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03/11/1988 | FRANCE | N°87-12499

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 novembre 1988, 87-12499


Sur le premier moyen :

Attendu que, le 6 novembre 1979, Serge X..., salarié de la société Saunier-Duval, a été mortellement brûlé en intervenant dans un poste de transformation d'Electricité de France ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 janvier 1987) d'avoir retenu sa faute inexcusable alors, d'une part, qu'il résultait des éléments de la cause que l'accident dont Serge X... avait été victime ne se serait pas produit si le préposé d'EDF responsable de la consignation, et qui avait seul l'autorité nécessaire pour interdire l'a

ccès au poste de transformation, n'avait pas autorisé la victime à pénétrer à l...

Sur le premier moyen :

Attendu que, le 6 novembre 1979, Serge X..., salarié de la société Saunier-Duval, a été mortellement brûlé en intervenant dans un poste de transformation d'Electricité de France ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 janvier 1987) d'avoir retenu sa faute inexcusable alors, d'une part, qu'il résultait des éléments de la cause que l'accident dont Serge X... avait été victime ne se serait pas produit si le préposé d'EDF responsable de la consignation, et qui avait seul l'autorité nécessaire pour interdire l'accès au poste de transformation, n'avait pas autorisé la victime à pénétrer à l'intérieur des installations dont il avait la garde ; qu'en se bornant à énoncer que le préposé de Saunier-Duval n'ignorait pas que le poste pouvait être sous tension, tout en relevant par ailleurs que celui-ci avait obtenu une autorisation verbale et que les préposés d'EDF travaillaient dans des conditions identiques, la cour d'appel n'a pas caractérisé la conscience du danger que devait avoir M. Z..., substitué de Saunier-Duval et, partant, l'exceptionnelle gravité de la faute, privant ainsi sa décision de base légale ; et alors, d'autre part, qu'en énonçant, pour écarter les effets de la faute du préposé d'EDF, que M. Z... avait, de façon immédiate, seul le pouvoir hiérarchique sur les salariés, la cour d'appel a violé le principe de l'autorité au civil de la chose jugée au pénal, puisqu'il résultait de l'arrêt correctionnel qu'il appartenait à Paul Y..., préposé d'EDF, et à lui seul, d'interdire l'accès au poste, ce qui s'est traduit par une responsabilité pénale plus importante de ce préposé ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel relève que M. Z..., conducteur de travaux de la société Saunier-Duval, avait seul, sur le chantier, le pouvoir de direction sur les ouvriers et devait notamment, à l'occasion de conditions de travail particulièrement dangereuses, s'assurer que toutes les mesures de sécurité avaient été prises ; que l'autorisation verbale, et donc irrégulière, qui lui avait été donnée par l'agent d'EDF d'intervenir à l'intérieur du poste de transformation, pour un travail non prévu à l'origine, ne le dispensait pas de vérifier si ce travail pouvait s'effectuer sans risque, des moyens simples étant à sa disposition à cette fin ; qu'elle a ainsi caractérisé la conscience que ce substitué de l'employeur aurait dû avoir du danger auquel il exposait Serge X... en lui demandant d'intervenir dans un local où le courant électrique avait été maintenu, la faute de l'agent d'EDF n'étant pas de nature à l'affranchir des responsabilités qui lui étaient propres en sa qualité de chef direct de la victime ;

Attendu, d'autre part, que l'autorité de la chose jugée au pénal ne s'attache qu'au dispositif du jugement et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire ; que l'observation du juge de répression sur les responsabilités particulières qui incombaient à l'agent d'EDF dans le domaine de l'accès au poste de transformation n'avait été faite que pour justifier une condamnation plus sévère de ce prévenu ; qu'elle n'a pas eu pour effet de décharger M. Z..., du reste lui-même retenu dans les liens de la prévention, de ses responsabilités quant aux conditions dans lesquelles il avait donné l'ordre à Serge X... d'intervenir sur le poste ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le premier moyen ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 468 du Code de la sécurité sociale (ancien) devenu l'article L. 452-2 dans la nouvelle codification ;

Attendu qu'après avoir souligné l'exceptionnelle gravité des fautes imputées à M. Z... et l'absence de toute cause justificative, l'arrêt attaqué a fixé à son montant maximum la majoration des rentes servies aux ayants droit de Serge X... ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher dans quelle mesure les fautes de l'agent d'EDF pénalement sanctionnées n'étaient pas de nature à atténuer la gravité des fautes de l'employeur ou de son substitué et à justifier une majoration des rentes inférieure à son montant maximum, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé au maximum le montant de la majoration des rentes, l'arrêt rendu le 22 janvier 1987, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 87-12499
Date de la décision : 03/11/1988
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Définition - Défaut de précautions - Electrocution - Absence de coupure de courant.

1° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Exonération - Faute partielle d'un tiers.

1° En l'état d'un accident mortel du travail survenu à un salarié, brûlé en intervenant dans un poste de transformation d'Electricité de France (EDF), caractérise la conscience que le substitué de l'employeur aurait dû avoir du danger auquel il exposait la victime en lui demandant d'intervenir dans un local où le courant électrique avait été maintenu, la cour d'appel qui relève que ce substitué avait seul, sur le chantier, le pouvoir de direction sur les ouvriers, et devait notamment à l'occasion de conditions de travail particulièrement dangereuses, s'assurer que toutes les mesures de sécurité avaient été prises ; que l'autorisation verbale et donc irrégulière qui lui avait été donnée par l'agent d'EDF d'intervenir à l'intérieur du poste de transformation, pour un travail non prévu à l'origine, ne le dispensait pas de vérifier si ce travail pouvait s'effectuer sans risque, de moyens simples étant à sa disposition à cette fin .

2° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Majoration de l'indemnité - Montant - Détermination - Incidence de la faute d'un tiers.

2° SECURITE SOCIALE - ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Majoration de l'indemnité - Montant - Détermination - Appréciation de la gravité de la faute.

2° Doit être cassé, l'arrêt qui pour fixer à son montant maximum la majoration des rentes servies aux ayants droit de la victime d'un accident mortel du travail, se borne à souligner l'exceptionnelle gravité des fautes imputées au substitué de l'employeur et l'absence de toute cause justificative, sans rechercher dans quelle mesure les fautes d'un tiers pénalement sanctionnées n'étaient pas de nature à atténuer la gravité des fautes de l'employeur ou de son substitué et à justifier une majoration des rentes inférieure à son montant maximum .


Références :

Code de la sécurité sociale L468 ancien devenu L452-2

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 22 janvier 1987

DANS LE MEME SENS : (2°). Chambre sociale, 1988-11-03 Bulletin 1988, V, n° 558 (3), p. 360 (cassation). A RAPPROCHER : (1°). Chambre sociale, 1972-04-14 Bulletin 1972, V, n° 265, p. 243 (rejet) ;

Chambre sociale, 1987-07-08 Bulletin 1987, V, n° 453, p. 289 (rejet)

arrêt cité. (2°). Chambre sociale, 1979-05-16 Bulletin 1979, V, n° 420, p. 305 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 nov. 1988, pourvoi n°87-12499, Bull. civ. 1988 V N° 557 p. 359
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1988 V N° 557 p. 359

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Donnadieu, conseiller doyen faisant fonction
Avocat général : Avocat général :M. Gauthier
Rapporteur ?: Rapporteur :M. Chazelet
Avocat(s) : Avocats :MM. Célice, Guinard .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1988:87.12499
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