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08/03/1995 | FRANCE | N°94-82566

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 mars 1995, 94-82566


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- l'établissement public du parc national de la Vanoise, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry, chambre correctionnelle, du 7 avril 1994 qui, dans les poursuites engagées contre Pierre X... pour chasse au grand gibier en contravention des prescriptions du plan de chasse, a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article R. 241-70 du Code rural, des articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure p

énale, du principe de l'autonomie et de la spécialité des établissement...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- l'établissement public du parc national de la Vanoise, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry, chambre correctionnelle, du 7 avril 1994 qui, dans les poursuites engagées contre Pierre X... pour chasse au grand gibier en contravention des prescriptions du plan de chasse, a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article R. 241-70 du Code rural, des articles 2, 3, 591 et 593 du Code de procédure pénale, du principe de l'autonomie et de la spécialité des établissements publics, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile du parc national de la Vanoise ;
" aux motifs que le parc national de la Vanoise s'est constitué partie civile ; que toutefois, selon l'article 2 du Code de procédure pénale, l'exercice de l'action civile devant les tribunaux de répression est un droit exceptionnel qui, en raison de sa nature, doit être strictement renfermé dans les limites fixées par le Code ; que cette action n'appartient qu'à ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; que le parc national de la Vanoise est un établissement public ; qu'ainsi, son intérêt est public et se confond avec celui de la société dans son intégralité ; qu'il ne peut donc en sa qualité d'établissement public demander réparation d'un préjudice personnel puisque celui qu'il peut subir est celui de la collectivité ; que seul, le ministère public est apte à poursuivre en réparation du préjudice occasionné à la collectivité publique, à la société que le parc national de la Vanoise n'est pas une association ; que rien dans son statut d'établissement public ne l'autorise à exercer devant les juridictions l'action civile ; qu'au surplus, à supposer qu'il ait subi un préjudice, il s'agirait d'un préjudice général puisqu'un parc national comme l'indique sa dénomination appartient à la collectivité nationale ; qu'ainsi le préjudice subi par le parc serait un préjudice de la Nation ;
" alors d'une part, qu'il n'y a pas lieu de distinguer entre les différentes actions que peut exercer une personne morale de droit public du fait qu'elle a la capacité d'ester en justice par l'intermédiaire de son représentant légal ; qu'il s'ensuit qu'un établissement public peut exercer l'action civile devant les juridictions répressives à la seule condition de justifier avoir subi un dommage trouvant directement sa source dans l'infraction poursuivie, et ce, alors même que ses statuts ne le prévoiraient pas expressément ; que, dès lors, en considérant que, de par sa nature d'établissement public, le parc national de la Vanoise était irrecevable à exercer l'action civile devant les juridictions répressives, son exercice n'étant pas prévu par ses statuts, alors que l'article R. 241-70 du Code rural prévoit expressément la possibilité pour tout parc national de recouvrer des dommages-intérêts, sans distinguer selon la procédure suivie en vue de leur recouvrement, la cour d'appel a violé les textes et principes susvisés ;
" alors, d'autre part que, en considérant, pour dénier au parc national de la Vanoise le droit d'exercer l'action civile devant les juridictions répressives, que son préjudice ne pouvait pas être distinct de celui subi par la Nation, sans même examiner en quoi consistait le préjudice dont ledit parc poursuivait la réparation et sans rechercher s'il n'était pas lié à la spécialité de sa mission, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article L. 241-1 du Code rural ;
Attendu que l'article 2 du Code de procédure pénale attribue l'action civile à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction, sans en exclure les établissements publics ; que, selon l'article L. 241-1 précité, les parcs nationaux ont légalement pour mission, lorsque la conservation de la faune, de la flore, du sol, du sous-sol, de l'atmosphère, des eaux et, en général, d'un milieu naturel présente un intérêt spécial, d'assurer la préservation de ce milieu contre tout effet de dégradation naturelle et de le soustraire à toute intervention artificielle susceptible d'en altérer l'aspect, la composition et l'évolution ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, suivant un procès-verbal dressé par deux gardes assermentés du parc national de la Vanoise, un chamois a été tiré à l'intérieur des limites de ce parc ; que l'auteur du tir, Pierre X..., n'a pas, au surplus, muni l'animal du dispositif de marquage correspondant au massif montagneux où celui-ci a été abattu ; qu'à la suite de ces faits, l'intéressé a été condamné pour chasse en contravention des prescriptions du plan de chasse ;
Que, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du parc national de la Vanoise, les juges du second degré retiennent que, s'agissant d'un établissement public, " il ne peut, en cette qualité, demander réparation d'un préjudice personnel " et " que rien, dans son statut, ne l'autorise à exercer l'action civile devant les juridictions " ; qu'ils ajoutent que le préjudice dont un parc national, propriété de la collectivité nationale, pourrait se prévaloir est un préjudice général dont seul le ministère public est apte à poursuivre la réparation ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'établissement public concerné, au profit duquel l'article R. 241-70 du Code rural organise la procédure de recouvrement des dommages-intérêts qui lui sont accordés et qui, selon l'article R. 241-28 du même Code, figurent au nombre de ses ressources, est en droit de soutenir avoir subi un préjudice personnel et direct découlant de l'atteinte portée, par l'infraction retenue, aux intérêts qu'en vertu de sa mission légale, il a la charge de préserver, la cour d'appel a méconnu le principe et les textes susénoncés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en ses seules dispositions civiles l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 7 avril 1994, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 94-82566
Date de la décision : 08/03/1995
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ACTION CIVILE - Recevabilité - Collectivité nationale - Etablissement public - Infraction commise à son préjudice.

1° L'article 2 du Code de procédure pénale attribue l'action civile à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction, sans exclure les établissements publics(1).

2° PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Espaces naturels - Parcs nationaux - Action civile - Recevabilité.

2° CHASSE - Action civile - Recevabilité - Parcs nationaux - Infraction à la police de la chasse 2° ACTION CIVILE - Recevabilité - Collectivité nationale - Etablissement public - Parcs nationaux - Infraction à la police de la chasse.

2° Les parcs nationaux ont légalement pour mission, selon l'article L. 241-1 du Code rural, d'assurer la préservation d'un milieu naturel présentant un intérêt spécial contre tout effet de dégradation naturelle et de le soustraire à toute intervention artificielle susceptible d'en altérer l'aspect, la composition et l'évolution. Ils sont, dès lors, recevables à se constituer partie civile en réparation du préjudice personnel et direct résultant de l'atteinte portée, par des infractions à la police de la chasse, aux intérêts qu'ils ont la charge de préserver(2).


Références :

1° :
2° :
Code de procédure pénale 2
Code rural L241-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry (chambre correctionnelle), 07 avril 1994

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1984-02-07, Bulletin criminel 1984, n° 41, p. 110 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1992-02-27, Bulletin criminel 1992, n° 91 (1), p. 230 (cassation partielle), et les arrêts cités. CONFER : (2°). (2) A rapprocher : Chambre criminelle, 1984-02-07, Bulletin criminel 1984, n° 41, p. 110 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1992-02-27, Bulletin criminel 1992, n° 91 (1), p. 230 (cassation partielle), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 mar. 1995, pourvoi n°94-82566, Bull. crim. criminel 1995 N° 93 p. 232
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 93 p. 232

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Carlioz.
Avocat(s) : Avocat : M. Cossa.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:94.82566
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