Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 14 octobre 1988), que Mlles X... et Y... ont signé les 26 et 27 octobre 1987 des contrats de stage d'initiation à la vie professionnelle en qualité de caissières à la société As Eco pour une durée de six mois ; que le 23 novembre 1987, le Groupement des établissements publics de l'éducation Nord, organisme de suivi, a avisé la société As Eco qu'il ne pouvait " enregistrer ces deux contrats ", les stagiaires ayant été affectées à des postes de salariés licenciés ; que Mlles X... et Y..., qui ont continué à exercer une activité dans l'établissement de la société As Eco, ont saisi la formation de référé de la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de la différence entre le salaire minimum garanti et les 27 % mis à la charge de l'entreprise par le contrat SIVP ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable le recours formé par Mlles X... et Y... contre l'ordonnance par laquelle la formation de référé s'était déclarée incompétente en invitant les demanderesses à se pourvoir auprès du tribunal administratif, alors, selon le moyen, que la voie de l'appel est seule ouverte contre les ordonnances de référé ; qu'en déclarant, dans de telles conditions, recevable le contredit que Mlles X... et Y... ont formé contre l'ordonnance entreprise, laquelle a été rendue par la formation de référé du conseil de prud'hommes, la cour d'appel a violé l'article 98 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte de la combinaison des articles 91 et 98 du nouveau Code de procédure civile que lorsque la cour d'appel est saisie à tort d'un contredit contre une ordonnance de référé, elle demeure saisie pour statuer en appel sur la compétence ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Sur le second moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que la société reproche encore à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à Mlles X... et Y... des sommes à titre de provision, alors, selon le moyen, que la compétence du juge des référés est restreinte aux litiges dont la connaissance appartient quant au fond aux tribunaux civils ; que les contrats de l'article L. 980-9 du Code du travail sont des contrats de droit public et ressortissent, par le fait, à la compétence de la juridiction administrative ; qu'en prononçant, dès lors, sur la régularité du contrat de l'espèce dont elle constate qu'il s'agit d'une convention de l'article L. 980-9 du Code du travail, en définissant les conséquences du refus d'enregistrement de cette convention par le GEPEN qui l'avait cependant souscrite, et en disqualifiant le contrat ainsi conclu mais non enregistré, en contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 13 de la loi des 16-24 août 1790, ensemble la loi du 16 fructidor an III ; alors que la juridiction prud'homale est compétente seulement pour juger les différends qui peuvent s'élever à l'occasion du contrat de travail ; que la formation des référés de la juridiction prud'homale a la même compétence que celle-ci ; qu'en déclarant la formation de référé de la juridiction prud'homale compétente pour statuer sur la demande de Mlles X... et Y..., quand il ressort de ses propres appréciations que le contrat liant Mlles X... et Y... à la
société As Eco n'est pas un contrat de travail et quand, pour caractériser l'existence d'un tel contrat, il lui a fallu déclarer irrégulière la convention qui a été effectivement conclue et, motif pris de cette irrégularité, la disqualifier en contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 531-1 et R. 516-30 du Code du travail ; alors que, la formation des référés de la juridiction prud'homale ne peut allouer une provision qu'à la condition que l'obligation ne soit pas sérieusement contestable ; que la cour d'appel a dû, pour allouer une provision à Mlles X... et Y..., apprécier la valeur et la portée d'un refus d'enregistrement d'une convention de l'article L. 980-9 du Code du travail par l'organisme conventionné qui l'a souscrite, déclarer irrégulière cette même convention et attacher à l'irrégularité qu'elle constate la conséquence de la disqualification du contrat conclu par trois personnes en contrat de travail conclu à deux personnes ; que, tranchant de la sorte une contestation sérieuse, elle a violé l'article R. 516-31, alinéa 2, du Code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'avisée le 23 novembre 1987 de ce que les contrats SIVP ne seraient pas " enregistrés " par l'organisme de suivi, la société avait continué à faire travailler Mlles X... et Y... à son profit et sous ses ordres, la cour d'appel, devant laquelle aucune question préjudicielle n'était soulevée, a pu en déduire qu'à compter de cette date, un contrat de travail s'était substitué au contrat de formation, que, dès lors, le litige relevait de la compétence prud'homale et que l'obligation de l'employeur de verser un complément de rémunération n'était pas sérieusement contestable ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi