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19/10/1995 | FRANCE | N°94-80717

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 octobre 1995, 94-80717


REJET du pourvoi formé par :
- X... Maurice,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 18 novembre 1993, qui, pour infraction douanière, l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à diverses pénalités.
LA COUR,
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur les faits :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'une enquête diligentée courant 1984, l'administration des Douanes, estimant que Maurice X... était le véritable propriétaire du navire " Lady

Jersey ", battant pavillon britannique comme ayant été acquis pour son compte le 11 m...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Maurice,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5e chambre, en date du 18 novembre 1993, qui, pour infraction douanière, l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à diverses pénalités.
LA COUR,
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur les faits :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'une enquête diligentée courant 1984, l'administration des Douanes, estimant que Maurice X... était le véritable propriétaire du navire " Lady Jersey ", battant pavillon britannique comme ayant été acquis pour son compte le 11 mai 1981 à une société panaméenne par la société jersiaise " Transhutton Limited ", et ayant fait l'objet d'une déclaration d'importation enregistrée à Cannes, l'a poursuivi sous la prévention d'avoir constitué et détenu irrégulièrement un avoir à l'étranger et d'avoir fait séjourner un navire dans les eaux territoriales sous le couvert de documents de bord ou de titre de nationalité inapplicables, délit réputé importation sans déclaration de marchandise prohibée, prévu et réprimé par les articles 414 et 427 du Code des douanes ;
Que Maurice X... a régulièrement soulevé diverses exceptions de nullité de la procédure auxquelles le tribunal correctionnel a fait droit ; que sur appel du ministère public et de l'administration des Douanes, la cour d'appel, par l'arrêt attaqué, a infirmé le jugement, constaté l'extinction de l'action publique en ce qui concerne l'infraction à la réglementation des relations financières avec l'étranger et reconnu le prévenu coupable de l'infraction douanière ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation et fausse application des articles 65, 323, 334, 338 et 365 du Code des douanes ainsi que des articles 28 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté les exceptions de nullité des procès-verbaux établis par les agents des Douanes les 2, 4, 9, 11, 22 mai 1984, et 5 juillet 1984 (procès-verbaux n os 1, 2, 3, 4, 7, 10 et 11) ;
" aux motifs que " c'est en l'absence de saisie de la marchandise (en l'occurrence du Lady Jersey) " que les agents des Douanes ont régulièrement procédé à l'audition de divers témoins, à savoir Y... (P. V. nos 1 et 5), Z... (P. V. n° 2), A... (P. V. n° 3), B... (P. V. n° 4), C... (P. V. n° 6), D... (P. V. n° 7), E... (P. V. n° 10), F... (P. V. n° 10) (sic) et appréhendé des documents que ceux-ci leur ont présentés pour justifier leurs déclarations ; qu'aucune disposition légale n'interdisait aux agents des Douanes agissant dans le cadre de l'article 342 du Code des douanes de prendre connaissance et d'appréhender en saisie des documents dont l'existence leur est révélée ; que c'est à tort que Maurice X... prétend que ces procès-verbaux d'audition de témoins seraient nuls pour révéler l'existence de saisies concomitantes nulles ; que c'est également à tort que les premiers juges ont cru faire droit à son (sic) moyen inopérant, alors surtout que les procès-verbaux litigieux comportaient bien toutes les mentions exigées à l'article 334, alinéa 2, du Code des douanes, une référence erronée à d'autres articles de ce Code n'étant pas de nature à les vicier ; qu'au surplus et de façon abondante, la décision des premiers juges apparaît d'autant plus infondée que les saisies jugées irrégulières intervenues ne pouvaient vicier les témoignages les ayant précédées (cf. arrêt p. 9 3e attendu) ;
" 1o) alors que les fonctionnaires et agents des administrations auxquels des lois spéciales attribuent certains pouvoirs de police judiciaire les exercent dans les conditions et les limites fixées par ces lois ; que les agents des Douanes ne tiennent de l'article 323 du Code des douanes le pouvoir de procéder à une saisie que lorsqu'ils constatent une infraction douanière ; qu'en refusant de prononcer l'annulation des procès-verbaux (nos 1, 2, 7 et 10) par lesquels les agents des Douanes avaient, en l'absence de toute constatation d'une infraction douanière et de toute saisie d'objets passibles de confiscation, procédé sur le seul fondement de l'article 323 du Code des douanes à la saisie de documents qui n'avaient pas, au demeurant, le caractère de documents relatifs à des objets saisis, au sens du 2o de ce texte, la cour d'appel, qui s'est fondée de façon inopérante sur les dispositions de l'article 342 du Code des douanes relatif à la liberté de preuve en matière douanière, a violé les textes visés au moyen ;
" 2o) alors que seuls les agents des Douanes ayant au moins le grade d'inspecteur ou d'officier peuvent, en vertu de l'article 65 du Code des douanes, exiger la communication des documents relatifs aux opérations intéressant leur service et procéder à leur saisie ; que, dans des conclusions demeurées sans réponse, le prévenu avait soutenu que les procès-verbaux (n os 1, 2, 7 et 10) par lesquels les agents des Douanes avaient procédé à la saisie des documents qu'ils s'étaient fait remettre, n'avaient pas été établis à supposer qu'ils fussent qualifiés de procès-verbaux de constat par des agents ayant le grade prescrit, non plus que les procès-verbaux (n os 3 et 4) par lesquels les agents des Douanes avaient exigé, sans procéder à leur saisie obligatoire dans le cadre de l'exercice normal du droit de communication et sans se référer à une disposition quelconque du Code des douanes, la remise d'autres documents ; que faute d'avoir répondu à ces conclusions qui démontraient la nullité des procès-verbaux et celle de toute la procédure subséquente, la cour d'appel a, pour cette raison encore, violé les textes visés au moyen ;
" 3o) alors que l'exercice du droit de communication que l'article 65 du Code des douanes confère aux agents de l'Administration suppose une communication volontaire des documents par les intéressés ; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions par lesquelles le prévenu invoquait la nullité du procès-verbal du 5 juillet 1984 (n° 11) dont les mentions n'établissaient pas que les documents dont il constatait la saisie avaient fait l'objet d'une remise volontaire par la personne entendue, la cour d'appel a, une fois encore, violé les textes visés au moyen " ;
Attendu qu'enquêtant sur l'identité du propriétaire du navire, les agents des Douanes ont entendu, par procès-verbaux de constat, différents témoins et saisi à cette occasion des documents, factures, livres de comptes et photocopies, détenus par ceux-ci ; que Maurice X... a soutenu que les procès-verbaux nos 1, 2, 7 et 10 selon lesquels les agents prononçaient la saisie desdits documents sur le fondement de l'article 323 du Code des douanes étaient nuls, ce texte n'autorisant une quelconque saisie que dans l'hypothèse de la constatation d'une infraction douanière ; qu'il a aussi prétendu que ces actes, de même que les procès-verbaux nos 3 et 4, étaient nuls pour avoir été établis par des agents n'ayant pas le grade d'inspecteur ou d'officier exigé par l'article 65 du Code des douanes ; qu'enfin, il a fait valoir que l'appréhension de documents en vertu du droit de communication suppose leur remise volontaire et a argué de nullité le procès-verbal nos 11, faute de mention expresse sur cette circonstance ;
Attendu que, pour écarter ces exceptions, la cour d'appel énonce que les agents des Douanes tiennent de l'article 342 du Code des douanes le pouvoir de constater les infractions, même en l'absence des saisies concomitantes de la marchandise, et qu'aucune disposition de ce Code ne leur interdit d'appréhender les documents dont l'existence leur est révélée aux cours de leurs investigations, le visa erroné de l'article 323 du Code précité n'étant pas de nature à vicier les actes régulièrement effectués ;
Attendu que si le moyen, en ses deux premières branches, critique avec raison la référence inappropriée à l'article 342 du Code des douanes, texte ayant pour seul objet de poser le principe de la liberté de la preuve en matière douanière, la décision n'en est pas moins justifiée dès lors que les agents des Douanes tiennent de l'article 334 du même Code le pouvoir de procéder à des enquêtes et à la saisie de documents, dans des conditions étrangères à l'exercice du droit de communication que leur confère l'article 65, comme c'était le cas en l'espèce ;
Qu'en outre, aucune disposition légale ne prévoit que le caractère volontaire de la remise de documents effectuée dans le cadre du droit de communication soit expressément constaté ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation et fausse application de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 6 § 2 de la Convention franco-monégasque du 14 avril 1945, des articles 64, 334 et 365 du Code des douanes, ainsi que de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a rejeté les exceptions de nullité des procès-verbaux établis par les agents des Douanes les 14 juin et 10 août 1984 (procès-verbaux nos 8, 9 et 13) ;
" aux motifs qu'outre les auditions de témoins, les agents des Douanes ont effectué des visites domiciliaires chez Maurice X... et dans le coffre-fort de ce dernier (P. V. n os 8, 9 et 13), visites domiciliaires effectuées conformément à l'article 64 du Code des douanes tel qu'en vigueur aux dates de ces opérations au cours desquelles les agents G..., H..., I..., J...et K...ayant le grade exigé à l'article 65 du Code des douanes ont pu saisir les documents relatés aux procès-verbaux susvisés et propres à faciliter l'exercice de leur mission ; que c'est encore en vain que Maurice X... conteste la régularité de ces actes qui ne contreviennent en rien aux exigences de la Convention européenne des droits de l'homme (cf. arrêt p. 10 1er attendu) ;
" 1o) alors que dans des conclusions demeurées sans réponse, Maurice X... avait invoqué la nullité des procès-verbaux de visites domiciliaires qui ne mentionnaient pas l'objet et la finalité des visites, contrairement à l'exigence déduite de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme sur le droit d'ingérence des autorités dans la vie privée et le domicile ; que faute d'avoir répondu à ces conclusions péremptoires, la cour d'appel a violé les textes visés aux moyens ;
" 2o) alors que dans sa rédaction applicable en l'espèce, l'article 64 du Code des douanes ne conférait aux agents de l'Administration le pouvoir de procéder à des visites domiciliaires que pour la seule recherche des marchandises détenues frauduleusement ; qu'en décidant que les agents des Douanes avaient pu, dans l'exercice de ce pouvoir, procéder à la saisie de documents propres à faciliter l'exercice de leur mission, la cour d'appel a, pour cette raison encore, violé les textes visés au moyen ;
" 3o) alors que la Cour a laissé sans réponse les conclusions de Maurice X... qui faisait valoir que, contrairement aux dispositions de l'article 6, alinéa 2, de la Convention franco-monégasque du 14 avril 1945, les agents des Douanes avaient omis de prendre l'attache du directeur des services fiscaux monégasques avant de procéder à des investigations dans le coffre que possédait la société Monaco Shipchandler au Crédit Foncier de Monaco ; qu'en déclarant régulière cette visite domiciliaire sans répondre à ce moyen péremptoire, la Cour a, une fois encore, violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que Maurice X... ne saurait reprocher à la cour d'appel d'avoir refusé d'annuler les procès-verbaux des visites domiciliaires effectuées, n° 8 à son domicile, n° 9 à son bureau et n° 10 dans son coffre au Crédit foncier de Monaco, dès lors que l'article 64, dans sa rédaction alors applicable, et l'article 454 du Code des douanes s'appliquent non seulement à la recherche des marchandises détenues frauduleusement, mais aussi à celle des documents de nature à constituer la preuve ou le corps du délit ;
Que Maurice X... ne démontre pas que les agents des Douanes aient fait des pouvoirs que leur confèrent ces articles un usage abusif au regard de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Qu'enfin, aucune disposition légale ou conventionnelle ne prévoit que les agents des Douanes mentionnent au procès-verbal dressé à l'occasion d'une visite domiciliaire dans un établissement de crédit de Monaco, l'avis préalable qu'ils en ont donné à la direction des services fiscaux monégasques ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation et fausse application des articles 323, 324, 325, 334- l, 365 du Code des douanes et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité du procès-verbal de l'administration des Douanes du 5 octobre 1984 (procès-verbal n° 15) ;
" aux motifs que le 5 octobre 1984, les agents des Douanes ont, dans le P. V. n° 15, après avoir rappelé à Maurice X... les éléments de preuve recueillis au cours de leur enquête, notifié à celui-ci, à 12 heures, les infractions à son encontre (soit contrebande, détention, constitution irrégulière d'un avoir à l'étranger, non-rapatriement de créances à l'étranger) tout en lui déclarant (ainsi qu'à la société Monaco Schipchandler en sa personne) la saisie du " Lady Jersey ", estimé à cette date, compte tenu de la valeur déclarée en douanes et des travaux d'aménagements, à 4 313 500 francs ;
" que constatant l'existence d'infractions (quand bien même n'étaient-elles pas flagrantes) commises dans le rayon douanier, les agents des Douanes étaient fondés en application de l'article 323-2 du Code des douanes à procéder à la saisie de la marchandise, soit le " Lady Jersey " quand bien même celui-ci (qui se trouvait à cette époque en Tunisie) avait échappé à leur appréhension ;
" que le P. V. n° 15 comportant, selon récapitulation de la procédure antérieure, la saisie du navire mais encore l'audition de Maurice X... qui s'est vu notifier ladite saisie, est conforme aux exigences de l'article 325 du Code des douanes et c'est donc à tort que les premiers juges l'ont annulé au motif erroné que l'administration des Douanes avait omis une des formalités de l'article 325 du Code des douanes, la déclaration au prévenu ; qu'à cet égard, l'administration des Douanes fait justement observer que Maurice X..., véritable propriétaire du " Lady Jersey " qui se retranche derrière la société de façade établie à Jersey dont il est en fait l'unique associé, ne peut sérieusement lui reprocher de ne pas avoir déclaré la saisie à la société Transhutton (cf. arrêt p. 11, 4 et 5 et p. 12 § 1) ;
" 1o) Alors que le résultat des contrôles, des enquêtes et des interrogatoires effectués par les agents des Douanes ne peut être consigné que dans des procès-verbaux de constat ; qu'aux termes du procès-verbal n° 15 établi le 5 octobre 1984, les agents des Douanes ont déclaré à Maurice X... la saisie du " Lady Jersey " ; qu'en regardant comme régulier ce procès-verbal dont elle a pourtant énoncé qu'il constituait un simple document de synthèse dans lequel l'Administration se bornait à rappeler les éléments de preuve recueillis au cours de l'enquête, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" 2o) alors que la constatation de l'infraction et la saisie doivent avoir un caractère concomitant ; qu'en refusant d'annuler le procès-verbal comportant saisie du navire, procès-verbal dont ses propres constatations révélaient que, sans constater aucune infraction douanière, il contenait une simple récapitulation des éléments de l'enquête et la notification des infractions retenues contre Maurice X... comme ayant été commises à des dates antérieures au procès-verbal, la cour d'appel a, une fois encore, violé les textes visés au moyen ;
" 3o) alors en tout état de cause que les procès-verbaux de saisie doivent énoncer la déclaration qui a été faite au prévenu ; que la déclaration de saisie du navire immatriculé au nom de la société Transhutton et naviguant sous couvert de documents établis au nom de cette société de droit anglais ne pouvait être faite qu'à celle-ci ; qu'en tenant néanmoins pour régulier le procès-verbal du 5 octobre 1984 constatant que la déclaration de saisie avait été faite à Maurice X..., qui n'avait pas la qualité de prévenu au sens de l'article 325 du Code des douanes, la cour d'appel a, une fois encore, violé les textes visés au moyen ;
" 4o) alors, enfin, que dans des conclusions demeurées sans réponse, Maurice X... avait invoqué la nullité du procès-verbal du 5 octobre 1984, base de toute la procédure postérieure qui, contrairement aux prescriptions de l'article 325 du Code des douanes, n'énonçait pas la cause de la saisie, ne comportait pas le nom et la qualité du gardien et ne mentionnait pas l'heure de sa clôture ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a, pour cette raison encore, violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que, par procès-verbal du 5 octobre 1984, les agents des Douanes ont notifié à Maurice X... les résultats de l'enquête à laquelle ils avaient antérieurement procédé, ainsi que l'infraction qu'ils entendaient relever, et ont prononcé la saisie fictive du navire qui se trouvait alors en Tunisie ; que le prévenu a régulièrement excipé que le procès-verbal était nul, faute de concomitance entre la saisie et la constatation de l'infraction, laquelle se situait selon lui au plus tard le 31 août 1984, date du dernier acte d'enquête, faute de notification de la saisie au prévenu, c'est-à-dire à la société Transhutton, faute de désignation de gardien et faute d'indication de l'heure de clôture du procès-verbal ;
Attendu que, pour écarter ces exceptions, les juges du second degré énoncent que les agents des Douanes, ayant rappelé au prévenu les éléments de preuve recueillis contre lui au cours de l'enquête et lui ayant notifié l'infraction retenue, étaient fondés à procéder à 12 heures à la saisie de la marchandise de fraude, en application de l'article 323-2, qui n'exige pas que l'infraction soit flagrante ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors qu'en cas d'enquête par procès-verbaux de constat, la saisie peut être prononcée sans condition de délai et qu'en cas de saisie fictive, aucun gardien ne saurait être désigné, l'arrêt n'encourt pas les griefs allégués ;
Que le moyen ne peut, dès lors, être accueilli ;
Et sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation et fausse application des articles 414, 427 du Code des douanes et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Maurice X... coupable du délit de " contrebande " pour avoir fait se trouver dans les eaux territoriales, rades et ports un navire, en l'espèce le " Lady Jersey ", sous couvert de documents de bord, titres de nationalité, faux ou inapplicables ;
" aux motifs que le délit de contrebande reproché à Maurice X... apparaît constitué dans la mesure où il a été établi que celui-ci, véritable propriétaire du " Lady Jersey ", l'a fait naviguer depuis le mois de juin 1981 dans les eaux territoriales françaises, ce qui n'est pas contestable, sous couvert de documents de bord (passeport de navire étranger, titre de propriété) manifestement faux ou inapplicables (cf. arrêt p. 12 dernier attendu) ;
" 1o) alors que les navires de plaisance en provenance de la CEE, soustraits, aux termes d'un avis du Ministre du commerce extérieur du 21 mars 1991, à la procédure de la licence d'importation, ne constituent plus une marchandise prohibée au sens de l'article 38 du Code des douanes ; que le fait pour un tel navire de se trouver dans les eaux territoriales françaises sous le couvert de documents faux ou inapplicables ne peut plus, par suite, être poursuivi par assimilation à l'importation de cette marchandise ; qu'en déclarant néanmoins Maurice X... coupable de ce délit dont la disparition devait rétroagir aux faits qui n'avaient pas fait l'objet, au 21 mars 1991, d'une décision devenue irrévocable, la Cour a violé les textes visés au moyen ;
" 2o) alors que l'article 427 du Code des douanes répute importation sans déclaration de marchandises prohibées le fait pour le navire de se trouver, sous couvert de documents de bord ou de nationalité faux, falsifiés ou inapplicables, dans les eaux territoriales, rades et ports ; qu'en déclarant Maurice X..., dont elle a estimé qu'il était le véritable propriétaire du navire " Lady Jersey " coupable de ce délit sans caractériser en quoi les documents de bord, sous le couvert desquels se trouvait le navire, avaient été confectionnés ou altérés dans une intention de fraude, ni que ces documents fussent inapplicables à ce navire, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'infraction en son élément matériel a violé les textes visés au moyen ;
" 3o) alors que la nationalité du navire, qui correspond au lieu de son immatriculation, est indépendante de son propriétaire ; qu'en considérant que le navire, immatriculé en Angleterre, se trouvait dans les eaux territoriales sous le couvert d'un titre de nationalité faux ou inapplicable au seul motif que Maurice X..., de nationalité française, en était le véritable propriétaire, la cour d'appel a, une fois encore, violé les textes visés au moyen ;
" 4o) alors que le titre de propriété du navire n'entre pas dans les documents qui doivent obligatoirement se trouver à bord : qu'en considérant que le navire se trouvait dans les eaux territoriales sous le couvert de documents de bord faux ou inapplicables au seul motif que le propriétaire réel du navire n'était pas celui qui figurait sur le titre de propriété, la cour d'appel a, une fois encore, violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que, pour déclarer Maurice X... coupable du délit réputé importation sans déclaration de marchandise prohibée prévu par l'article 427 du Code des douanes, la cour d'appel énonce qu'il résulte des témoignages recueillis que le prévenu est le véritable propriétaire du navire, officiellement acheté à une société panaméenne par une société de façade ayant son siège à Jersey, et qu'ainsi, il l'a fait naviguer, depuis juin 1981, dans les eaux territoriales françaises, sous le couvert d'un passeport de navire étranger manifestement faux ou inapplicable ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus devant elle, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-80717
Date de la décision : 19/10/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° DOUANES - Agent des Douanes - Pouvoirs - Procès-verbaux de constat - Enquêtes - interrogatoires et saisies de documents - Droit de communication (non).

1° Indépendamment de l'exercice du droit de communication que leur confère, sous certaines conditions, l'article 65 du Code des douanes, les agents des Douanes peuvent, en vertu de l'article 334 de ce Code, procéder à des enquêtes et interrogatoires et saisir les documents qui leur sont remis à cette occasion.

2° DOUANES - Agent des Douanes - Pouvoirs - Saisie - Marchandises - Enquête par procès-verbaux de constat - Délai.

2° Lorsque, à l'issue d'une enquête par procès-verbaux de constat, les agents des Douanes relèvent l'existence d'une infraction, ils peuvent, sans condition de délai, procéder à la saisie réelle ou fictive de la marchandise de fraude, en application de l'article 323-2 du Code des douanes.

3° DOUANES - Agent des Douanes - Pouvoirs - Saisie - Marchandises - Saisie fictive - Nécessité d'un gardien (non).

3° En cas de saisie fictive de marchandise, aucun gardien ne saurait être désigné.

4° DOUANES - Importation sans déclaration - Marchandises - Marchandises prohibées - Séjour d'un navire dans les eaux territoriales sous couvert d'un titre de nationalité inapplicable.

4° Selon l'article 427, 3° du Code des douanes, est réputé importation sans déclaration de marchandise prohibée le fait de faire séjourner un navire dans les eaux territoriales françaises sous couvert d'un titre de nationalité inapplicable. Justifie dès lors sa décision une cour d'appel qui déclare un ressortissant français coupable de ce délit, après avoir constaté qu'il était le véritable propriétaire d'un navire appartenant officiellement à une société de façade immatriculée à Jersey et qu'il l'avait fait naviguer dans les eaux territoriales sous le couvert d'un passeport de navire étranger inapplicable.


Références :

1° :
3° :
4° :
Code des douanes 323-2
Code des douanes 427, 3°
Code des douanes 65, 334

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 novembre 1993


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 oct. 1995, pourvoi n°94-80717, Bull. crim. criminel 1995 N° 316 p. 873
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 316 p. 873

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gondre, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Mouillard.
Avocat(s) : Avocats : M. Bertrand, la SCP Boré et Xavier.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:94.80717
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