REJET des pourvois formés par :
- X... Patrick,
- Y... Roland,
- Z... Jean,
contre l'arrêt de la cour d'assises des Pyrénées-Atlantiques, en sa formation prévue par l'article 698-6 du Code de procédure pénale, en date du 25 mars 1988 qui, pour assassinats, tentative et complicité de ce crime, destructions par substance explosive ou incendiaire, recel de faux documents administratifs et infraction à la législation sur les armes, les a condamnés, X... et Z... à la réclusion criminelle à perpétuité, Y... à 20 ans de réclusion criminelle ; ensemble sur les pourvois de Y... et de Z... contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le moyen unique de cassation présenté pour X... et Y..., pris de la violation des articles 347, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné X... à la réclusion criminelle à perpétuité ;
" alors que le président de la cour d'assises ayant ordonné au cours des débats l'audition d'une bande enregistrée dont la transcription figurait au dossier (cote D. 362), cette pièce a été remise à chacun des membres composant la cour d'assises, en violation du principe d'oralité des débats " ;
Et sur le troisième moyen présenté pour Z... et pris de la violation des articles 310 et 315 du Code de procédure pénale, ensemble violation du principe de l'oralité des débats :
" en ce que par arrêt incident, la Cour, qui a donné acte à la défense de ce que le président avait ordonné l'audition d'une bande magnétique supportant une conversation téléphonique et, pour la rendre intelligible compte tenu de la mauvaise qualité prévisible, a fait remettre à chacun des membres de la Cour et aux auditeurs de justice une copie du procès-verbal coté D. 362 contenant la retranscription établie lors de l'écoute téléphonique, a dit n'y avoir lieu à se prononcer sur le vice allégué ;
" alors, d'une part, qu'aux termes de l'article 315 du Code de procédure pénale, la Cour est tenue de statuer sur des conclusions dont elle est saisie ; que, dès lors, elle ne pouvait refuser de statuer sur la demande de la défense relative à la régularité de l'instruction à l'audience ;
" alors, d'autre part, que le principe de l'oralité des débats s'oppose à ce que le président, avant l'audition d'un témoin, lise ou communique à la Cour des documents de la procédure écrite concernant ce témoin ; que, dès lors, en l'espèce, le président ne pouvait communiquer aux membres de la Cour et aux auditeurs de justice le procès-verbal de retranscription avant d'avoir procédé à l'audition de la bande magnétique d'écoute téléphonique " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats qu'à la fin de l'instruction à l'audience, le président, avant de faire procéder à l'audition d'une bande magnétique saisie comme pièce à conviction, a remis aux membres de la Cour et aux jurés des copies du procès-verbal, extrait du dossier de la procédure, de la transcription du contenu de cet enregistrement ;
Attendu qu'en procédant ainsi, l'instruction à l'audience étant terminée, sans observation des parties, le président a régulièrement usé du pouvoir discrétionnaire qu'il tient de l'article 310 du Code de procédure pénale sans méconnaître le principe de l'oralité des débats, contrairement à ce que soutiennent les moyens qui doivent, dès lors, être écartés ;
Attendu, en outre, qu'il n'appartenait pas à la Cour, qui ne saurait donner acte que de faits, de se prononcer sur une demande des conseils de l'accusé tendant à ce qu'il leur soit donné acte de ce qu'une mesure ordonnée constituait une violation des droits de la défense ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le premier moyen de cassation présenté pour Z..., pris de la violation des articles 28 et 34 du Code pénal, 310, 330, 331 et 335 du Code de procédure pénale :
" en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats (p. 14) qu'après que le témoin Emile A... a déclaré que privé de ses droits civiques par suite d'une condamnation pénale à 6 ans de réclusion criminelle, il ne peut prêter serment, le président a déclaré que ce témoin est entendu sans prestation de serment, à titre de renseignement ;
" alors que c'est à la Cour qu'il appartient de décider si le témoin est frappé d'incapacité ; que dès lors, le président ne pouvait décider d'entendre, sans prestation de serment et à titre de simple renseignement, un témoin acquis aux débats sans que la Cour n'ait statué sur l'incapacité qui résultait des seules déclarations dudit témoin " ;
Attendu que le procès-verbal des débats constate que le témoin A... ayant déclaré qu'il était privé de ses droits civiques par suite d'une condamnation à 6 ans de réclusion criminelle, le président a déclaré qu'il serait entendu sans prestation de serment, à titre de renseignements ;
Attendu que l'incapacité de ce témoin, prévue par les articles 28 et 34 du Code pénal, n'ayant fait l'objet d'aucune contestation ou réclamation de la part de l'accusé ou du ministère public, le président était en droit, en l'absence de tout incident contentieux, de l'entendre, comme il l'a fait, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, sans prestation de serment ;
Qu'ainsi le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation présenté pour Z..., pris de la violation des articles 59 et 60 du Code pénal, 349 et 356 du Code de procédure pénale :
" en ce que la Cour et le jury ont répondu affirmativement aux questions suivantes :
"- 3e question : " l'accusé Z... Jean est-il coupable d'avoir dans les circonstances de temps et de lieu précisées à la question n° 1, aidé ou assisté, avec connaissance, l'auteur de l'action spécifiée à la question n° 1 et qualifiée à la question n° 2, dans les faits qui l'ont préparée ou facilitée ou dans ceux qui l'ont consommée ? " ;
"- 10e question : " l'accusé Z... Jean est-il coupable, d'avoir, courant mai et juin 1984, à Biarritz, en tous cas depuis moins de 10 ans, et dans le département des Pyrénées-Atlantiques, aidé ou assisté, avec connaissance, l'auteur ou les auteurs de l'action ci-dessus spécifiée aux questions n° 4 et n° 7, et qualifiée aux questions n°s 5, 6, 8 et 9, dans les faits qui l'ont préparée ou facilitée ou dans ceux qui l'ont consommée ? " ;
"- 17e question : " l'accusé Z... Jean est-il coupable d'avoir, courant mai et juin 1984, à Biarritz, en tous cas depuis moins de 10 ans, et dans le département des Pyrénées-Atlantiques, aidé ou assisté, avec connaissance, l'auteur ou les auteurs de l'action ci-dessus spécifiée aux questions n°s 12, 13, 15 et 16, dans les faits qui l'ont préparée ou facilitée ou dans ceux qui l'ont consommée ? " ;
" alors que les questions ainsi formulées interrogent à la fois sur le fait principal, sur les circonstances aggravantes et sur l'accusation de complicité ; que pourtant, les circonstances aggravantes de préméditation tenant à la personne même de l'auteur principal, ne pouvait influer la situation du complice qu'autant qu'il les avait connues ; que, dès lors, les questions sont nulles comme étant complexes " ;
Attendu que pour chacun des crimes ayant fait l'objet des questions reproduites au moyen, la cour d'assises a été interrogée d'abord sur la culpabilité des auteurs principaux des homicides volontaires ou tentatives d'homicide volontaire qui leur étaient imputés, puis sur les circonstances aggravantes de préméditation et de guet-apens, enfin sur la complicité par aide ou assistance de Z... des crimes ainsi spécifiés et qualifiés ;
Attendu que, contrairement à ce que soutient le moyen, aucune des trois questions posées, dans ces conditions, sur la complicité de Z..., n'est entachée de complexité prohibée ;
Qu'en effet, aux termes de l'article 59 du Code pénal, le complice d'un crime ou d'un délit est puni des mêmes peines que l'auteur de ce crime ou de ce délit ; que cette disposition entraîne la conséquence que le complice encourt la responsabilité de toutes les circonstances qui aggravent le crime en la personne de l'auteur principal ;
Qu'il s'ensuit que, lorsque, comme en l'espèce, l'auteur principal et le complice sont soumis au même débat, la cour d'assises, qui a répondu affirmativement aux questions relatives à la culpabilité du premier et aux circonstances aggravantes, peut être interrogée en ce qui concerne le complice, par une question unique se référant au crime précédemment spécifié et qualifié, sans qu'il soit besoin de rappeler autrement les éléments constitutifs et les circonstances aggravantes, fussent-elles personnelles, de ce crime ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la cour d'assises ;
REJETTE les pourvois.