Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche et en sa troisième branche :
Vu l'article 1382 du Code civil et l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, un mouvement de grève a été déclenché le 14 octobre 1982 dans l'établissement de Montereau de la société Générale Sucrière pour protester contre la remise en cause de la clause d'échelle mobile des salaires prévue à la convention collective ; que, dès le début du conflit, les grévistes ont occupé les locaux et ont verrouillé les portes d'accès à l'usine, interdisant ainsi aux salariés non grévistes de se rendre à leurs postes de travail ; que nonobstant une ordonnance de référé en date du 21 octobre 1982 ordonnant leur expulsion, ils se sont maintenus dans les lieux jusqu'au 25 octobre 1982 date à laquelle les forces de police sont intervenues pour ouvrir les portes et faire évacuer les grévistes ;
Attendu que pour déclarer l'union locale CGT de Montereau responsable du trouble illicite causé au cours du mouvement de grève et la condamner à réparer le dommage subi par la société Générale Sucrière au cours de la grève, la cour d'appel, après avoir cité le tract diffusé le 25 octobre 1982 par le syndicat postérieurement à l'expulsion des grévistes, énonce qu'il ressort avec évidence de ce document que l'union locale CGT a été l'instigatrice de l'occupation des locaux et qu'elle est donc responsable du préjudice qui en est résulté pour la société Générale Sucrière ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le tract du 25 octobre 1982 se borne à protester contre l'expulsion des grévistes, la cour d'appel, qui ne relève aucune participation du syndicat aux obstacles apportés à la liberté du travail et à la résistance opposée à l'ordonnance d'expulsion, a dénaturé les termes clairs et précis du tract litigieux et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du premier moyen et sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 1988, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon