Sur le premier moyen pris en ses deux branches :
Vu l'article 17, paragraphe 4-d) et 5 de la convention relative au contrat de transport international de marchandises par route (C.M.R.), ainsi que l'article 18, § 2 de ladite convention ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, le transporteur est déchargé de sa responsabilité lorsque la perte ou l'avarie résulte d'un risque particulier inhérent à la nature de la marchandise transportée et si le transporteur ne répond pas de certains des facteurs qui ont causé le dommage, sa responsabilité n'est engagée que dans la proportion où les facteurs dont il répond ont contribué au dommage ; qu'aux termes du second de ces textes, lorsqu'il est établi que, eu égard aux circonstances de fait, la perte ou l'avarie a pu résulter d'un risque particulier de cette sorte, il y a présomption qu'elle en résulte, l'ayant-droit conservant toutefois la possibilité de faire la preuve que le dommage n'a pas eu pour cause totalement ou partiellement ledit risque ;
Attendu que pour condamner la société Transports de l'Ouest Européen à réparer le dommage résultant de l'avarie survenue à la marchandise au cours d'un transport effectué d'Angleterre en France et soumis à la C.M.R., l'arrêt attaqué énonce que l'article 18 de cette convention édicte une présomption relative à l'origine du dommage, présomption qui peut être combattue par la preuve contraire rapportée par l'ayant-droit, qu'il n'est pas établi que le transport de biscuits chocolatés en plein été par camion baché et non frigorifique soit à l'origine indiscutable du dommage, alors que d'autres circonstances de fait ont nécessairement contribué à la perte et que la compagnie d'assurances LLoyd's rapporte la preuve que le transport n'a pas eu lieu dans les conditions convenues ;
Attendu qu'en obligeant ainsi le transporteur à établir que la nature de la marchandise était la cause exclusive de l'avarie pour lui permettre de bénéficier de l'exonération de responsabilité prévue par la C.M.R., la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens,
CASSE et ANNULE l'arrêt rendu le 16 novembre 1983 entre les parties, par la Cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Caen.