La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/02/1989 | FRANCE | N°86-96620

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 février 1989, 86-96620


ACTION PUBLIQUE ETEINTE et CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur les pourvois formés par :
- X... Jackie,
- X... Guido,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, chambre correctionnelle, en date du 13 novembre 1986, qui, pour infraction à la loi sur l'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, les a condamnés chacun à une amende de 1 000 francs et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ; r>Sur l'action publique ;
Attendu qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 20 ju...

ACTION PUBLIQUE ETEINTE et CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur les pourvois formés par :
- X... Jackie,
- X... Guido,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, chambre correctionnelle, en date du 13 novembre 1986, qui, pour infraction à la loi sur l'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, les a condamnés chacun à une amende de 1 000 francs et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur l'action publique ;
Attendu qu'aux termes de l'article 2 de la loi du 20 juillet 1988 sont amnistiés, lorsqu'ils ont été commis antérieurement au 22 mai 1988 les délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue ;
Attendu que par l'arrêt attaqué, lui-même antérieur au 22 mai 1988, Jackie X... et Guido X... ont été déclarés coupables d'infraction à la législation sur l'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce ; que ce délit n'est puni par l'article 16 de la loi du 2 janvier 1970 que d'une peine d'amende ;
Qu'il y a lieu, dès lors, de déclarer l'action publique éteinte ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article 24 de la loi précitée du 20 juillet 1988, l'amnistie ne préjudicie pas aux droits des tiers ; que l'arrêt contient des dispositions civiles et qu'il convient par suite d'examiner, du seul point de vue des intérêts civils, les moyens de cassation proposés par les demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1, 3 et 16 de la loi du 2 janvier 1970, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jackie et Guido X... coupables d'avoir, en leur qualité de représentant de la société d'expertise comptable Guido et Jackie X..., prêté leur concours, même à titre accessoire, à des opérations visées à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970, sans être titulaires de la carte prévue par l'article 3 du même texte ;
" aux motifs propres que les prévenus ont " publié dans la Gazette de la région du Nord plusieurs annonces d'offres de location-gérance de fonds de commerces " ;
" et, aux motifs adoptés des premiers juges, qu'" au cours des mois de mai et de juillet 1984, la société d'expertise comptable Guido et Jackie X... a fait insérer sous son en-tête, dans le journal d'annonces légales La Gazette de la région du Nord plusieurs publications concernant des locations-gérances de fonds de commerce, que les interventions à but de diffusion d'actes de publicité reprochées aux deux prévenus constituent une forme de concours à des opérations de location de fonds de commerce, et contreviennent ainsi aux dispositions claires et précises de la loi du 2 janvier 1970, et notamment au contenu de l'expression " même à titre accessoire " employée par le législateur dans l'article 1er de ce texte " ;
" alors, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer les documents de la cause, énoncer que les prévenus avaient fait publier " plusieurs annonces d'offres de location-gérance de fonds de commerce ", alors que les publications incriminées par la prévention consistaient uniquement en des annonces légales faisant suite à des actes d'apports en société ou de location-gérance de fonds de commerce ;
" alors, d'autre part, que la loi du 2 janvier 1970 complétée par le décret du 20 juillet 1972 ne prohibe que les actes d'entremise ; qu'ainsi la cour d'appel ne pouvait retenir Jackie et Guido X... dans les liens de la prévention dès lors que ces derniers, experts-comptables, s'étaient bornés, pour le compte de clients auprès desquels ils exerçaient une mission d'expertise comptable, à rédiger des actes d'apports en société ou de location-gérance de fonds de commerce et à effectuer les formalités consécutives de publicité légale, sans nullement s'entremettre entre les parties intéressées " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 22 de l'ordonnance du 19 septembre 1945 ;
Attendu que les travaux d'ordre administratif, juridique ou fiscal, que les experts comptables sont autorisés à effectuer en vertu de l'article 22 de l'ordonnance du 19 septembre 1945, lorsqu'ils sont directement liés aux opérations comptables, n'entrent pas dans les prévisions de l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970 ; qu'il en est ainsi des publications légales ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que Jackie et Guido X..., experts-comptables, ont été renvoyé devant le tribunal correctionnel en leur qualité de représentants de la société d'expertise comptable " G. et J. X... ", pour s'être livrés, ou avoir prêté leur concours, même à titre accessoire, à des opérations visées à l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970, sans être titulaires de la carte professionnelle instituée par l'article 3 de cette loi ;
Attendu que pour déclarer les prévenus coupables de l'infraction prévu par l'article 16 de ladite loi, les juges, qui relèvent que la profession d'expert-comptable ne figure pas, parmi celles énumérées à l'article 95 du décret du 20 juillet 1972, comme non soumise aux dispositions réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, se bornent à constater que la société d'expertise comptable précitée a fait insérer, sous sa raison sociale, dans un journal d'annonces légales, plusieurs publications concernant des locations-gérances de fonds de commerce, sans que ses représentants soient titulaires de la carte professionnelle spéciale ; qu'ils en déduisent que de telles interventions, à but de diffusion d'actes, constituent une forme de concours à des opérations de location de fonds de commerce et contreviennent ainsi aux dispositions de la loi susvisée ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seules constatations et alors que les prévenus ont seulement fait effectuer des publications légales sans s'entremettre entre les parties au sens de la loi du 2 janvier 1970, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision et a méconnu le principe susrappelé ;
Que, dès lors, la cassation est encourue ;
Et sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2 et 3 du Code de procédure pénale, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré la Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux recevable en sa constitution de partie civile et lui a alloué le franc symbolique de dommages-intérêts ;
" aux motifs que la Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux a un réel intérêt moral et matériel à faire reconnaître et sanctionner les atteintes aux prérogatives que la loi lui reconnaît ;
" alors que les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 ayant été édictées dans l'intérêt des parties aux opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, et non dans celui de la profession de conseil juridique et fiscal, leur violation n'était pas de nature à porter à l'intérêt collectif de cette profession un quelconque préjudice " ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article L. 411-11 du Code du travail ;
Attendu que si, aux termes de l'article L. 411-11 du Code du travail, les syndicat professionnels peuvent, au nom de la profession qu'ils représentent, exercer tous les droits reconnus à la partie civile, c'est à la condition que les faits déférés au juge portent un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de cette profession ;
Attendu que pour déclarer recevable la constitution de partie civile de la Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux, dans les poursuites exercées contre les prévenus du chef d'infraction à l'article 16 de la loi du 2 janvier 1970, et prononcer sur les demandes de cette partie, la cour d'appel énonce que la Chambre syndicale précitée a un intérêt moral et matériel à faire sanctionner les atteintes aux prérogatives que la loi reconnaît à ses membres ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi alors que les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 ont été édictées dans l'intérêt des personnes concernées par les opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, et non dans celui des professions admises à prêter leur concours, leur violation n'est pas, au sens de l'article L. 411-11 du Code du travail, de nature à porter atteinte à l'intérêt collectif de l'une quelconque de ces professions et notamment de celle représentée par ladite Chambre syndicale ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue ;
Par ces motifs :
DECLARE l'action publique ETEINTE ;
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai en date du 13 novembre 1986, mais seulement en ses dispositions civiles,
Et attendu qu'il ne reste rien à juger,
DIT n'y avoir lieu à renvoi.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 86-96620
Date de la décision : 20/02/1989
Sens de l'arrêt : Action publique éteinte et cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° AMNISTIE - Textes spéciaux - Loi du 20 juillet 1988 - Amnistie de droit - Effet - Réserve des droits des tiers - Cassation - Pourvoi - Infraction amnistiée - Nécessité de statuer sur le pourvoi en ce qu'il concerne les intérêts civils.

1° AMNISTIE - Dispositions générales - Effets - Réserve des droits des tiers - Cassation - Pourvoi - Infraction amnistiée - Nécessité de statuer sur le pourvoi en ce qu'il concerne les intérêts civils.

1° Les délits commis antérieurement au 22 mai 1988 et pour lesquels seule une peine d'amende est encourue sont amnistiés de droit par l'article 2.1° de la loi du 28 juillet 1988. La juridiction saisie doit déclarer l'action publique éteinte. Toutefois, aux termes de l'article 24 de ladite loi, l'amnistie ne préjudicie pas aux droits des tiers. Il y a lieu d'examiner, du seul point de vue des intérêts civils, les moyens de cassation proposés (1).

2° AGENT D'AFFAIRES - Transaction sur les immeubles et les fonds de commerce - Loi du 2 janvier 1970 - Domaine d'application - Entremise - Définition - Diffusion dans un journal d'annonces légales d'offres de locations-gérances (non).

2° Ne s'entremet pas entre les parties pour la réalisation d'opérations portant sur les biens d'autrui, au sens de la loi du 2 janvier 1970, la société d'expertise comptable qui fait insérer, sous sa raison sociale, dans un journal d'annonces légales, à but de diffusion d'actes, plusieurs publications concernant des locations-gérances (2).

3° EXPERT-COMPTABLE ET COMPTABLE AGREE - Pouvoirs - Travaux d'ordre administratif - juridique ou fiscal liés aux opérations comptables - Définition - Publications légales - Loi du 2 janvier 1970 relative à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce - Domaine d'application (non).

3° Les travaux d'ordre administratif, juridique ou fiscal, que les experts-comptables sont autorisés à effectuer en vertu de l'article 22 de l'ordonnance du 19 septembre 1945, lorsqu'ils sont directement liés aux opérations comptables, n'entrent pas dans les prévisions de l'article 1er de la loi du 2 janvier 1970. Il en est ainsi des publications légales (3).

4° ACTION CIVILE - Recevabilité - Syndicat - Intérêts collectifs de la profession - Préjudice - Préjudice direct ou indirect - Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux - Exercice d'une activité portant sur les immeubles et les fonds de commerce (loi du 2 janvier 1970) (non).

4° AGENT D'AFFAIRES - Transaction sur les immeubles et les fonds de commerce - Loi du 2 janvier 1970 - Action civile - Recevabilité - Syndicat - Intérêts collectifs de la profession - Préjudice direct ou indirect - Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux (non) 4° SYNDICAT - Action civile - Intérêts collectifs de la profession - Préjudice - Préjudice direct ou indirect 4° SYNDICAT - Action civile - Intérêts collectifs de la profession - Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux - Exercice d'une activité portant sur les immeubles et les fonds de commerce (loi du 2 janvier 1970) (non).

4° Si, aux termes de l'article L. 411-11 du Code du travail, les syndicats professionnels peuvent, au nom de la profession qu'ils représentent, exercer tous les droits reconnus à la partie civile, c'est à la condition que les faits déférés au juge portent un préjudice, direct ou indirect, à l'intérêt collectif de cette profession. Les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 ayant été édictées dans l'intérêt des personnes concernées par les opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, et non dans celui des professions admises à prêter leurs concours, leur violation n'est pas, au sens de l'article L. 411-11 du Code du travail, de nature à porter atteinte à l'intérêt collectif de l'une quelconque de ces professions, et notamment de celle représentée par la Chambre syndicale nationale des conseils juridiques et fiscaux.


Références :

Code de procédure pénale 2, 3
Code du travail L411-11
Loi 70-9 du 02 janvier 1970 art. 16
Loi 70-9 du 02 janvier 1970 art. 22
Loi 88-828 du 20 juillet 1988 art. 2 al. 1, art. 24

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, (chambre correctionnelle), 13 novembre 1986

CONFER : (1°). A rapprocher : Chambre criminelle, 1975-03-04 , Bulletin criminel 1975, n° 70, p. 191 (amnistie et cassation partielle). CONFER : (2°). A rapprocher : Chambre criminelle, 1978-11-03 , Bulletin criminel 1978, n° 298, p. 768 (casssation). CONFER : (3°). A rapprocher : Chambre criminelle, 1980-07-02 , Bulletin criminel 1980, n° 208 p. 545 (cassation sans renvoi).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 fév. 1989, pourvoi n°86-96620, Bull. crim. criminel 1989 N° 80 p. 213
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1989 N° 80 p. 213

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Le Gunehec
Avocat général : Avocat général :M. Libouban
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Gondre
Avocat(s) : Avocats :M. Jacoupy, la SCP Masse-Dessen et Georges

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1989:86.96620
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award