien-lunetier, l'a débouté de ses demandes.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé Georges X... du chef d'exercice illégal de la profession d'opticien-lunetier ;
" aux motifs que la profession d'opticien-lunetier est réglementée par les articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique qui ne comportent aucune définition précise des objets dont la vente est réservée aux opticiens-lunetiers ; qu'en l'état de l'imprécision de la réglementation et au regard de l'obligation faite au juge répressif d'interpréter strictement la loi pénale, il n'apparaît pas possible de dire que la vente de verres porte-loupes est réservée aux seuls opticiens-lunetiers ;
" alors qu'il résulte clairement des dispositions des articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique que la fabrication et la mise en vente des verres correcteurs des anomalies de la vision sont interdites aux personnes qui ne remplissent pas les conditions requises pour l'exercice de la profession d'opticien-lunetier ; que l'arrêt attaqué, qui constate expressément que les verres-loupes mis à la vente par le prévenu "étaient destinés à corriger les troubles de l'oeil" et notamment "l'hypermétropie", ce qui impliquait nécessairement qu'il s'agissait de verres correcteurs dont la vente est réservée aux seuls opticiens-lunetiers, ne pouvait, sous prétexte de l'imprécision prétendue du texte, refuser d'entrer en voie de condamnation sans violer les textes précités " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte des articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique que la fabrication et la mise en vente des verres correcteurs des anomalies de la vision sont interdites aux personnes ne remplissant pas les conditions requises par ces textes pour exercer la profession d'opticien-lunetier ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Georges X..., commerçant, a mis en vente, sous la dénomination de porte-loupes, des lunettes destinées " aux personnes qui distinguent avec difficulté les petits caractères " ; que, ne satisfaisant pas aux conditions exigées pour l'exercice de la profession d'opticien-lunetier, il a été poursuivi pour infraction aux textes précités ;
Attendu que, pour réformer la décision du premier juge, prononcer la relaxe du prévenu et débouter la partie civile de ses demandes, les juges du second degré, après avoir admis qu'au-delà des simples troubles de l'accommodation de l'oeil, les verres porte-loupes pouvaient " théoriquement " corriger l'hypermétropie, " déficience liée au pouvoir de réfraction du segment antérieur de l'oeil ", énoncent qu'en l'état des articles L. 505 et L. 508 du Code de la santé publique, qui ne comportent aucune incrimination précise des objets dont la vente est réservée aux opticiens-lunetiers, et " au regard de l'obligation faite au juge répressif par l'article 111-4 nouveau du Code pénal d'interpréter strictement la loi pénale, il n'apparaît pas possible de dire que la vente de verres porte-loupes est réservée aux seuls opticiens-lunetiers " ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les verres porte-loupes mis en vente par le prévenu présentaient le caractère de verres correcteurs d'une anomalie de la vision, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
D'où, il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions civiles, l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 2 mars 1995, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier.