CASSATION sur le pourvoi formé par
- X... Alain, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris du 28 avril 1989 qui, dans l'information suivie contre X du chef de violation du secret de l'instruction, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 378 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que la chambre d'accusation a refusé de statuer sur un des chefs d'inculpation visé dans la plainte avec constitution de partie civile de l'exposant ;
" aux motifs qu'il ne résulte pas des termes de la plainte que celle-ci aurait visé non seulement la violation du secret de l'instruction, mais également la violation du secret professionnel, le renvoi à l'article 378 du Code pénal ne pouvant qu'être une erreur matérielle puisque la plainte est déposée du chef de violation du secret de l'instruction, délit prévu et réprimé par l'article 11 du Code de procédure pénale et 378 du Code pénal, encore que le renvoi qui précise ce dernier article n'est pas paraphé (arrêt attaqué, p. 7) ;
" alors que sont nuls les arrêts de la chambre d'accusation qui refusent de se prononcer sur l'une des demandes de la partie civile ; qu'en se fondant sur des motifs inopérants pour refuser de statuer sur le chef de violation du secret professionnel visé dans la plainte avec constitution de partie civile et le mémoire de l'exposant, la chambre d'accusation n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Vu lesdits articles, ensemble les articles 51, 80 et 86 du Code de procédure pénale ;
Attendu que selon l'article 575, alinéa 2.5°, du Code de procédure pénale la partie civile est admise à se pourvoir contre un arrêt de non-lieu rendu par la chambre d'accusation en l'absence de pourvoi du ministère public lorsqu'il a été omis de statuer sur un chef d'inculpation ;
Attendu que le juge d'instruction qualifie librement les faits dont il est saisi et au regard desquels il a l'obligation d'informer ;
Attendu que de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure il résulte que le capitaine Alain X... a, le 16 janvier 1987, porté plainte avec constitution de partie civile auprès du juge d'instruction de Paris pour violation du secret de l'enquête et de l'instruction en exposant que le 23 septembre 1985 il avait été entendu au service de protection et de sécurité de la défense (DSPD) au sujet de ses activités et de renseignements fournis à des journalistes sur une affaire en cours ; que son audition s'était prolongée jusqu'au 24 septembre 1985 à 20 heures, moment où il avait été remis à la gendarmerie et placé en garde à vue jusqu'à son inculpation, le 26 septembre 1985, du chef d'infraction à l'article 78 du Code pénal ; qu'il avait par la suite bénéficié d'une décision de non-lieu ; que cependant il avait pu constater que, le 25 septembre au matin, un quotidien avait révélé sa mise en garde à vue, faisant état d'aveux qu'il aurait passés ; que dès le 24 septembre une agence de presse avait diffusé des révélations analogues dans deux dépêches et qu'enfin le 25 septembre à 13 heures, deux chaînes de télévision annonçaient son inculpation ; que le plaignant considérait que des informations divulguées il ressortait qu'avait été commis le délit prévu par l'article 11 du Code de procédure pénale, réprimé par l'article 378 du Code pénal ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, les juges exposent que les révélations relatives aux agissements imputés à Alain X... avaient été fournies aux agences de presse avant que celui-ci soit conduit à la gendarmerie et par conséquent avant l'ouverture de l'enquête judiciaire ; que pour refuser de rechercher, comme la partie civile le sollicitait, si les faits dénoncés par elle ne caractérisaient pas le délit de violation du secret professionnel, la chambre d'accusation considère que la plainte n'ayant pas été déposée de ce chef, elle ne saurait ordonner un supplément d'information ;
Mais attendu que, dès lors que la partie civile avait fait porter sa plainte sur la révélation des faits résultant de l'enquête de la DSPD, il n'importe que le plaignant ait mal qualifié l'infraction qui pouvait être constituée ; qu'il appartenait à la juridiction d'instruction qui s'en trouvait saisie d'examiner les faits, objet de la plainte, sous toutes les qualifications possibles et de rechercher notamment si le délit de violation du secret professionnel pouvait être caractérisé ; qu'ainsi, pour avoir méconnu les principes ci-dessus rappelés, l'arrêt attaqué encourt la cassation ;
Par ces motifs :
Et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le premier moyen de cassation proposé :
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris du 28 avril 1989 et, pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles.