REJET du pourvoi formé par X..., contre un arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, du 7 janvier 1986 qui l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel de Paris du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public.
LA COUR,
Vu l'arrêt de la Cour de Cassation en date du 17 avril 1985 portant désignation de juridiction en application de l'article 681 du Code de procédure pénale ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
1° - Sur la recevabilité du pourvoi :
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 684 du Code de procédure pénale que lorsque la chambre d'accusation a été saisie dans les conditions prévues à l'article 681 dudit Code, l'arrêt portant renvoi de l'inculpé devant le tribunal correctionnel peut, dans tous les cas et par dérogation à l'article 574, faire l'objet d'un pourvoi en cassation ;
Que tel est le cas en l'espèce et que le pourvoi est recevable ;
2° - En l'état ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 23, 29, alinéa 1er, et 31 de la loi du 29 juillet 1881, 575 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponses au mémoire du demandeur, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné le renvoi du demandeur devant le tribunal correctionnel de Paris des chefs de diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public ;
" aux motifs qu'il appartiendra à X..., qui n'a pas contesté avoir tenu les propos jugés diffamatoires par Y..., de faire valoir ses moyens de défense devant la juridiction de jugement ; qu'il pourra aux formes de droit offrir de rapporter les preuves des faits diffamatoires ; qu'il échet en l'état d'ordonner le renvoi du mis en cause devant la juridiction de jugement ;
" alors, d'une part, que le délit de diffamation n'est susceptible d'être constitué que si le prévenu a agi de mauvaise foi ; qu'en l'absence de toute constatation de l'élément moral de l'infraction la Cour de Cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle sur l'infraction retenue ;
" alors, d'autre part, que la chambre d'accusation n'a pas répondu aux articulations péremptoires du mémoire du demandeur, soulignant qu'il était de son devoir d'informer les conseillers municipaux de la situation créée par le dépôt de bilan de la société Semisis, et de ses conséquences financières pour la commune de Villeparisis et ses administrés, afin d'obtenir l'autorisation d'introduire une action judiciaire à l'encontre de la partie civile, responsable légale de la Semisis ; qu'il avait ainsi agi dans le strict cadre de ses fonctions et obligations légales, en l'absence de toute intention frauduleuse " ;
Attendu que pour renvoyer X... devant le tribunal correctionnel, l'arrêt attaqué déclare qu'il résulte de l'information des charges suffisantes contre lui d'avoir commis le délit de diffamation publique envers Y... citoyen chargé d'un mandat public ; que l'inculpé ayant fait soutenir qu'ayant succédé au plaignant dans les fonctions de maire de la commune de Villeparisis, il avait l'obligation d'informer les conseillers municipaux, en vue d'engager une action judiciaire contre les responsables d'une société d'économie mixte dont son prédécesseur avait présidé le conseil d'administration, les juges énoncent qu'il appartiendra à X... qui n'a pas contesté les propos retenus par Y... comme diffamatoires, de faire valoir ses moyens de défense devant la juridiction de jugement, qu'il pourra, aux formes de droit, offrir de rapporter la preuve des faits imputés ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre d'accusation qui rappelle surabondamment que la preuve de la vérité des faits ne peut résulter que d'un débat contradictoire devant le Tribunal, n'était pas tenue de répondre plus amplement aux conclusions de la défense sur le défaut d'intention délictuelle ;
Qu'en effet, les imputations dont il appartient aux juges du fond d'apprécier le caractère diffamatoire, sont de droit réputées faites avec intention de nuire ; qu'il n'est pas nécessaire pour les juridictions de jugement et à plus forte raison pour les juridictions d'instruction de constater expressément la mauvaise foi de leur auteur ;
Que si aucune disposition n'interdit de détruire cette présomption devant la chambre d'accusation encore faut-il que l'inculpé ne se borne pas, comme en l'espèce, à alléguer la seule nécessité d'informer mais qu'il apporte la preuve incombant à lui seul de l'existence de faits justificatifs dont la réunion est de nature à établir la bonne foi ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.