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24/01/1996 | FRANCE | N°94-11028

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 janvier 1996, 94-11028


Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Sandrine X..., handicapée mentale âgée de 16 ans, a été déflorée par un autre handicapé mental dans les locaux de l'IME géré par l'ADAPEI de Caen ; que ses parents, en son nom et à titre personnel, ont demandé à l'association réparation de leurs préjudices respectifs ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la réparation du préjudice de Sandrine X..., alors, selon le moyen, que, faute de s'être expliqués sur les conditions dans lesquelles les faits se sont déroulés pour rechercher

si la jeune Sandrine X... n'avait pas subi un préjudice, notamment pour avoir subi de...

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Sandrine X..., handicapée mentale âgée de 16 ans, a été déflorée par un autre handicapé mental dans les locaux de l'IME géré par l'ADAPEI de Caen ; que ses parents, en son nom et à titre personnel, ont demandé à l'association réparation de leurs préjudices respectifs ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir limité la réparation du préjudice de Sandrine X..., alors, selon le moyen, que, faute de s'être expliqués sur les conditions dans lesquelles les faits se sont déroulés pour rechercher si la jeune Sandrine X... n'avait pas subi un préjudice, notamment pour avoir subi des relations sexuelles sans être en mesure de donner son consentement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Mais attendu que l'arrêt retient que ce premier rapport peut être de nature pour Sandrine X... à lui en faire rechercher d'autres, ce qui amenait à considérer qu'il était nécessaire d'envisager la cessation de toute promiscuité entre elle et son partenaire d'un jour, et que, celui-ci ayant été réintégré dans l'établissement, Sandrine s'en trouvait exclue de fait ;

Que, de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, justifiant légalement sa décision, a pu déduire que le préjudice de la jeune Sandrine résidait dans la rupture de la continuité de sa prise en charge dans le seul établissement voisin du domicile de ses parents et la perte de la chance qu'elle avait de continuer à y effectuer certains progrès ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article 1382, ensemble l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil ;

Attendu que, pour rejeter la demande des parents en réparation de leur préjudice moral consécutif aux relations sexuelles subies par leur fille et de leur préjudice matériel constitué par les frais de déplacement occasionnés par la nécessité de lui faire fréquenter un autre établissement, l'arrêt énonce que ces préjudices présentent un caractère par trop indirect pour pouvoir être indemnisés ;

Qu'en statuant ainsi, tout en retenant qu'elle considérait qu'il était nécessaire d'envisager la cessation de toute promiscuité entre Sandrine et son partenaire d'un jour, ce dont il résultait que les préjudices invoqués par les parents étaient en relation directe avec les faits dont l'établissement avait été déclaré responsable, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement sur le préjudice des parents, l'arrêt rendu le 10 décembre 1992, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 94-11028
Date de la décision : 24/01/1996
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

1° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Indemnité - Montant - Fixation - Eléments pris en considération - Handicapée mentale âgée de 16 ans - Premier rapport avec un autre handicapé mental du même établissement - Exclusion de l'établissement pour éviter toute promiscuité.

1° Est légalement justifié l'arrêt qui, pour fixer la réparation, à la charge d'une association, du préjudice subi par une handicapée mentale âgée de 16 ans ayant été déflorée par un autre handicapé mental, retient que ce premier rapport peut être de nature pour la victime à lui en faire rechercher d'autres, ce qui amenait à considérer qu'il était nécessaire d'envisager la cessation de toute promiscuité entre elle et son partenaire d'un jour et que, celui-ci ayant été réintégré dans l'établissement, la victime s'en trouvait exclue de fait, et déduit de ces constatations et énonciations que le préjudice résidait dans la rupture de la continuité de la prise en charge de la victime dans le seul établissement voisin du domicile de ses parents et la perte d'une chance qu'elle avait de continuer à y effectuer certains progrès.

2° RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Préjudice direct - Handicapée mentale âgée de 16 ans - Premier rapport avec un autre handicapé du même établissement - Préjudice subi par les parents.

2° Ne tire pas les conséquences de ses propres constatations l'arrêt qui rejette la demande des parents en réparation de leur préjudice moral consécutif aux relations sexuelles subies par leur fille et de leur préjudice matériel constitué par les frais de déplacement occasionnés par la nécessité de lui faire fréquenter un autre établissement, en énonçant que ces préjudices ont un caractère trop indirect pour pouvoir être indemnisés alors qu'elle retenait qu'elle considérait qu'il était nécessaire d'envisager la cessation de toute promiscuité entre l'enfant et son partenaire d'un jour, ce dont il résultait que les préjudices invoqués étaient en relation directe avec les faits dont l'établissement avait été déclaré responsable.


Références :

2° :
Code civil 1382, 1384 al. 1

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 10 décembre 1992


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 jan. 1996, pourvoi n°94-11028, Bull. civ. 1996 II N° 16 p. 11
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1996 II N° 16 p. 11

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Zakine .
Avocat général : Avocat général : M. Joinet.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Dorly.
Avocat(s) : Avocats : MM. Foussard, Vuitton.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1996:94.11028
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