Sur le moyen unique :
Attendu que Odette Y... est décédée le 24 octobre 1988 en laissant pour seul héritier son fils majeur, Pierre Z..., placé sous tutelle ; qu'elle laissait un testament qui instituait celui-ci son légataire universel et stipulait que, dans le cas où son fils décéderait en état de célibat, tous les biens et immeubles, qui resteraient à son décès parmi ceux qu'il avait recueillis dans la succession, seraient dévolus à l'Association d'aide aux enfants infirmes mentaux de Meurthe-et-Moselle (l'AEIM) ; que Pierre Z... est décédé le 10 janvier 1989 ; que, s'opposant à ce que l'intégralité des biens qui composaient la succession d'Odette Y... revienne à l'association, les consorts X..., héritiers de Pierre Z..., ont assigné cette dernière pour voir juger que le legs de residuo consenti à celle-ci par Odette Y... ne pouvait s'exécuter que sur la quotité disponible de sa succession, de sorte que l'association ne pouvait recevoir que la moitié des biens ayant dépendu de celle-ci ; que l'arrêt attaqué (Nancy, 17 décembre 1992) les a déboutés de leur demande ;
Attendu que les consorts X... reprochent à la cour d'appel d'avoir statué ainsi, alors que, selon le moyen, les règles protectrices de la réserve héréditaire peuvent être invoquées par l'héritier réservataire ou, après son propre décès, par ses ayants cause ; que le legs de residuo, legs conditionnel fait par le testateur pour le cas de décès du premier légataire qui se trouve ainsi privé du droit de transmettre, ne peut porter que sur la quotité dont ce testateur peut librement disposer, et non sur la réserve qui doit être transmise à son titulaire en pleine propriété sans charges ni condition ; qu'au décès de l'héritier réservataire, ses droits en pleine propriété et non viagers peuvent être invoqués par ses ayants cause ; qu'en leur en refusant le bénéfice en l'espèce, la cour d'appel a violé les articles 913 et suivants du Code civil ;
Mais attendu que les règles impératives protectrices des droits de l'héritier réservataire ne peuvent être invoquées par ce dernier ou ses ayants cause que lorsqu'il a été porté atteinte à la réserve ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Pierre Z... avait recueilli l'intégralité des biens dépendant de la succession de sa mère et que le testament ne mettait à sa charge aucune obligation, et qu'en particulier, il n'était pas tenu de conserver les biens reçus ; qu'elle en a exactement déduit que le legs consenti à l'association sur ceux des biens qui subsisteraient au décès de Pierre Z... n'avait pas porté atteinte aux droits que celui-ci tenait de sa qualité d'héritier réservataire ; que, dès lors, par ce seul motif qui excluait l'exercice par les consorts X... de l'action en réduction de ce legs, l'arrêt attaqué est légalement justifié ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.