Sur les deux moyens réunis :
Vu les articles L. 412-11 et L. 412-17 du Code du travail et la loi des 16-24 août 1790 ;
Attendu que, le 1er janvier 1986, la Régie nationale des usines Renault (la Régie) a fusionné ses deux succursales de la région niçoise : Renault-Riquier et Renault Cros-de-Cagnes en un seul établissement dénommé Renault-Nice ; que le 23 octobre 1986, le directeur départemental du Travail a décidé que chacune des succursales de la Régie situés à Marseille, Nice et Toulon constituait un établissement distinct ; que, répondant à une demande d'explication de la Régie, il a précisé, le 16 octobre 1987, que l'établissement distinct de Nice était bien constitué par les anciennes succursales de Renault-Riquier et de Renault Cros-de-Cagnes ; que, le 20 janvier 1986, le syndicat CGT, qui se refusait à reconnaître la fusion des deux succursales, avait désigné M. X... en qualité de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'établissement de Renault-Riquier ;
Attendu que pour débouter la Régie de sa demande en annulation de cette double désignation qui ne tenait pas compte, selon elle, de la fusion intervenue, le tribunal d'instance a estimé qu'il n'y avait pas eu réunification des deux succursales en un établissement distinct, que la succursale de Cros-de-Cagnes n'était pas concernée par la décision du directeur du travail du 23 octobre 1986 qui ne visait que la succursale de Nice-Riquier et que l'interprétation donnée le 16 octobre 1987 ne pouvait se substituer à cette décision " car elle constituerait en réalité une modification complète, s'agissant en l'espèce de deux établissements situés dans des villes ou dans des arrondissements administratifs ou judiciaires différents " ;
Attendu cependant, d'une part, que l'établissement à prendre en considération pour la désignation d'un délégué syndical ne s'identifie pas nécessairement à celui dans lequel est constitué un comité d'établissement ; que, dès lors, en se fondant exclusivement sur le critère du comité d'établissement pour valider la désignation de M. X... sans rechercher le cadre le plus approprié à l'exercice des fonctions de délégué syndical, eu égard à l'implantation géographique des lieux d'activité, à la similitude ou à la disparité des conditions de travail, à l'importance des effectifs et à l'indépendance des secteurs d'activité, le tribunal d'instance n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Attendu, d'autre part, que c'est au directeur départemental du Travail qu'il appartient de déterminer le nombre d'établissements distincts pour la mise en place des comités d'établissement ; qu'après avoir constaté que ce directeur avait précisé par sa lettre interprétative du 16 octobre 1987 que depuis le 1er janvier 1986, les deux succursales situées au Cros-de-Cagnes et à Nice formaient un seul établissement appelé Renault-Nice, le tribunal d'instance, qui a décidé, en ce qui concerne la désignation de M. Y... comme représentant syndical au comité d'établissement de Nice-Riquier, que les succursales de Cros-de-Cagnes et de Nice-Riquier constituaient des établissements distincts, a violé le principe de la séparation des pouvoirs ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 13 janvier 1988, entre les parties, par le tribunal d'instance de Nice ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Cannes