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11/02/1991 | FRANCE | N°89-82648

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 février 1991, 89-82648


CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Bernard,
- Y... Yvonne, épouse X...,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 21 février 1989 qui, dans les poursuites engagées contre Michel Z... du chef d'abus de confiance, après relaxe du prévenu, les a déboutés de leurs demandes.
LA COUR,
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Vu le mémoire ampliatif commun aux demandeurs et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 408 du Code pénal, des article

s L. 261-18 et R. 261-29 du Code de la construction et de l'article 593 du Code de pr...

CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Bernard,
- Y... Yvonne, épouse X...,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 21 février 1989 qui, dans les poursuites engagées contre Michel Z... du chef d'abus de confiance, après relaxe du prévenu, les a déboutés de leurs demandes.
LA COUR,
Vu la connexité, joignant les pourvois ;
Vu le mémoire ampliatif commun aux demandeurs et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 408 du Code pénal, des articles L. 261-18 et R. 261-29 du Code de la construction et de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué, après avoir relaxé Z... des fins de la poursuite pour abus de confiance, a débouté les époux X... de leur action civile ;
" aux motifs qu'il n'existe aucune convention écrite entre les époux X... et la société SOVIM, dont Z... était le président du conseil d'administration, ayant fait obligation à cette société de déposer les deux chèques remis, le 17 février 1983, par les époux X..., réservataires d'un appartement vendu, en état futur d'achèvement, par la société SOVIM pour le compte de la SCI Gambetta-Montrouge, à un compte spécial ouvert à la banque Hervet (cf. arrêt p. 6, paragraphe 1er) ; qu'aux termes du contrat de réservation conclu par les époux X..., la consignation de la somme qui devait être faite par le réservataire sur un compte spécial ouvert à la banque Hervet en contrepartie de l'engagement du réservant était expressément laissé à la seule diligence des époux X... (cf. arrêt p. 5, paragraphe 5) ; qu'il n'est pas démontré, à l'issue des débats que les parties soient convenues verbalement d'une telle affectation (cf. arrêt p. 6, paragraphe 2) ; que Z..., qui a toujours soutenu que les chèques émis le 17 février 1983 avaient été utilisés pour les besoins de la construction en cours, et dont l'affirmation se trouve corroborée par la déposition de A..., administrateur judiciaire de la SCI Gambetta-Montrouge, ne peut donc se voir reprocher aucun détournement frauduleux au sens de l'article 408 du Code pénal (cf. arrêt p. 6, paragraphes 3 à 5) ;
" 1° alors qu'après avoir admis que la somme versée, le 17 février 1983, par les époux X..., l'avait été en contrepartie de l'engagement, pris par la SCI Gambetta-Montrouge, de réserver à ceux-ci le bien vendu, la cour d'appel devait en déduire que cette somme, rendue indisponible jusqu'à la conclusion du contrat de vente, ne pouvait être affectée à la poursuite des travaux de construction de l'immeuble, de sorte que, en l'utilisant à cette fin, Z... s'était rendu coupable d'un détournement, au sens de l'article L. 461-18 du Code de la construction et de l'article 408 du Code pénal ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" 2° alors que pour décider que Z... avait pu, de façon licite, consacrer la somme de 250 000 francs, versée par les époux X..., à la poursuite des travaux de construction, il appartenait à la cour d'appel, qui relève que cette somme représentait initialement la contrepartie de l'engagement pris par la SCI Gambetta-Montrouge de réserver le bien aux époux X..., de constater que ceux-ci avaient contractuellement consenti à cette nouvelle affectation ; que, faute de l'avoir fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;
" 3° alors que, aux termes de l'article R. 261-29 du Code de la construction et de l'urbanisme, le dépôt de garantie est fait à un compte spécial ouvert au nom du réservataire dans une banque ou un établissement spécialement habilité à cet effet ; qu'en décidant dès lors qu'il n'existait aucune convention écrite entre les époux X... et la SA SOVIM ayant fait obligation à cette société de déposer les deux chèques remis le 17 février 1983 à un compte spécial ouvert à la banque Hervet, ni que les parties soient convenues verbalement d'une telle affectation, la cour d'appel, qui a par ailleurs constaté que ces deux chèques avaient été versés lors de la signature du contrat préliminaire de vente, a violé le texte susvisé " ;
Vu les articles cités, ensemble l'article L. 261-16 du Code de la construction ;
Attendu que la juridiction correctionnelle, qui n'est pas liée par la qualification donnée à la prévention, ne peut relaxer un prévenu qu'après s'être assurée que les faits, dont elle était saisie, ne tombent pas sous le coup d'une autre incrimination légalement punissable ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, sur plainte avec constitution de partie civile des époux X..., Michel Z..., président de la société anonyme SOVIM, elle-même gérante de la société civile immobilière Gambetta-Montrouge chargée de la construction d'un ensemble immobilier, a été renvoyé devant la juridiction correctionnelle pour avoir détourné au préjudice des parties civiles, qui en étaient propriétaires, une somme de 250 000 francs qui lui avait été remise à titre de mandat, à charge d'en faire un usage ou un emploi déterminé ;
Attendu que pour relaxer le prévenu des fins de la poursuite et débouter de leurs demandes les parties civiles qui reprochaient au dirigeant de la SA SOVIM, vendeur, de n'avoir pas donné aux fonds reçus l'affectation convenue, la cour d'appel relève que la somme litigieuse, versée par les époux X... à l'occasion du contrat préliminaire de réservation d'un appartement, convention souscrite le 17 février 1983 avec la SA SOVIM, l'a été au moyen de deux chèques émis à l'ordre de ladite société qui les a encaissés et qu'il a été convenu, selon une attestation du même jour, que ladite somme viendrait " en imputation sur le montant de l'acquisition " ; que les juges constatent qu'aux termes du contrat de réservation la consignation de la somme devant être faite par le réservataire sur un compte spécial ouvert à la banque en contrepartie de l'engagement du réservant, était expressément laissée à la diligence des époux X... ; que les juges retiennent encore qu'il n'existait aucune convention écrite ou verbale entre les époux X... et la SA SOVIM faisant obligation à cette dernière de procéder à une telle affectation ; qu'ainsi, selon la cour d'appel, le prévenu ayant utilisé la somme litigieuse pour les besoins de la construction en cours, il n'est donc pas établi que celui-ci ait commis, au préjudice des parties civiles, un détournement frauduleux ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher si les faits, par elle souverainement appréciés, ne constituaient pas, s'agissant du versement de fonds à l'occasion d'un contrat préliminaire de réservation prévu par l'article L. 261-15 du Code de la construction, une infraction prévue et réprimée par l'article L. 261-18 du même Code et alors que toute clause contractuelle contraire aux dispositions de l'article L. 261-15 précité, est réputée non écrite selon les prescriptions de l'article L. 261-16 du Code susvisé, la cour d'appel a méconnu le principe susrappelé ;
Que la cassation est dès lors encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 21 février 1989, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions portant relaxe sur l'action publique étant définitives, et pour qu'il soit à nouveau jugé, dans les limites de la cassation prononcée :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Orléans.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 89-82648
Date de la décision : 11/02/1991
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

URBANISME - Vente d'immeubles à construire - Vente en l'état futur d'achèvement - Contrat préliminaire de réservation - Fonds déposés en garantie - Compte spécial - Détournement des fonds - Infraction prévue à l'article L. 261-18 du Code de la construction et de l'habitation - Recherche nécessaire

VENTE - Vente d'immeubles à construire - Vente en l'état futur d'achèvement - Contrat préliminaire de réservation - Fonds déposés en garantie - Compte spécial - Détournement des fonds - Infraction prévue à l'article L. 261-18 du Code de la construction et de l'habitation - Recherche nécessaire

Il résulte des dispositions combinées des articles L. 261-15 et L. 261-16 du Code de la construction et de l'habitation qu'en cas de vente en l'état futur d'achèvement précédée d'un contrat préliminaire de réservation, les fonds déposés en garantie doivent être affectés par le vendeur à un compte spécial et sont indisponibles, incessibles et insaisissables jusqu'à la conclusion du contrat de vente ; toute clause contraire à ces prescriptions est réputée non écrite. Encourt la cassation l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour relaxer du chef d'abus de confiance le responsable d'une société venderesse d'un immeuble à construire, à qui il était reproché de n'avoir pas donné aux fonds versés lors du contrat préliminaire de réservation l'affectation qui convenait, se réfère à une attestation passée entre les parties mettant à la charge du réservataire l'affectation du dépôt de garantie à un compte spécial et constate que les fonds reçus ont été utilisés pour les besoins de la construction et cela, sans rechercher si les faits dénoncés ne constituaient pas, au regard des prescriptions susrappelées, une infraction prévue à l'article L. 261-18 du Code de la construction et de l'habitation (1).


Références :

Code de la construction et de l'habitation L261-15, L261-16, L261-18
Code pénal 408

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 21 février 1989

CONFER : (1°). (1) Cf. A rapprocher : Chambre criminelle, 1980-03-03 , Bulletin 1980, n° 75, p. 178 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 fév. 1991, pourvoi n°89-82648, Bull. crim. criminel 1991 N° 67 p. 167
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1991 N° 67 p. 167

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Tacchella, conseiller le plus ancien faisant fonction. -
Avocat général : Avocat général :M. Perfetti
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Bayet
Avocat(s) : Avocats :M. Parmentier, la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1991:89.82648
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