Vu la connexité, joint les pourvois n° 89-10.020 et n° 89-40.045 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et la procédure, que M. X... a été engagé le 24 août 1972 par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel du Sud-Ouest ; qu'il a été titularisé dans les fonctions de guichetier le 1er mars 1973 après avoir souscrit, le 26 février 1973, une clause de non-concurrence par laquelle il s'est engagé, au cas où il quitterait la Caisse, pour quelque cause que ce soit, à n'exercer pendant cinq ans, dans les départements du Gers et des Landes, aucune activité professionnelle au service de sociétés, de particuliers, d'établissements, d'organismes ou entreprises quelconques effectuant des opérations de banque, de crédit, de prêt, d'escompte, de placements de titres, d'assurance ou de capitalisation ; qu'étant devenu prospecteur, il a démissionné le 5 décembre 1986 et est entré immédiatement au service de la société Worms gestion diffusion ; que la Caisse a saisi le tribunal de grande instance de Dax pour, notamment, voir dire valable la clause de non-concurrence et voir condamner M. X... et la société Worms au paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que pour débouter la caisse des demandes formées par elle contre M. X..., l'arrêt a retenu que, selon le chapitre IV de l'annexe III de la convention collective du Crédit agricole mutuel, les caisses régionales peuvent demander aux chefs de bureau la signature d'un engagement de non-concurrence limité géographiquement et en durée (2 ans maximum), étant précisé que le respect de cet engagement ne pourrait être exigé au cas où le chef de bureau ferait l'objet d'un licenciement prononcé pour un motif autre qu'une sanction disciplinaire ; qu'après avoir énoncé qu'un engagement de non-concurrence étant une atteinte à la liberté du travail, cette disposition devait s'appliquer restrictivement, la cour d'appel a considéré que les partenaires sociaux avaient entendu limiter le droit de l'employeur a faire signer un tel engagement aux agents ayant au moins le grade de chef de bureau et qu'ainsi la convention collective interdisait à l'employeur de faire signer un engagement de non-concurrence à M. X... qui avait un grade inférieur ;
Attendu cependant que si, aux termes de l'article L. 135-2 du Code du travail, lorsqu'un employeur est lié par les clauses d'une convention ou d'un accord collectif de travail, ces clauses s'appliquent aux contrats conclus avec lui, sauf dispositions plus favorables, il ne s'ensuit pas que les parties au contrat de travail soient privées du droit de conclure des accords particuliers sur toutes les questions que ladite convention a laissées en dehors de ses prévisions ; que par suite si la convention collective du Crédit agricole prévoit au chapitre IV de l'annexe III applicable aux chefs de bureau que les caisses régionales peuvent demander à ces salariés la signature d'un engagement de non-concurrence, on ne peut en déduire que le contrat passé avec un salarié ne faisant pas partie de cette catégorie de personnel ne peut contenir une clause de cette nature ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas
tiré les conséquences légales de ses constatations ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la caisse de ses demandes contre M. X..., l'arrêt rendu le 28 octobre 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse