Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :
- sous le n° 2005835, d'annuler la décision du 2 mai 2020 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise (SDIS 95) a implicitement rejeté sa demande d'octroi de la protection fonctionnelle et d'enjoindre au président du conseil d'administration du SDIS 95 de lui octroyer le bénéfice de la protection fonctionnelle ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir ;
- sous le n° 2107339, de condamner le SDIS 95 à lui verser la somme de 100 380 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.
Par un jugement n° 2005835-2107339 du 6 juillet 2023, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du 2 mai 2020, enjoint au SDIS 95 d'accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle à M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement et rejeté les conclusions indemnitaires de M. C....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 septembre 2023, le SDIS 95, représenté par Me Lafay, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a annulé la décision du 2 mai 2020 et lui a enjoint d'accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle à M. C... et de rejeter la demande présentée par M. C... sous le n° 2005835 devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;
2°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures requises ;
- la protection fonctionnelle ne pouvait être accordée dès lors que les faits en cause ne sont pas liés au service ou, du moins, aux fonctions de sapeur-pompier de M. C... et que ce dernier a commis une faute personnelle en participant à un évènement festif alcoolisé non autorisé au sein de la caserne de Bessancourt.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 février 2024, M. C..., représenté par la SELARL Ingelaere et Partners avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du SDIS 95 la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Florent,
- les conclusions de Mme Janicot, rapporteure publique,
- les observations de Mme A... pour le SDIS 95 et celles de Me Vi Van pour M. C....
Considérant ce qui suit :
1. Le service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise (SDIS 95) fait appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 6 juillet 2023 en tant qu'il a annulé la décision implicite de son président du 2 mai 2020 refusant d'accorder à M. C..., sapeur-pompier professionnel, la protection fonctionnelle et lui a enjoint d'accorder à l'agent ladite protection.
2. Aux termes du I de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " A raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l'ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d'une protection organisée par la collectivité publique qui l'emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire. ".
3. Ces dispositions établissent à la charge de la collectivité publique et au profit des agents publics, lorsqu'ils ont été victimes d'attaques à l'occasion ou du fait de leurs fonctions, sans qu'une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général. Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent concerné est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu'il a subis, y compris ceux résultant d'une atteinte portée à ses biens. Cette protection n'est due, cependant, que lorsque les agissements concernés visent l'agent concerné à raison de sa qualité d'agent public.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a sollicité auprès de son employeur, par courrier du 20 février 2020, le bénéfice de la protection fonctionnelle sur le fondement du I de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 après avoir porté plainte pour dénonciation calomnieuse contre l'une de ses collègues l'ayant accusé d'agression sexuelle dans la nuit du 29 au 30 mars 2017, à la suite d'une soirée alcoolisée à la caserne, avant d'affirmer quelques semaines plus tard que les rapports étaient consentis. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si les faits à l'origine de la dénonciation litigieuse se sont déroulés sur le lieu de travail de M. C..., ces derniers n'ont pas eu lieu à l'occasion de l'exercice de ses fonctions par l'intéressé mais de nuit, à la suite d'une soirée privée et il ne ressort pas des pièces du dossier que cette dénonciation résultait d'une volonté de lui porter atteinte en sa qualité de sapeur-pompier. A cet égard, si M. C... indique que ces dénonciations, faites sous la pression de deux autres collègues, avaient pour objectif de l'évincer du service, cette allégation n'est pas corroborée par les pièces du dossier, qui laissent apparaître que la dénonciation a été motivée par le souci de transparence vis-à-vis de la hiérarchie, compte tenu de ce que les faits avaient eu lieu à la caserne et qu'un certain nombre d'agents en avaient été partiellement témoins. Il suit de là que le SDIS 95 est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a considéré que M. C... a été victime d'attaques à raison de ses fonctions et a considéré par voie de conséquence que le refus opposé sur le fondement du I de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 à la demande de protection fonctionnelle de M. C... était injustifié.
5. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le SDIS 95 est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision implicite du 2 mai 2020 et lui a enjoint d'accorder la protection fonctionnelle à M. C.... Dans les circonstances de l'espèce, il n'y pas lieu, en revanche, de faire droit aux conclusions du SDIS 95 tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font par ailleurs obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. C... présentées au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : Les articles 1 à 3 du jugement n° 2005835-2107339 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 6 juillet 2023 sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par M. C... sous le n° 2005835 devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.
Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au service départemental d'incendie et de secours du Val-d'Oise et à M. B... C....
Délibéré après l'audience du 15 mai 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente de chambre,
M. Camenen, président-assesseur,
Mme Florent, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mai 2025.
La rapporteure,
J. FlorentLa présidente,
C. Signerin-IcreLa greffière,
V. Malagoli
La République mande et ordonne au préfet du Val-d'Oise en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23VE02114 2