Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Calais, 25 novembre 1985), qu'un arrêt de travail a eu lieu au sein des ateliers de la société Courtaulds, le 14 février 1985, après avertissement donné à l'employeur et pour appuyer des revendications professionnelles ; que cette grève commencée à 14 h 30 a été effectuée pendant deux heures par le personnel du quart E et pendant une heure par le personnel de jour ; qu'après l'annonce par l'employeur de faire subir à tous les grévistes une retenue de salaire correspondant à cinq heures et soixante centièmes, le syndicat CGT a avisé la société Courtaulds de la poursuite de la grève et le 15 février 1985 des salariés du quart T ont cessé le travail de 20 à 22 heures ;
Attendu que la société Courtaulds fait grief au conseil de prud'hommes de l'avoir condamnée à payer à chacun des grévistes le salaire retenu au-delà du temps réel de l'arrêt de travail, alors, selon le moyen, que le salaire étant la contrepartie d'un travail fourni dans des conditions normales d'exécution, l'employeur était fondé à ne rémunérer que le travail utilement accompli par les salariés grévistes dont la cessation concertée de travail entraîne une perte de production pendant une période supérieure à l'arrêt et que se mettant ainsi dans l'impossibilité d'exécuter leur travail dans des conditions normales durant le temps nécessaire à la remise en route des machines, peu important que les arrêts de travail procèdent ou non d'une volonté délibérée de désorganisation ; qu'en l'espèce le conseil, qui a reconnu que les débrayages des 14 et 15 février avaient nécessairement entraîné une perte de production pendant une période supérieure à leur durée, devait donc en déduire le droit de la société Courtaulds de réduire les rémunérations des grévistes en proportion de ces pertes ; qu'en lui déniant ce droit en considération de l'absence d'abus commis par les grévistes dans l'exercice de leur droit de grève, le conseil n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil et L. 521-1 du Code du travail ;
Mais attendu que le temps consacré à la remise en marche des machines à l'issue d'un mouvement de grève même répété ne saurait justifier une retenue sur salaire, au motif de la perte de production qui suit le mouvement, même à l'encontre des salariés grévistes dès l'instant que la grève est reconnue licite ; que la rémunération des salariés grévistes ne doit subir qu'un abattement proportionnel à la durée de l'arrêt de travail ;
Attendu que le jugement attaqué, ayant relevé que le travail avait repris à l'issue de la grève, a exactement décidé que les salariés avaient droit en contrepartie de leur travail à leur rémunération sans abattement ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi