La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/06/2025 | FRANCE | N°24VE01931

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 05 juin 2025, 24VE01931


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. AD... D..., M. AQ... K..., M. V... L..., M. AA... et Mme AU... AO..., M. Q... F..., M. C... AF..., M. A... P..., Mme M... R..., Mme AH... AP..., M. AM... et Mme N... AV..., M. O... U..., M. S... AI..., M. T... H..., M. AJ... W..., Mme G... et M. AT... AK..., M. X... et Mme AG... AR..., M. I... et Mme BA... J..., M. AX... et Mme AE... AL..., Mme Z... Y..., M. A... et Mme AN... AY..., M. T... AB..., M. E... AC... et Mme AS... AZ..., M. AW... AC... ont demandé au tribunal administrat

if d'Orléans d'annuler les arrêtés du 1er février 2023 et du 27 juillet 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. AD... D..., M. AQ... K..., M. V... L..., M. AA... et Mme AU... AO..., M. Q... F..., M. C... AF..., M. A... P..., Mme M... R..., Mme AH... AP..., M. AM... et Mme N... AV..., M. O... U..., M. S... AI..., M. T... H..., M. AJ... W..., Mme G... et M. AT... AK..., M. X... et Mme AG... AR..., M. I... et Mme BA... J..., M. AX... et Mme AE... AL..., Mme Z... Y..., M. A... et Mme AN... AY..., M. T... AB..., M. E... AC... et Mme AS... AZ..., M. AW... AC... ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les arrêtés du 1er février 2023 et du 27 juillet 2023 par lesquels le maire de Lèves (Eure-et-Loir) a délivré un permis de construire et un permis de construire modificatif à la SCCV AR Carmel, portant sur la construction d'un ensemble immobilier de 100 logements sur le territoire des communes de Champhol et Lèves et la décision rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2303058 du 7 mai 2024, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 12 juillet 2024, le 22 octobre 2024 et le 28 octobre 2024, M. AD... D..., M. AQ... K..., M. V... L..., M. C... AF..., M. AM... et Mme N... AV..., M. O... U..., M. I... et Mme BA... J..., Mme Z... Y... et M. AW... AC..., représentés par Me Galy, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces arrêtés et décision ;

3°) et de mettre à la charge de la commune de Lèves le versement d'une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils sont recevables à agir ;

- l'arrêté méconnait les dispositions du plan local d'urbanisme en tant qu'il emporte démolition d'une chapelle, identifiée par le plan local d'urbanisme exécutoire à la date de l'arrêté attaqué, comme élément de patrimoine à préserver sur le fondement de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme et dès lors que ce classement n'est pas illégal ;

- il aurait dû être délivré conjointement par le maire de Lèves et le maire de Champhol dès lors que le terrain d'assiette du projet est situé sur le territoire de ces deux communes ;

- l'emprise au sol du projet dépasse 60% de la surface du terrain en méconnaissance des articles 1er du paragraphe U1 et du paragraphe U3 du chapitre 2 du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Lèves et de l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme ;

- l'arrêté méconnait les dispositions de l'article 1er du paragraphe U2 du chapitre 2 du règlement du PLU dès lors que les constructions projetées n'optimisent pas les apports solaires passifs ;

- il méconnait les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et de l'article 3 du paragraphe U2 du chapitre 2 du règlement du PLU faute d'insertion du projet dans son environnement ;

- il méconnait les dispositions des articles R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des destructions d'arbres de haute tige qu'il induit ;

- il méconnait les dispositions de l'article 3 du paragraphe U3 du chapitre 2 du règlement du PLU, les articles L. 421-6, R. 111-2 et R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement en raison d'une gestion non-conforme des eaux pluviales ;

- il méconnait les dispositions des articles L. 113-1 et L. 113-2 du code de l'urbanisme et des plans locaux d'urbanisme de Lèves et Champhol dès lors qu'il porte atteinte à l'espace boisé classé situé en limite séparative ;

- il méconnait les dispositions de l'article 2 du paragraphe U2 du chapitre 3 relative à la desserte du projet et de l'article Uc4 du règlement du PLU de Champhol.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 septembre 2024, la commune de Lèves, représentée par Me Blanchard, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 octobre 2024, la SCCV AR Carmel, représentée par Me Rochmann-Sacksick, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 18 mars 2025, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 avril 2025, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier et notamment la lettre du 11 octobre 2024 de Me Galy indiquant que M. AV... est décédé et que son épouse, Mme AV... se désiste de l'instance.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aventino,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- et les observations de Me Galy pour les requérantes et de Me Baysan pour la SCCV AR Carmel.

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Lèves a, par un arrêté du 1er février 2023, délivré à la SCCV AR Carmel un permis de construire un ensemble immobilier de 100 logements sur une parcelle cadastrée section AK 129 située sur le territoire de la commune de Lèves. M. L... BB... ont formé un recours gracieux contre cet arrêté qui a été rejeté par une décision du maire de Lèves du 23 mai 2023. La SCCV AR Carmel a, par un arrêté du maire de Lèves du 27 juillet 2023, obtenu un permis de construire modificatif afin notamment d'ajouter au terrain d'assiette du projet une parcelle AN 2 située sur la commune de Champhol. M. L... BB... font appel du jugement du 7 mai 2024 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés et décision.

Sur le désistement :

2. Mme AV... déclare se désister de la présente instance. Ce désistement est pur et simple, rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.

Sur la légalité des arrêtés de permis de construire et de permis de construire modificatif des 1er février et 27 juillet 2023 ainsi que de la décision de rejet du recours gracieux :

En ce qui concerne la compétence du maire de Lèves :

3. Aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire (...) ou de démolir (...) sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions qu'une construction constituée d'un ensemble immobilier unique implanté sur le territoire de deux communes doit, en principe, faire l'objet d'un seul permis de construire, délivré conjointement par les deux maires compétents. Toutefois, lorsque le terrain d'assiette d'un projet déborde sur le territoire de la commune voisine, le maire de la commune où est implanté le projet est seul compétent pour délivrer le permis de construire dans le cas où les travaux exécutés sur le territoire de la seconde commune ne sont pas soumis à autorisation de construire.

5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué notamment de la parcelle AK 129 dont le registre cadastral indique qu'elle est entièrement située sur le territoire de la commune de Lèves. Si les requérants produisent des plans de zonage du plan local d'urbanisme de la commune de Lèves ainsi que le plan des limites administratives issu du site internet Géoportail, desquels il ressort que la limite des deux communes ne suit pas exactement la limite cadastrale de cette parcelle au nord du projet, ces plans sont contredits par le plan de zonage du plan local d'urbanisme de la commune de Champhol qui fixe sa limite territoriale et la limite de la zone classée en espace boisé, en superposition de la limite cadastrale de la parcelle AK 129. Il en résulte que cette parcelle doit être regardée comme étant entièrement située sur le territoire de la commune de Lèves et que le maire de cette commune était compétent pour délivrer l'arrêté de permis de construire initial en litige, quand bien même cette parcelle est desservie par une voie publique située sur le territoire de la commune de Champhol et dispose d'une adresse postale dans cette commune. Enfin, il est constant que le permis de construire modificatif ajoute au terrain d'assiette la parcelle cadastrée AN 2 située sur le territoire de la commune de Champhol. Toutefois, le maire de la commune de Lèves était seul compétent pour délivrer ce permis modificatif dès lors qu'aucuns travaux ne sont autorisés sur cette parcelle protégée par un classement en espace boisé classé.

En ce qui concerne le respect des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme :

6. En premier lieu, il ressort de la délibération du 25 juin 2019, rendue exécutoire par application des règles de publicité de droit commun des délibérations, que le conseil municipal de Lèves a abrogé le classement par le plan local d'urbanisme de la chapelle du Carmel en immeuble bâti à protéger sur le fondement de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme à la suite de la signature d'un protocole transactionnel avec son propriétaire qui avait introduit un recours contre ce classement. Si le plan local d'urbanisme de la commune de Lèves a fait l'objet d'une modification sur le fondement de l'article L. 151-36 du code de l'urbanisme approuvée par une délibération du 12 décembre 2022, les changements listés de façon exhaustive dans le rapport de présentation et portant notamment sur le zonage d'un secteur, les cœurs d'îlots, quelques modifications ponctuelles du règlement et sur des corrections d'erreurs matérielles, ne portent pas sur le classement des éléments du bâti et des paysages protégés. Cette délibération n'a ainsi pas eu pour objet ou pour effet de classer à nouveau en bâti protégé la chapelle du Carmel, quand bien même l'annexe du règlement du plan local d'urbanisme n'a pas été consolidée dans sa version issue de la délibération précitée du 25 juin 2019. Ainsi, à la date à laquelle l'autorisation de démolition en litige a été délivrée, la chapelle du Carmel de Chartres ne faisait plus l'objet d'une protection.

7. En tout état de cause, en vertu d'un principe général, il incombe à l'autorité administrative de ne pas appliquer un règlement illégal. Ce principe trouve à s'appliquer, en l'absence même de toute décision juridictionnelle qui en aurait prononcé l'annulation ou les aurait déclarées illégales, lorsque les dispositions d'un document d'urbanisme, ou certaines d'entre elles si elles en sont divisibles, sont entachées d'illégalité, sauf si cette illégalité résulte de vices de forme ou de procédure qui ne peuvent plus être invoqués par voie d'exception en vertu de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme. Ces dispositions doivent ainsi être écartées, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, par l'autorité chargée de délivrer des certificats d'urbanisme ou des autorisations d'utilisation ou d'occupation des sols, qui doit alors se fonder, pour statuer sur les demandes dont elle est saisie, sur les dispositions pertinentes du document immédiatement antérieur ou, dans le cas où celles-ci seraient elles-mêmes affectées d'une illégalité dont la nature ferait obstacle à ce qu'il en soit fait application, sur le document encore antérieur ou, à défaut, sur les règles générales fixées par les articles L. 111-1 et suivants et R. 111-1 et suivants du code de l'urbanisme.

8. A supposer même qu'à la date des décisions en litige, le plan local d'urbanisme de la commune de Lèves en vigueur identifie la chapelle du Carmel, bâtiment de forme hexagonale accolé à un ensemble de huit autres édifices de même forme, située sur la parcelle AK 129, comme " élément de paysage à protéger " sur le fondement des dispositions de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme et prescrit de " préserver la chapelle à l'identique ", il ressort des pièces du dossier que ce classement, opéré en 2018, était justifié, non par l'édifice en tant que tel, mais par les vitraux qui y étaient apposés et qu'à cette date, ces vitraux avaient été déposés et déplacés dans les locaux de l'entreprise qui les avait réalisés. Il est en outre constant que les carmélites qui occupaient ce bien ont quitté les lieux et vendu leur bien. Eu égard au déplacement définitif des vitraux ayant justifié initialement le parti d'aménagement des auteurs du plan, le classement de la chapelle du Carmel comme élément de paysage à protéger par le plan local d'urbanisme, sur le fondement de l'article L. 151-19 du code de l'urbanisme, procède d'une erreur manifeste d'appréciation. Le maire de Lèves devait dès lors s'abstenir d'appliquer cette disposition illégale.

9. En l'absence de protection de la chapelle par le document d'urbanisme remis en vigueur, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du plan local d'urbanisme protégeant la chapelle du Carmel ne peut qu'être écarté.

10. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er du paragraphe U1 du chapitre 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Lèves relative à l'emprise bâtie : " L'emprise bâtie peut atteindre en secteur Ub : 60% de l'unité foncière ". Aux termes de l'article 1er du paragraphe U3 du même chapitre : " (...) Un pourcentage de la parcelle devra être préservé en espace libre végétalisée ou de pleine terre. - En secteur Ub : minimum 40% de l'unité foncière (...) ". L'annexe 1 de ce règlement relative aux définitions précise en outre : " (...) Emprise au sol : L'emprise au sol est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus. (...) Espaces libres : Surface au-dessus du sol, non occupée par les constructions, les aires collectives de stationnement, ainsi que l'aménagement de voirie ou d'accès. (...) ".

11. D'une part, compte tenu des définitions précitées, le calcul de l'emprise bâtie de la construction projetée ne peut tenir compte de la surface de la dalle en béton située sous une surface végétalisée et ne dépassant pas le niveau du sol, laquelle constitue une surface libre végétalisée. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les constructions projetées, d'une emprise au sol de 3 145 m², s'implantent sur un terrain d'assiette d'une surface totale de 7 120 m² dont 6 728 m² sur la commune de Lèves. Le projet dispose, selon la notice descriptive, de 2 761 m² d'espaces libres végétalisés soit de pleine terre soit " sur dalle ", correspondant ainsi à plus de 40 % de l'unité foncière. Par suite, le moyen invoqué sur ce point doit être écarté.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du paragraphe U2 du chapitre 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Lèves : " Les constructions seront implantées de manière à optimiser les apports solaires passifs ".

13. D'une part, ces dispositions n'imposent pas que les façades d'une construction soient implantées selon une orientation précise, ni que le pétitionnaire doive justifier d'une étude sur les apports solaires mais seulement qu'en fonction de la configuration du terrain d'assiette et des autres règles d'urbanisme la construction tire le meilleur parti des apports solaires. D'autre part, il ressort des pièces du dossier de permis de construire que les bâtiments disposeront de plusieurs ouvertures à tous les étages, y compris de baies-vitrées, les surfaces vitrées représentant 1/6ème de la surface habitable, que plus de la moitié des logements bénéficieront d'une double orientation et que les autres appartements sont exposés Ouest, Est ou Sud, et seuls 9 appartements sur 100 ont une mono-exposition Nord. Dans ces conditions, en estimant que les constructions sont implantées de manière à optimiser les apports solaires passifs, le maire de la commune n'a pas entaché l'arrêté de permis de construire initial d'une erreur manifeste d'appréciation.

14. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 du paragraphe U2 du chapitre 2 du règlement du plan local d'urbanisme : " Les constructions et installations nouvelles, les aménagements et les extensions doivent par leur situation, leur architecture, leur dimension ou leur aspect extérieur respecter le caractère et l'intérêt des lieux avoisinants, des sites et des paysages naturels et urbains locaux ". Ces dispositions ont le même objet que celles de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et posent des exigences qui ne sont pas moindres. Dès lors, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité des décisions attaquées.

15. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel ou urbain de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il appartient au juge d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel ou urbain sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

16. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette, sur lequel était déjà érigés un ensemble de 9 bâtiments hexagonaux dont une chapelle qui ne présentent aucune qualité architecturale, constitue une enclave dans un espace boisé classé et qu'il jouxte sur l'une de ses limites une zone pavillonnaire dense qui ne présente pas davantage d'intérêt architectural particulier ainsi que des équipements sportifs. Si le projet consiste, après suppression de l'existant, à ériger quatre bâtiments dont l'emprise au sol est plus importante, ni la hauteur et le gabarit de ces bâtiments, limités à R+2 et une dizaine de mètres, ni l'architecture de facture classique, ne sont en rupture avec les maisons individuelles du lotissement. Le projet autorisé prévoit en outre des aménagements paysagers et notamment la plantation d'arbres qui permettront d'assurer la transition avec les zones naturelles et de limiter l'empreinte visuelle. Dès lors, eu égard à la localisation du projet, à ses caractéristiques et aux aménagements paysagers prévus, le projet n'est pas de nature à porter atteinte à l'intérêt des lieux environnants.

17. En cinquième lieu, aux termes de l'article 3 du paragraphe U3 du chapitre 2 du règlement de la zone U du plan local d'urbanisme de Lèves : " Les espaces paysagers dans les opérations d'aménagement, devront intégrer des dispositifs de gestion des eaux pluviales permettant entre autres de rafraîchir l'atmosphère lors des fortes chaleurs. ". Aux termes de l'article 3 du paragraphe U2 du chapitre 3 du règlement de la zone U de ce même règlement : " 3.2. Eaux pluviales - Pour chaque construction, le recueil des eaux pluviales à la source devra être privilégié pour limiter les débits évacués. En cas d'impossibilité, lorsqu'il existe un réseau collectif apte à recueillir les eaux pluviales, les aménagements sur le terrain devront garantir leur évacuation dans ledit réseau. En l'absence d'un tel réseau ou en cas de réseau insuffisant, les aménagements nécessaires au libre écoulement des eaux pluviales, et éventuellement à la limitation des débits provenant de la propriété, sont à la charge du constructeur cela quelle que soit la superficie du terrain. ".

18. Il ressort de la notice du projet que les eaux pluviales seront traitées majoritairement à la source, par leur absorption sur les toitures terrasses et les espaces de pleine terre aménagés par le projet et, de façon résiduelle, par le biais d'un bassin de rétention dont le volume sera déterminé suivant les directives du gestionnaire du réseau d'assainissement. En outre, l'arrêté de permis de construire en litige prévoit une prescription, qui s'impose au pétitionnaire, renvoyant aux termes de l'avis de la direction du cycle de l'eau de Chartres métropole, consultée sur le projet, aux termes duquel : " Les eaux pluviales seront gérées à la parcelle " et " Le rejet par trop plein des eaux pluviales de cette opération est limité à 50l/s/ha soit 33l/s ". Il en résulte que les eaux pluviales du projet seront recueillies et évacuées sur le terrain d'assiette du projet et qu'elles ne pourront être rejetées dans le réseau des eaux pluviales qu'à titre subsidiaire selon un débit maximal, imposant au pétitionnaire de dimensionner ses aménagements, et notamment le bassin de rétention, pour les respecter. Le moyen tiré de ce que le projet méconnait les dispositions précitées du règlement du plan local d'urbanisme, les articles L. 421-6, R. 111-2 et R. 111-26 du code de l'urbanisme et L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement en raison d'une gestion non-conforme des eaux pluviales dès lors que rien dans la notice ni les plans ne montre que les eaux pluviales seront gérées à la parcelle, ne peut qu'être écarté.

19. En sixième lieu, aux termes de l'article 2 du paragraphe U1 du chapitre 3 du règlement du plan local d'urbanisme de Lèves : " Les constructions doivent être desservies par des voies carrossables et praticables par tous les temps dont les caractéristiques correspondent aux normes de sécurité publique, prévoyant l'utilisation des voies par tous les usagers (y compris piéton, personne à mobilité réduite et cycliste). / - Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé, et notamment si les caractéristiques de ces voies rendent difficile la circulation ou l'utilisation des engins de lutte contre l'incendie. / - Il peut être également refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Le nombre des accès sur les voies publiques peut être limité dans l'intérêt de la sécurité. En particulier, lorsque le terrain est desservi par plusieurs voies, les constructions peuvent n'être autorisées que sous réserve que l'accès soit établi sur la voie où la gêne pour la circulation sera la moindre ".

20. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est desservi par la rue de la Cité, à double sens et rectiligne. Si cette rue présente des rétrécissements liés à la présence de places de stationnement, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il en résulte des difficultés de circulation alors qu'elle dessert d'ores et déjà de nombreuses maisons et des équipements sportifs. En outre, le terrain d'assiette est également relié aux axes routiers principaux par la rue des Champs Brizards qui traverse le lotissement du même nom, à double sens et suffisamment large. Ces accès permettent de déboucher au droit du terrain d'assiette sur une placette en impasse, dont les dimensions permettent d'effectuer l'ensemble des manœuvres nécessaires aux engins de secours notamment, puis d'accéder à l'aire de stationnement souterraine du projet d'une capacité de stationnement de l'ordre de 182 véhicules. Dès lors, la desserte n'est pas inadaptée à l'ampleur du projet. Le moyen invoqué sur ce point doit donc être écarté dans toutes ses branches, y compris celle tirée de la méconnaissance de l'article UC4 du règlement du plan local d'urbanisme de Champhol qui n'est pas applicable au projet.

En ce qui concerne le respect des dispositions du code de l'urbanisme :

21. En premier lieu, aux termes de l'article R. 111-26 du code de l'urbanisme " Le permis (...) doit respecter les préoccupations d'environnement définies aux articles L. 110-1 et L. 110-2 du code de l'environnement. Le projet peut n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si, par son importance, sa situation ou sa destination, il est de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement. (...) ".

22. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section AK 129, sur laquelle les constructions sont autorisées, est classée en zone urbaine et non en espace boisé classé. Le pétitionnaire indique sans être contesté que si 41 arbres seront abattus pour réaliser le projet, cela sera compensé par la plantation de 31 nouveaux arbres d'essences locales variées. Les requérants n'établissent pas que le projet ainsi autorisé serait de nature à avoir des conséquences dommageables pour l'environnement et n'indiquent d'ailleurs pas quelle prescription spéciale aurait dû être imposée par le maire à ce titre.

23. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements ". Aux termes de l'article L. 113-2 du même code : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements ".

24. D'une part, il résulte de ces articles qu'ils régissent le classement par le plan local d'urbanisme des espaces boisés classés ainsi que les règles qui leur sont applicables. Les requérants ne peuvent dès lors utilement soulever leur méconnaissance par le projet autorisé. D'autre part et en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que les constructions projetées n'empiètent pas sur l'espace boisé classé par le plan local d'urbanisme de la commune de Lèves, ni par celui de Champhol. La circonstance que la rampe d'accès au sous-sol longe cette espace, qu'une petite partie du sous-sol soit implantée sur la limite sud et que les façades soient situées à quelques mètres des arbres n'est enfin pas de nature à compromettre la conservation et la protection de ces boisements.

25. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité, M. L... BB... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Sur les frais liés à l'instance :

26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge la commune de Lèves, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. L... BB... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. L... BB... le versement de la somme de 1 500 euros à la commune de Lèves ainsi que de la même somme de 1 500 euros à la SCCV AR Carmel sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Il est donné acte du désistement de Mme AV....

Article 2 : La requête de M. L... BB... est rejetée.

Article 3 : M. AD... D..., M. AQ... K..., M. V... L..., M. C... AF..., M. O... U..., M. I... et Mme BA... J..., Mme Z... Y... et M. AW... AC... verseront une somme de 1 500 euros à la commune de Lèves et une même somme de 1 500 euros à la SCCV AR Carmel en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié M. V... L..., premier requérant dénommé en application du troisième alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la SCCV AR Carmel et à la commune de Lèves.

Copie en sera adressée à la communauté du Carmel de Chartres.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :

M. B..., premier vice-président, président de chambre

Mme Mornet, présidente-assesseure,

Mme Aventino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2025.

La rapporteure,

B. AventinoLe président,

B. B...

La greffière,

I. Szymanski

La République mande et ordonne au préfet d'Eure-et-Loir en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24VE01931


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 24VE01931
Date de la décision : 05/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Barbara AVENTINO
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : LABRUSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-05;24ve01931 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award