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31/05/1989 | FRANCE | N°87-91448

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 31 mai 1989, 87-91448


CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Yamina, épouse A...,
- X... Bensouna,
- X... M'Hamed tant en son nom personnel qu'en sa qualité de tuteur de ses frères et soeurs mineurs,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la Marne, en date du 2 octobre 1987, laquelle, statuant sur les intérêts civils après acquittement de Jean-Michel Y... et Alain Z..., s'est déclarée incompétente.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation pris de l

a violation des lois des 16-24 août 1790 et 16 fructidor an III, du principe de la sépa...

CASSATION sur les pourvois formés par :
- X... Yamina, épouse A...,
- X... Bensouna,
- X... M'Hamed tant en son nom personnel qu'en sa qualité de tuteur de ses frères et soeurs mineurs,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'assises de la Marne, en date du 2 octobre 1987, laquelle, statuant sur les intérêts civils après acquittement de Jean-Michel Y... et Alain Z..., s'est déclarée incompétente.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des lois des 16-24 août 1790 et 16 fructidor an III, du principe de la séparation des pouvoirs, des articles 1, 2, 3, 4, 85 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la cour d'assises incompétente pour statuer sur l'action civile des consorts X... contre Y... et Z... ;
" aux motifs qu'en se livrant, au moment de son appréhension, à des voies de fait et des violences sur la personne de Mohamed X... qui les menaçait d'un couteau, Y... et Z..., agents du centre hospitalier de Reims, ont bien commis une faute susceptible d'engager leur responsabilité civile ; qu'il demeure toutefois acquis aux débats que cette faute personnelle n'est pas dépourvue de lien avec le service ; qu'en effet, les deux surveillants qui n'avaient reçu ni formation, ni consignes ou instructions précises pour l'accomplissement de leurs tâches, ont exécuté le seul ordre qui leur était donné, sans restriction aucune, par leur supérieur : ramener à l'hôpital un malade agité qui avait quitté sa chambre sans autorisation, en se munissant d'un couteau ; que leur comportement doit donc s'analyser en une faute, certes personnelle, mais non détachable du service, dont l'appréciation relève des tribunaux administratifs ;
" alors que les coups de poing et les coups de crosse de revolver infligés à un malade, sorti sans autorisation d'un hôpital public, par deux agents de sécurité qui avaient déjà tiré sur lui trois cartouches de gaz lacrymogène et deux balles à blanc, constituent des actes de violence, injustifiés au regard des pratiques administratives normales, relevant une attitude de malveillance de la part de ces agents publics, et caractérisant ainsi une faute personnelle détachable du service public ; qu'en décidant le contraire, la cour d'assises a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs et violé chacun des textes susvisés ;
" alors qu'en décidant que les voies de fait et les violences commises par les deux agents publics sur la personne de X... n'étaient pas dépourvues de lien avec le service au prétexte que ces agents n'auraient reçu ni formation, ni consignes ou instructions précises pour l'accomplissement de leurs tâches et qu'ils auraient exécuté le seul ordre qui leur aurait été clairement donné, sans restriction aucune, par leur supérieur, c'est à dire ramener à l'hôpital un malade agité qui avait quitté sa chambre sans autorisation, en se munissant d'un couteau, quand il résultait notamment de l'arrêt de la chambre d'accusation du 6 février 1987 que ces agents avaient l'interdiction d'intervenir en dehors des limites de l'hôpital et qu'il n'était pas établi que X... ait été en possession d'un couteau, qui ne pouvait être en toute hypothèse qu'un couteau de table inoffensif, la cour d'assises n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir des motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que relèvent de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, les actions en réparation du préjudice né de la faute personnelle détachable du service commise par un agent public ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Y... et Z..., employés dans un établissement hospitalier public, ont été renvoyés devant la cour d'assises, le premier sous l'accusation de coups mortels portés à un malade, Mohamed X..., le second sous l'accusation de complicité du même crime ;
Attendu que Y... et Z... ont été acquittés ; que nonobstant cet acquittement, les consorts X..., ayants droit du défunt, ont maintenu leur constitution de partie civile ;
Attendu que les juges se sont déclarés incompétents pour connaître de leur demande ; qu'ils énoncent au soutien de leur décision que si Y... et Z... ont bien commis une faute susceptible d'engager leur responsabilité civile en se livrant à des violences ou voies de fait sur un malade agité qui avait quitté sa chambre, sans autorisation, en se munissant d'un couteau, cette faute n'est pas dépourvue de lien avec le service ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si ces actes de violence étaient indispensables à l'accomplissement de leur mission, la cour d'assises n'a pas justifié sa décision ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'assises de la Marne, du 2 octobre 1987, et, pour être jugé à nouveau, conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal civil de Troyes.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 87-91448
Date de la décision : 31/05/1989
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

SEPARATION DES POUVOIRS - Agent d'un service public - Délit commis dans l'exercice des fonctions - Faute personnelle détachable - Recherche nécessaire

Ne justifie pas sa décision la cour d'assises qui, statuant sur les intérêts civils après acquittement, se déclare incompétente pour connaître de l'action en réparation du préjudice résultant d'actes de violence commis par des agents hospitaliers dans l'exercice de leurs fonctions, sans rechercher si ces actes de violence étaient indispensables à l'exercice de leur mission (1).


Références :

Loi 16 Fructidor AN III
Loi du 16 août 1790
Loi du 24 août 1790

Décision attaquée : Cour d'assises de la Marne, 02 octobre 1987

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1974-01-24 , Bulletin criminel 1974, n° 40, p. 92 (cassation) ;

Chambre criminelle, 1981-10-28 , Bulletin criminel 1981, n° 287, p. 747 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 31 mai. 1989, pourvoi n°87-91448, Bull. crim. criminel 1989 N° 231 p. 581
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1989 N° 231 p. 581

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Angevin, conseiller le plus ancien faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Lecocq
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Guilloux
Avocat(s) : Avocat :M. Parmentier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:87.91448
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