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08/03/1995 | FRANCE | N°93-85409

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 mars 1995, 93-85409


REJET du pourvoi formé par :
- X... Gilles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, du 26 octobre 1993 qui, pour infractions à la police de la pêche en eau douce, l'a condamné à deux amendes de 250 francs chacune.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 236-1, L. 236-3, R. 236-3 du Code rural, 11 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 485 du Code de procédure péna

le, défaut de motif, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué,...

REJET du pourvoi formé par :
- X... Gilles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, chambre correctionnelle, du 26 octobre 1993 qui, pour infractions à la police de la pêche en eau douce, l'a condamné à deux amendes de 250 francs chacune.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles L. 236-1, L. 236-3, R. 236-3 du Code rural, 11 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 485 du Code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, infirmant le jugement attaqué, a déclaré Gilles X... coupable d'avoir commis l'infraction de pêcher en eau douce sans appartenir à une association agréée ;
" aux motifs que, s'il est propriétaire du lit de la rivière, et par conséquent titulaire d'un droit de pêche, il ne dispose d'aucun droit ni sur les eaux de cette rivière, ni sur les poissons qui s'y développent ; que par ailleurs, la préservation des milieux aquatiques et la protection du patrimoine piscicole ne concernent pas uniquement les riverains des cours d'eau ou les pêcheurs mais par leurs incidences économiques et sociales sont manifestement d'intérêt général ; que les associations agréées de pêche et de pisciculture ont pour mission d'organiser l'exercice de la pêche dans l'intérêt général et de contribuer ainsi à la préservation du patrimoine commun ; qu'aux termes de l'article L. 234-4 du Code rural, les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de pisciculture ont le caractère d'établissement d'utilité publique ; que l'agrément est ouvert à toute association répondant aux critères de l'article R. 234-23 ; qu'ainsi les pêcheurs s'ils se voient obligés d'adhérer à une association agréée, conservent la possibilité d'adhérer aux associations déjà constituées ou de réaliser entre eux de nouvelles associations pour lesquelles ils solliciteront l'agrément ; qu'il y a ainsi adéquation entre l'intérêt général à protéger et l'atteinte apportée aux droits reconnus par les textes invoqués par le prévenu ;
" alors qu'en vertu de l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts " et " l'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique, à la sécurité nationale, ou la sûreté publique, à la défense de l'ordre et la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale " ; que ce texte consacre un droit d'association négatif, autrement dit un droit de pas s'associer ; que, dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si l'obligation d'adhérer à une association de pêche agréée, prévue par l'article L. 236-1 du Code rural, était nécessaire en France pour atteindre un des buts légitimes visés par l'article 11 alinéa 2 de la Convention, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les juges du second degré qui ont, par des motifs dépourvus d'insuffisance, caractérisé en tous ses éléments constitutifs l'infraction à l'article L. 236-1 du Code rural dont ils ont déclaré Gilles X... coupable, n'ont par ailleurs méconnu aucun des textes, notamment conventionnel, visés au moyen ;
Qu'en effet, les restrictions qu'apporte à la liberté d'association, consacrée par l'article 11 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'obligation faite à tout pêcheur d'adhérer à une association agréée, sont justifiées par la protection des droits et libertés d'autrui, dont relève la préservation du patrimoine piscicole, oeuvre d'intérêt général, assurée par la gestion organisée de ses ressources ;
Que dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;
Et sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles L. 236-1, L. 236-3, R. 236-3 du Code rural, 1680 du Code général des impôts, 485 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, infirmant le jugement entrepris a déclaré X... coupable de l'infraction de pêche en eau douce sans avoir acquitté la taxe annuelle ;
" aux motifs qu'aux termes de l'article L. 236-3 du Code rural, les associations agréées ont pour mission de percevoir la taxe piscicole et de la reverser au conseil supérieur de la pêche ; qu'il n'appartient pas au juge judiciaire d'apprécier la conformité d'une loi à la constitution ; que le conseil supérieur de la pêche est un établissement public auquel le produit de la taxe est affecté ; qu'il est soumis au régime financier et comptable applicable aux établissements publics, que le paiement du Trésor public ne saurait être considéré comme libératoire alors au surplus que les sommes ont été bloquées et n'ont pas été effectivement réglées au Trésor public ;
" alors que la taxe piscicole visée aux articles L. 236-1 et L. 236-3 du Code rural est une taxe fiscale dont la perception obéit aux règles de la comptabilité publique ce qui exclut qu'elle puisse être collectée par une association agréée de pêche ou son mandataire ; que les impôts et taxes sont payables en argent à la caisse du comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs ou suivant les modes de paiement autorisés par le ministre de l'économie et des finances ou par décret ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, tout en constatant que X... avait payé la taxe en litige entre les mains du percepteur de Nantes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés et de l'article 1680 du Code général des impôts " ;
Attendu que pour retenir, à la charge du prévenu, la contravention de pêche en eau douce sans avoir acquitté la taxe piscicole, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que " les pièces produites et les déclarations mêmes du prévenu attestent que les sommes ont été bloquées sur un compte et n'ont pas été effectivement réglées au Trésor public " ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'article 1680 du Code général des impôts n'est pas applicable en l'espèce et qu'un paiement auprès du Trésor public ne saurait, au regard des dispositions de l'article L. 236-3 du Code rural, être considéré comme libératoire, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 93-85409
Date de la décision : 08/03/1995
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 11 - Liberté de réunion et d'association - Pêche - Obligation d'adhérer à une association agréée - Compatibilité.

1° PECHE FLUVIALE - Pêche en eau douce - Préservation des milieux aquatiques et protection du domaine piscicole - Obligation d'adhérer à une association agréée - Convention européenne des droits de l'homme - Compatibilité.

1° Les restrictions qu'apporte à la liberté d'association, consacrée par l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'obligation faite à tout pêcheur d'adhérer à une association agréée, sont justifiées par la protection des droits et libertés d'autrui, dont relève la préservation du domaine piscicole, oeuvre d'intérêt général, assurée par la gestion organisée de ses ressources(1).

2° PECHE FLUVIALE - Pêche en eau douce - Taxe annuelle - Contravention de non-paiement - Paiement en espèces auprès du Trésor public - Caractère libératoire (non).

2° La contravention de non-paiement de la taxe piscicole annuelle prévue par l'article L. 236-1 du Code rural est caractérisée dès qu'il n'est pas justifié du règlement de cette taxe suivant les modalités prescrites par les articles L. 236-3 et R. 236-2 du même Code. L'article 1680 du Code général des impôts n'étant pas applicable à la taxe piscicole, le paiement en argent à la caisse du comptable du Trésor n'est pas libératoire.


Références :

2° :
1° :
CGI 1680
Code rural L236-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 11

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (chambre correctionnelle), 26 octobre 1993

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre civile 3, 1994-03-16, Bulletin 1994, III, n° 55 (1), p. 33 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 mar. 1995, pourvoi n°93-85409, Bull. crim. criminel 1995 N° 96 p. 239
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1995 N° 96 p. 239

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général : M. Le Foyer de Costil.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Carlioz.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Peignot et Garreau, M. Le Prado.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1995:93.85409
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