Vu la connexité, joint les pourvois n°s 86-45.083 et 86-45.084 ;.
Sur les moyens réunis :
Attendu que la société Beauce Sologne Automobile ayant été mise en liquidation des biens le 6 juillet 1983, le syndic qui avait licencié tout le personnel dès le 12 juillet a été autorisé, le 29 juillet, à continuer l'exploitation pendant la durée d'exécution des préavis et, le 11 août, à céder le fonds de commerce ; que la société Blois Les Saules Automobiles, que s'était substitué M. X..., cessionnaire du fonds, s'est engagée à maintenir les contrats de travail mais a fait suivre cet engagement de principe d'une liste de bénéficiaires qui ne comprenait pas les époux Y... et leur fille, Mlle Valérie Y... ; que les trois intéressés ont fait citer devant la juridiction prud'homale les deux sociétés en paiement d'indemnités pour non-respect des dispositions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail ;
Attendu que le syndic de la société Beauce Sologne Automobile fait grief aux arrêts attaqués (Orléans, 25 septembre 1986) de l'avoir condamné, ès qualités, à payer aux consorts Y..., à ce titre et in solidum avec la société Blois Les Saules Automobiles, diverses sommes, alors, d'une part, qu'il est constant que, lorsque l'autorisation de poursuivre l'exploitation n'est pas accordée par le jugement prononçant la liquidation des biens, le syndic peut procéder à la résiliation des contrats de travail et que les créances qu'engendre cette rupture ne sont pas à la charge de la masse mais doivent être produites au passif du débiteur ; qu'en décidant néanmoins que les consorts Y... étaient créanciers de la masse et que leur demande en paiement de dommages-intérêts était recevable nonobstant l'absence de toute production au passif de la liquidation des biens de la société Beauce Sologne Automobile, la cour d'appel a violé l'article 38, alinéa 2, de la loi du 13 juillet 1967, alors, d'autre part, que, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, à la date du licenciement du personnel, M. X... était inconnu comme acheteur éventuel du fonds de la société Beauce Sologne Automobile et la société Blois les Saules Automobiles n'existait pas ; que dès lors, nulle modification de la situation juridique de l'entreprise Beauce Sologne Automobile n'étant intervenue lorsque, tirant les conséquences du jugement déclaratif qui n'autorisait pas la poursuite de l'exploitation, le syndic a procédé au licenciement de l'ensemble du personnel, la résiliation des contrats de travail des consorts Y... n'a pu être effectuée en violation de l'article L. 122-12 du Code du travail dont les conditions d'application n'étaient pas réunies ; qu'en estimant le contraire, la cour d'appel a, par fausse application, violé le texte légal précité ; alors, enfin, que, à supposer que la demande des époux Y... en paiement de dommages-intérêts ait été fondée, la cour d'appel, en se bornant à indiquer qu'elle trouvait dans la cause des éléments suffisants pour fixer à 150 000 francs le préjudice subi par M. Y... et à 120 000 francs celui de Mme Y..., sans mentionner les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 122-3-2 du Code du travail ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu que les licenciements auxquels avait procédé le syndic étaient de nul effet et que le refus de maintenir les contrats de travail, qui équivalait à un licenciement, était imputable à la société Blois Les Saules Automobiles ; qu'elle n'a ajouté qu'il était également imputable au syndic qu'en tant que celui-ci avait pris la responsabilité de décharger le nouvel employeur de son obligation de poursuivre les contrats ; que la créance des salariés contre la liquidation des biens n'était donc pas une créance d'indemnités de rupture mais une créance de dommages-intérêts pour faute du syndic dans l'exercice de ses fonctions ; que, créance sur la masse, elle n'était pas soumise à la production au passif ;
Attendu, d'autre part, que dès lors que les licenciements prononcés par le syndic demeurent sans effet si l'exploitation se poursuit même après une suspension d'activité, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui a fait ressortir que l'entreprise exploitée par la société Beauce Sologne Automobile n'avait pas cessé son activité, en a déduit que les dispositions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail devaient recevoir application ;
Attendu, enfin, que les juges du fond qui justifient l'existence du préjudice par la seule évaluation qu'ils en font ne sont pas tenus, si la loi n'en ordonne autrement, de préciser les éléments qui servent à l'évaluer ;
Qu'il suit de là qu'aucun des griefs n'est fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois