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26/09/1995 | FRANCE | N°95-83071

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 septembre 1995, 95-83071


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... ou Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 mai 1995, qui, dans l'information suivie notamment contre lui du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du Président de la chambre criminelle prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur l'unique moyen de cassation pris de la violation des articles 67 bis du Code des douanes, 802 et 593 du Code de proc

édure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des ...

CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... ou Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 mai 1995, qui, dans l'information suivie notamment contre lui du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du Président de la chambre criminelle prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur l'unique moyen de cassation pris de la violation des articles 67 bis du Code des douanes, 802 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler l'ensemble de la procédure d'instruction suivie à l'encontre de Ermis du chef de trafic de stupéfiants, à partir de la cote D. 2 du dossier ;
" aux motifs que, s'il y a eu livraison surveillée au sens de l'article 67 bis du Code des douanes à l'origine de l'appréhension de la drogue et de l'ouverture de la procédure, et s'il est établi que le procureur de la République compétent n'a pas été informé du déroulement de ces opérations ni mis à même de les contrôler, la méconnaissance de ces dispositions, non prescrites à peine de nullité, et ne concernant que les relations Douane-Justice, n'a pas été de nature à porter atteinte aux droits de la défense ;
" alors, d'une part, qu'en l'absence d'autorisation régulière du procureur de la République pour procéder à une livraison surveillée, les agents des Douanes perdent toute compétence pour effectuer les opérations de constatation des infractions, identification de leur auteurs et saisies prévues à l'article 67 bis du Code des douanes ; qu'en conséquence, la nullité encourue à raison d'une livraison surveillée irrégulière, qui touche à la compétence, doit être prononcée, peu important l'atteinte portée aux droits de la défense ;
" alors, d'autre part, et en toute hypothèse, que les autorités qui participent à la procédure pénale doivent agir sans artifice ni stratagème ; qu'une livraison surveillée ne peut être réputée dépourvue de tels artifices que dans la mesure où elle est autorisée et contrôlée par le procureur de la République ; qu'à défaut, la provocation dont sont l'objet les éventuels auteurs des infractions porte nécessairement atteinte aux droits de la défense ; qu'ainsi, la nullité devait être en toute hypothèse prononcée ; "
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier le dispositif ; que l'insuffisance ou la contradiction dans les motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'article 67 bis du Code des douanes que les agents de l'Administration peuvent, afin de constater certaines infractions douanières et en identifier les auteurs, après en avoir informé le procureur de la République ou le juge d'instruction compétents et sans plus de formalité, procéder à la surveillance de l'acheminement de produits stupéfiants ; qu'il en va autrement, toutefois, lorsqu'aux mêmes fins ils sont amenés à mettre à la disposition de ces personnes des moyens de caractère juridique ainsi que des moyens de transport, de dépôt et de communication ; qu'en ce cas, ces agents ne peuvent procéder à de tels actes qu'avec l'autorisation formelle des autorités judiciaires ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que X..., Arthur Z... et Isa A..., tous trois de nationalités étrangères et résidents en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas, ont été inculpés, du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, pour avoir importé sur le territoire national, à partir de la Hollande, de l'héroïne destinée à être vendue en Grande-Bretagne ;
Que cette importation ayant eu lieu, hors l'autorisation et le contrôle des autorités judiciaires, en présence de douaniers, antérieurement avisés par A..., en passant par un poste-frontière neutralisé par la Direction nationale de recherche et d'enquête douanière, à l'aide notamment d'un véhicule loué avec " la caution d'un agent des Douanes ", la chambre d'accusation a été saisie, à l'initiative d'un des inculpés, d'une requête tendant à l'annulation de pièces de la procédure ;
Attendu que, pour rejeter cette requête et dire n'y avoir lieu à annulation, les juges énoncent que la surveillance du véhicule servant au transport de la marchandise, ainsi que l'ouverture de la frontière pour permettre à la marchandise d'arriver à destination, constituaient bien une livraison surveillée au sens de l'article 67 bis du Code des douanes et qu'il est établi que celle-ci s'est effectuée, en méconnaissance des prescriptions de ce texte, à l'insu et hors du contrôle des autorités judiciaires compétentes ; que, toutefois, selon l'arrêt, ces dispositions ne concernant que " les relations Douanes-Justice ", leur méconnaissance n'a pas été de nature à affecter les droits de la défense ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'ayant relevé que l'opération mise en oeuvre par les agents des Douanes ne s'était pas limitée à la surveillance de l'acheminement de la marchandise mais avait donné lieu à la fourniture de moyens à l'un des auteurs de l'infraction, elle se devait de rechercher si les agents des Douanes, en agissant sans l'autorisation du procureur de la République et hors de son contrôle, n'avaient pas commis un excès de pouvoir viciant la procédure, la chambre d'accusation, qui a fait une lecture inexacte de l'article 67 bis précité, n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de la décision ;
Que dès lors la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 mai 1995 ;
DIT qu'en application de l'article 612-1 du Code de procédure pénale, l'annulation prononcée est étendue, dans l'intérêt de la justice, aux autres parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 95-83071
Date de la décision : 26/09/1995
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° DOUANES - Agent des Douanes - Pouvoirs - Livraison surveillée de produits stupéfiants - Article 67 bis du Code des douanes - Mise en oeuvre sans autorisation - Sanctions.

1° SUBSTANCES VENENEUSES - Marchandises prohibées - Douanes - Contrebande - Importation - Constatation des infractions - Agents habilités - Agent des Douanes - Pouvoirs - Livraison surveillée - Article 67 bis du Code des douanes - Mise en oeuvre sans autorisation - Sanctions.

1° Il résulte de l'article 67 bis du Code des douanes que les agents de l'administration peuvent, afin de constater certaines infractions douanières et en identifier les auteurs, après en avoir informé le procureur de la République ou le juge d'instruction compétents et sans plus de formalité, procéder à la surveillance de l'acheminement de produits stupéfiants. Il en va autrement, toutefois, lorsqu'aux mêmes fins, ils sont amenés à mettre à la disposition des trafiquants des moyens de caractère juridique ainsi que des moyens de transport, de dépôt et de communication. En ce cas, ces agents ne peuvent, sans commettre un excès de pouvoir viciant la procédure, procéder à de tels actes qu'avec l'autorisation formelle des autorités judiciaires(1).

2° CASSATION - Effet - Annulation - Portée.

2° L'article 612-1 du Code de procédure pénale permet à la Cour de Cassation, dans l'intérêt de l'ordre public ou d'une bonne administration de la justice, d'ordonner que l'annulation qu'elle prononce aura effet à l'égard des parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues(2).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 612-1
Code des douanes 67 bis

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre d'accusation), 04 mai 1995

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1989-06-19, Bulletin criminel 1989, n° 261, p. 648 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1991-10-28, Bulletin criminel 1991, n° 381, p. 952 (rejet)

arrêt cité ;

Chambre criminelle, 1994-01-24, Bulletin criminel 1994, n° 32, p. 61 (rejet). CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1993-11-17, Bulletin criminel 1993, n° 343 (4), p. 861 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 sep. 1995, pourvoi n°95-83071, Bull. crim. criminel 1995 N° 283 p. 785
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 283 p. 785

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Dintilhac.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. de Mordant de Massiac.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:95.83071
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