Sur le second moyen :
Attendu, selon le jugement attaqué, que M. X..., employé en qualité de chauffeur poids lourd par la société Brion, a été licencié après que le médecin du travail ait émis des réserves momentanées sur l'aptitude du salarié à reprendre son emploi ;
Attendu que la société des Etablissements Brion fait grief au jugement attaqué de l'avoir condamnée à verser à M. X... un complément d'indemnités de préavis, alors selon le pourvoi que l'indemnité de préavis n'est due que lorsque le salarié est apte à exécuter son travail pendant cette période et l'indemnité de préavis ne peut se cumuler avec les indemnités journalières versées par les organismes sociaux en cas de maladie ; qu'en relevant que la société s'était engagée à payer l'intégralité des deux mois de préavis, sans préciser si cet engagement comportait celui de payer, même en cas d'arrêt de travail et alors qu'il ressortait des conclusions développées par la société, que celle-ci s'était seulement engagée à payer l'indemnité de préavis pour la période postérieure à l'arrêt maladie, le conseil de prud'hommes n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 122-6 du Code du travail, alors, en outre, qu'en condamnant l'employeur à payer 3 990,33 francs d'indemnités de préavis sans donner aucune indication sur le mode de calcul lui permettant de fixer ce chiffre, le conseil de prud'hommes a encore privé sa décision de base légale au regard de la même disposition ;
Mais attendu que les juges du fond ont retenu que l'employeur s'était engagé sans réserve à verser au salarié une indemnité de préavis dont le montant n'était pas contesté, qu'ils ont ainsi légalement justifié leur décision ; que le moyen ne peut donc être accueilli ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 241-10-1 du Code du travail ;
Attendu que, pour condamner l'employeur à payer des dommages et intérêts pour rupture abusive à M. X..., auquel il avait déclaré ne pas avoir d'autres emplois à proposer après que le médecin du travail, à la suite d'une absence pour maladie du salarié, du 10 septembre 1984 au 21 janvier 1985, ait émis des réserves momentanées sur la reprise de son travail de chauffeur poids lourd et proposé une mutation, les juges du fond ont énoncé, que dans ce cas, le chef d'entreprise est tenu de prendre en considération les propositions du médecin du travail et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'y opposent, qu'en cas de difficulté ou désaccord, la décision est prise par l'inspecteur du travail après avis du médecin inspecteur du travail et que cette procédure n'avait pas été respectée ;
Qu'en se déterminant ainsi, d'une part, par des motifs, qui ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur le manquement de la société Brion à son obligation de prendre en considération les propositions du médecin du travail et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite, et alors, d'autre part, que l'inspecteur du travail ne peut intervenir qu'en cas de difficulté ou de désaccord sur l'aptitude du salarié à tenir l'emploi considéré, le conseil de prud'hommes n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 241-10-1 du Code du travail et a violé, par fausse application, le troisième alinéa de ce texte ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné l'employeur à payer des dommages-intérêts à M. X..., le jugement rendu le 8 novembre 1985, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Compiègne ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Beauvais