Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du Code civil et les articles 12 et 62 de l'accord d'entreprise " Ingénieurs et Cadres " du 19 janvier 1979, modifié le 11 juin 1980 ;
Attendu que l'article 62 de l'accord d'entreprise susvisé énonce qu'une garantie de ressources est accordée par l'entreprise aux cadres de la société remplissant certaines conditions et prenant leur retraite ou placés en situation de préretraite à partir de 60 ans ; que ce même article fixe les modalités de calcul de ladite garantie de ressources, précise que celle-ci " donne lieu, le cas échéant, à versement d'une allocation complémentaire égale à la différence entre la garantie de ressources ainsi déterminée et le montant des différentes rentes, revenus de retraite, allocations aux travailleurs privés d'emploi, etc..., de quelque nature que ce soit, perçus par l'intéressé, déduction faite des charges de famille dans la limite de 15 % " et ajoute que l'allocation complémentaire, indexée sur la valeur du point AGIRC, est versée trimestriellement, à terme échu, dès la fin du préavis ;
Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que M. X..., occupant un emploi d'ingénieur, puis de cadre supérieur à la société Carnaud emballages depuis le 12 novembre 1946, s'est vu notifier son licenciement pour motif économique par lettre du 18 août 1982 ; qu'à l'expiration de son préavis de six mois, la société lui a, par courrier du 23 février 1983, confirmé qu'il bénéficierait, dès son départ, de la garantie de ressources prévue par l'article 62 de l'accord cadres modifié le 11 juin 1980 et qu'en conséquence elle lui verserait, pendant le délai de carence institué par le décret du 24 novembre 1982, qui venait de modifier les conditions de l'indemnisation des préretraités en reportant le point de départ de la période d'indemnisation par les ASSEDIC, une allocation complémentaire à celle qu'il aurait reçue de l'ASSEDIC si ce délai de carence n'avait pas été institué ; que, la société ayant refusé de lui verser la totalité de l'allocation " garantie de ressources " à laquelle il estimait avoir droit en vertu de l'accord d'entreprise susvisé, il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir notamment la stricte application de l'article 62 dudit accord par son ancien employeur et la condamnation de celui-ci à lui payer une somme au titre de la garantie de ressources ;
Attendu que, pour débouter M. X... de sa demande " en ce qu'elle tendait à faire payer par la société Carnaud emballages les indemnités qui n'avaient pas été versées par l'ASSEDIC pendant le délai de carence institué par le décret du 24 novembre 1982 ", la cour d'appel a retenu que, d'une part, les dispositions de l'article 12 de l'accord d'entreprise du 11 juin 1980 prévoyaient que les dispositions dudit accord " ne se cumulent pas globalement avec celles de même nature relevant des textes généraux, législatifs, réglementaires ou conventionnels " et " sont à valoir sur toutes celles qui pourraient résulter de l'application des dispositions réglementaires, légales, conventionnelles ou autres, susceptibles d'intervenir ultérieurement ", et, d'autre part, les dispositions de l'article 62 du même accord conféraient expressément à la mise en oeuvre de la garantie par l'entreprise un caractère complémentaire, le
montant de la somme due étant calculé en procédant à la différence entre des revenus et le montant de la garantie théorique, les parties à l'accord n'ayant pas eu pour but de suppléer au non-versement de prestations par les organismes sociaux ;
Attendu, cependant, que l'employeur était, aux termes mêmes de l'article 62 de l'accord d'entreprise, tenu de verser à M. X..., dès la fin de son préavis, " la différence entre la garantie de ressources déterminée selon les modalités prévues audit article et le montant global des rentes, revenus de retraite, allocations aux travailleurs privés d'emploi perçus par l'intéressé " ; que, de plus, l'article 12 de l'accord d'entreprise prévoit que, " si des dispositions nouvelles, qu'elles soient d'ordre législatif, réglementaire, conventionnel ou autre -intervenant postérieurement à la signature de l'accord- s'avéraient moins avantageuses, celles du présent accord continueraient d'être appliquées dans les conditions prévues " ; que, dès lors, la somme mise à la charge de l'employeur par l'article 62 de l'accord d'entreprise devait être calculée compte tenu de l'absence de versement de toute prestation par l'ASSEDIC durant la période du délai de carence institué par le décret du 24 novembre 1982 ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 octobre 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen