CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Patrick, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 1er juillet 1991 qui, dans la procédure suivie du chef de vols contre Joël Y..., placé sous contrôle judiciaire, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction rejetant la demande de provision présentée par la partie civile.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du 7 octobre 1991 par laquelle le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 138. 11°, 139, 140, alinéa 1er, 141-1, 141-2, 142, 142-1, 172, 206, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a, confirmant l'ordonnance du juge d'instruction entreprise, dit n'y avoir lieu en l'état à restituer la partie du cautionnement affectée à la garantie des droits de la victime ;
" aux motifs qu'en l'absence de consentement de l'inculpé et à défaut d'une décision de justice exécutoire auxquels est subordonné le versement par provision du cautionnement à la victime, selon l'article 142-1 du Code de procédure pénale, la somme déposée au greffe en vertu des articles 138. 11° et 142 de ce Code y demeure immobilisée jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond de l'affaire ; que le consentement de l'inculpé doit être exprès et sans réserve ; qu'en discutant le montant de sa dette et en limitant son accord au versement de la somme de 42 000 francs à la victime qui demande que toute la partie du cautionnement affectée à la réparation du dommage causé par l'infraction lui soit allouée, Y... n'a pas consenti de manière expresse et sans réserve au versement de la somme de 120 000 francs à X... ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance entreprise doit être confirmée ;
" alors, d'une part, que les dispositions de l'article 142-1 du Code de procédure pénale ne font pas obstacle, lorsque l'inculpé ne consent que pour partie au versement des sommes affectées à la garantie des droits de la partie civile, à ce que le juge d'instruction ordonne à due concurrence et pour cette partie au moins, un tel versement ; que dès lors, la chambre d'accusation, retenant que le consentement donné par l'inculpé pour un dédommagement partiel de la partie civile était constitutif de réserves et qu'il ne pouvait dès lors, être satisfait à la demande de celle-ci même pour la partie admise, a violé lesdites dispositions par fausse application ;
" alors, d'autre part, que le juge d'instruction, constatant que Y... n'avait, sur le montant total du cautionnement de 125 000 francs mis à sa charge au titre du contrôle judiciaire, versé qu'une somme de 85 000 francs, devait se prononcer sur cette inexécution partielle par l'inculpé de ses obligations ; que, par suite, l'arrêt attaqué ne pouvait s'abstenir de tirer les conséquences nécessaires, au plan de la régularité de l'ordonnance entreprise, de cette abstention du juge d'instruction à exercer ses pouvoirs, constitutive d'un excès de pouvoir négatif, et statuer par voie de confirmation ;
" alors, enfin, que la chambre d'accusation, en ne répondant pas au chef péremptoire des conclusions de la partie civile soulignant l'inexécution partielle des obligations incombant à l'inculpé au titre du contrôle judiciaire et faute de se prononcer elle-même sur cette abstention de l'inculpé à se conformer auxdites obligations, n'a pas régulièrement motivé sa décision, qui est entachée ainsi d'une violation de la loi ; que, par voie de conséquence, l'arrêt attaqué fait illégalement profiter l'inculpé d'une décision de mainlevée partielle du contrôle judiciaire, laquelle devait être à la fois explicite et dûment motivée " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 142-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, le juge d'instruction peut, avec le consentement de l'inculpé, ordonner que la partie du cautionnement affectée à la garantie des droits de la victime ou du créancier d'une dette alimentaire soit versée à ceux-ci par provision, sur leur demande ;
Attendu que Joël Y..., inculpé de vols au préjudice de Patrick X..., a été placé sous contrôle judiciaire avec obligation de fournir un cautionnement de 125 000 francs garantissant, à concurrence de 120 000 francs, le paiement des frais avancés par la partie civile et la réparation des dommages causés par l'infraction ; que Patrick X... a demandé que cette partie du cautionnement lui soit versée par provision ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, la chambre d'accusation retient que Joël Y... discute le montant de sa dette et n'a pas consenti de manière expresse et sans réserve au versement de la somme de 120 000 francs à Patrick X... ;
Mais attendu qu'en se prononçant ainsi, alors qu'elle relevait que l'inculpé avait expressément consenti au versement d'une provision de 42 000 francs à la partie civile, et alors qu'il lui appartenait d'accueillir, dans cette mesure, la demande de cette dernière, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris en date du 1er juillet 1991, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris autrement composée.